À cause des pressions qu’ont exercées certains joueurs de l’équipe nationale sur nos envoyés spéciaux présents à Créteil, la rédaction en chef de Camfoot.com a décidé, de façon exceptionnelle, de retirer du site l’article intitulé « Charybde en Scylla », qui introduisait le match contre le Sénégal. Ces pressions se sont faits fortes alors que Gérémi Njitap, devant un parterre d’observateurs, a clairement menacé un des nôtres, geste qui se doit d’être dénoncé dans toute sa plénitude.
Avec seulement 253 minutes de jeu en 8 matches donc 2 en tant que titulaire, il se plaignait d’une métaphore incluse dans ce texte que nous avons publié en date du 7 février.
Cet article faisait état de son manque de temps de jeu, en empruntant à une expression bien de chez nous, stipulant qu’il « ne sait plus quelle est la nouvelle couleur d’un ballon de foot » depuis sa mise à l’écart dans son club, Chelsea.
Nous dénoncions déjà dans notre article intitulé « Communication, Indépendance et Image de marque » du jeudi 23 décembre 2004 cette attitude moyenâgeuse de certains de nos stars. Ceci n’est pas une première. Nous espérons que cela s’arrêtera là.
Nous publions de nouveau cet article dans son intégralité.
Jules Yansa
Directeur Général
Camfoot.com
DE CHARYBDE EN SCYLLA
La phase retour des éliminatoires jumelées Coupe du Monde-CAN 2006 ne s’ouvre pas à Créteil le 9 février contre le Sénégal mais plutôt le 27 mars à Yaoundé contre le Soudan. Le rendez-vous de mercredi prochain est un match amical, même s’il oppose les Lions indomptables aux Lions de la Teranga. Toutefois, il a un autre enjeu de taille. Ce sera le baptême de feu d’Artur Jorge à la tête des Lions indomptables. Que faut-il en attendre?
Les Camerounais attendent de voir une équipe conquérante. Dans leurs beaux jours les Lions indomptables savent séduire. Ils déploient un football chatoyant, harmonieux, ponctué de beaux gestes techniques. Après une entrée en matière fébrile pendant laquelle ils commettent souvent de graves erreurs, ils haussent souvent le ton en s’engouffrant dans les défenses adverses par des raids fulgurants. C’est ce football alléchant qu’ils nous ont montré lors du Cameroun-Brésil de la Coupe des Confédérations 2003 en France ou à l’occasion du Cameroun-Argentine de Genève.
Les Lions indomptables avaient remporté le premier sur le score de 1 but à 0 grâce à une prouesse personnelle de Samuel Eto’o. C’est ce Samuel Eto’o que nous souhaitons voir mercredi soir : combatif, audacieux, percutant et explosif. Le deuxième s’était soldé par un match nul, 2 buts partout. Encore une fois, Samuel Eto’o avait marqué un superbe but, en reprenant de la tête un coup franc banane millimétré de Geremi. C’est ce Geremi que nous espérons retrouver à Créteil le 9 février.
Le milieu camerounais avait été tout feu tout flamme pendant la Coupe des Confédérations, gagnant quasiment tous les duels contre les Brésiliens, les Turcs et les Colombiens, voire contre les Français en finale. Mbami était impérial, de même que feu Marc Vivien Foe, Geremi, Idrissou et Eric Djemba-Djemba. L’entre-jeu des Lions indomptables a été d’une médiocrité affligeante ces dernières temps. Or, le football moderne se joue précisément au milieu de terrain. Nous attendons de voir comment Artur Jorge, Raul Aguas et Jules Nyongha vont redynamiser ce milieu de terrain qui comprendra beaucoup de joueurs nouveaux dont les deux Achille : Webo et Emana.
