Interrogé par le Quotidien privé camerounais, Le Jour, le préparateur physique des Lions Indomptables et de la section formation de l’Olympique de Marseille pose un regard sur la forme des joueurs lors de la Can Total 2017.
Quelle est votre réaction à la suite de l’accueil qui vous a été réservé après le sacre des Lions Indomptables à la Can 2017 ?
C’était quelque chose de très fort, d’impressionnant de voir l’engouement des gens et surtout ce que le football peut susciter dans la joie comme parfois dans la peine. Ç’a été un moment fort de faire 2h30 de tour de la ville de Yaoundé. Ça valait vraiment le coup d’être vécu. Avant cela, on a été reçu par Paul Biya, le président de la République. C’est aussi un moment fort de cette Can, d’être accueilli par le chef de l’Etat, couronné par une distinction qui correspond à la légion d’honneur en France. C’est une reconnaissance de l’exploit sportif qu’on a accompli et ça montre aussi un impact au sein de la population camerounaise.
Au cours de cette Can 2017 au Gabon, lors des conférences de presse d’après-match à partir du 2ème tour, les sélectionneurs adverses notaient toujours que les Lions ont eu un ascendant physique dans les matchs. Quel a été votre secret ?
Je n’ai pas de secret, mais on a eu des résultats. Mettre en avant un seul domaine, parce que la performance dans le domaine du football est factorielle. Le jour où il y a défaite, ça va moins bien, parce qu’on va pointer la préparation physique du doigt. Si on a été bien, en terminant des matchs physiquement bien, c’est un ensemble de choses. Mes collègues du staff médical, avec l’entraîneur, son adjoint, on a adopté ensemble une philosophie. On avait des joueurs forts, puisque la préparation a commencé au mois de décembre, pour les joueurs qui avaient terminé le championnat. Ça été toujours un partage au quotidien, à amener les Lions à être plus performants le plus longtemps possible. On envisageait les prolongations. C’est un travail d’équipe. Si le coach ne vous permet pas de travailler et ne vous fait pas confiance, c’est compliqué. Mais vraiment, on avait une harmonie au sein du staff technique et du staff médical. Mais il y a eu aussi l’apport de Gert (le kiné arrivé quelques jours avant la CAN, ndlr) avec qui j’ai bien échangé. On a bien fait des choses sur le plan athlétique. On préparait l’entraînement le matin, aller en salle de fitness ou la mobilité. On a vraiment travaillé de concert. Donc, dégager la préparation physique, je n’aime pas trop, parce que la performance est un ensemble de choses. Et après, il y a les jours du coach, et il faut que tout soit harmonieux pour amener le joueur à être au maximum de ses potentialités et le coach nous a permis d’avoir ce travail d’équipe, ce travail cohérent, avec des instants forts pour la préparation physique.
Est-ce qu’à un moment vous avez eu à dire un mot sur les choix du coach ?
Non ! Je n’ai pas eu d’avis à donner. Mon objectif et celui du staff médical, c’est de donner un maximum de joueurs possibles prêts à l’entraîneur pour faire ses choix de titulaire, de remplaçant. L’objectif principal était que les 23 joueurs soient disponibles pour l’entraîneur. Après, il a ses choix tactiques. Notre objectif, avec le staff médical et Gert, c’était de donner le maximum de joueurs possibles à l’entraîneur.
Comment trouvez-vous le joueur camerounais dans la réception du travail auquel vous le soumettez ?
C’est comme tout joueur. Le joueur camerounais est puissant, rapide tout comme le joueur sénégalais qui a les mêmes aptitudes. Maintenant il y a cette capacité à répéter cette puissance et cette rapidité à la 95ème ou à la 120ème minute de jeu. Et c’est à ce niveau que le travail est important. Le joueur camerounais au niveau mental est fort. C’était la caractéristique de ce groupe-là mentalement fort et soudé. Sans cela, on peut mettre tout sur le papier, il n’y aura pas de résultat. Ils ne trichaient pas. Mais, ils rallaient. Mais je préfère un joueur qui ralle et qui fait des exercices que celui qui essaye de biaiser, de tricher dans le groupe. Il y en avait au moins quatre dans le groupe qui rallaient. Mais après il faut toujours expliquer au joueur pourquoi on fait telle chose. Il y a un projet athlétique qui est mis en place avec l’entraîneur, parce qu’il a des objectifs. Le coach a su créer un groupe et à partir de là, les joueurs sont prêts à se faire mal les uns pour les autres et ont peut être capable de les faire gravir des montagnes parce qu’ils le feront. C’est le coach est son adjoint qui ont réussi à inculquer cet esprit. Je n’interviens pas trop à ce niveau-là. Ce sont des choix forts que le coach a fait au niveau des joueurs, pour avoir une cohésion.
Vous êtes en même temps sous contrat avec l’Olympique de Marseille. Quel est votre avenir avec cette équipe ?
Dans mon cas particulier, je suis pigiste. Cela veut dire que lorsque le sélectionneur me convoque, je peux être libéré par mon club. J’ai tout de même un contrat moral avec l’entraîneur. Je suis libéré par l’Olympique de Marseille pour une sélection de mon choix et je l’ai fait ; il est là. Je suis avec le Cameroun.
Vous avez connu le passage dans cette équipe de plusieurs sélectionneurs. Quel aura été pour vous le moment fort ?
J’en ai connu plusieurs. Mais je dois quand même souligner le travail de Volker Finke après la Coupe du Monde 2014, qui a été catastrophique. Il a commencé à faire des choix forts au niveau des joueurs. C’était très important, parce que s’il n’avait pas mis le pied à l’étrier, je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui, on en serait là. Après, il y a Hugo Broos qui est arrivé et a voulu travailler avec moi et ça s’est enchaîné avec ce moment fort qui est la victoire à la Can.
Cette victoire à la Can dit-on est toujours l’arbre qui cache la forêt. Tout s’est-il toujours passé sans difficulté chez vous dans cette équipe ?
Il ne faut pas oublier les moments difficiles, qui sont toujours présents. Il va falloir profiter de ce titre pour faire table-rase sur certaines choses et avancer vraiment pour que l’équipe nationale soit attractive aux joueurs binationaux. Pas qu’après avoir gagné la Can 2017, qu’il n’y ait plus rien par la suite et qu’on soit dans le vide. Et ça demande un travail de fond, qui demande du temps. Il faut s’appuyer sur ce résultat pour faire un travail de fond. On parle des générations 1984, 1988, 2000 et 2002. Nous sommes en 2017 et entretemps qu’est-ce qu’on a fait ? Alors que le Cameroun a un vivier de footballeurs.
Etes-vous resté en contact avec ces joueurs qui ont décliné la convocation pour la Can ?
Nous sommes restés en contact. Mais, je dois dire que chacun est libre de prendre sa décision. Ils ont fait des choix qu’ils estiment être justes par rapport à leurs intérêts. Je respecte leur choix sans faire de polémique là-dessus.
Le prochain challenge, c’est la Coupe des Confédérations. Comment entendez-vous l’aborder ?
Avant la Coupe des Confédérations, il y a le match contre le Maroc et contre une autre équipe, comptant pour les qualifications de la Can 2019. Donc, on a un mois de juin palpitant. Il faut travailler comme si on préparait une Can aussi au mois de juin. Il faut penser déjà à certaines choses.
Avec Le Jour