Nous attendons aussi de voir l’allure qu’affichera notre défense. Le spectre de Leipzig n’a pas totalement disparu. Le drame est que l’alarme aurait dû sonner plus tôt. Contre l’Egypte au match aller, la défense était une passoire. Au Soudan, à l’image de l’action qui a amené le but soudanais à Omdurman, Perrier-Doumbe était tout le temps à la traîne par rapport à son vis-à vis. Rigobert Song Bahanag a perdu l’acuité, la rigueur et de la rapidité qui, conjuguées à son charisme naturel, constituaient la marque consacrée de son football. C’est le Song Bahanag du Cameroun-Chili de 1998 ou à la limite de Cameroun-Côte d’Ivoire (2-0) de juillet 2004, que nous souhaitons revoir mercredi soir à Créteil. Nous nous attendons à découvrir une ligne défensive inédite avec la résurrection d’Olembé, l’arrivée de Jerry Tchuisse, dont on se souvient qu’il avait failli endosser le maillot russe. Si cette défense tient en échec El Hadj Diouf, Fadiga, ou tout autre Lion de la Teranga, Artur Jorge aura posé les jalons d’une reconstruction que nous appelons de tous nos vœux.
Autant le dire. C’est à un miracle que s’attendent les Camerounais. Nous espérons par devers nous que des garçons émoussés à qui nous avons souhaité une retraite active de l’équipe nationale se transforment en sorciers du ballon rond après avoir bu l’élixir concocté par le moustachu portugais. Moi j’ai cessé de croire au miracle quand l’Allemagne nous a sortis de la Coupe du monde 2002.
A notre avis, pour Artur Jorge, ce match est un round d’observation. Avec des joueurs expérimentés mais non nécessairement compétitifs il testera son système de jeu. Il supervisera tous les joueurs camerounais qu’il a pu mentionner sur sa liste et il prendra une décision. Je parie que les joueurs seront gonflés à bloc et prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes pour mériter une place de titulaire dans cette formation. Au cas contraire, Artur Jorge trouvera toutes indiquées les raisons d’exclure du groupe nos héros d’antan. Sans gloire. Ils ne diront pas que la Rédaction de Camfoot.com ne les a pas avertis. Nous l’avons fait au lendemain du naufrage collectif de Leipzig.
Ce que nous écrivions à l’époque, sous le choc, demeure valable aujourd’hui. Winnie Schäfer est parti, Etame Massoma aussi mais Geremi, Perrier Doumbe, Idrissou, Djemba Djemba, Mettomo, Job sont tombés de Charybde en Scylla. Le premier ne sait plus quelle est la nouvelle couleur d’un ballon de foot. Pour avoir refusé de jouer en CFA, le deuxième cherche toujours un club tout en espérant retrouver une place de titulaire, le troisième vient tout juste d’en retrouver un mais il ne joue pas davantage, de même que le quatrième. Les deux autres jouent des bouts de match, avec un bonheur inégal.
Pendant ce match, nous verrons aussi ce que recouvrent les fonctions d’animateur psychologique dévolues à Yannick Noah et de quel apport il sera pour les Lions indomptables. Ce poste est une innovation de Mbarga Mboa. Il est à espérer qu’il sera de bon augure pour l’équipe phare du Cameroun.
Mercredi, ce sera aussi l’occasion pour Kameni de sortir les parades dont il gratifie les spectateurs espagnols chaque week-end à la Liga. Il aura en face de lui un autre miraculé qui a retrouvé la joie de bondir : Toni Sylva. L’un des deux sera encore sacré meilleur gardien africain de l’année à Johannesburg dans deux semaines. Nous attendons également de voir si le Sénégal a de beaux restes. Bruno Metsu s’en est allé avec Daba faire fortune sous d’autres cieux et Fadiga n’a plus le cœur de ses 20 ans. La crinière de Ferdinand Coly a pris un coup de vieux et Omar Daf est devenu tout gentil. Papa Diop, il est vrai, fait trembler les filets Outre-Manche mais Olembe est ressuscité des morts.
Sur un plan plus personnel, si le milieu camerounais tourne bien, que Samuel Eto’o fait trembler les filets sénégalais deux fois, que la défense muselle El hadj Diouf, que Kameni sort le grand jeu, et qu’Artur Jorge renvoie Song et Geremi se reposer sur le banc de touche pendant quelques minutes, ce match aura tenu toutes ses promesses. Si les Lions indomptables l’emportent mercredi soir, même par 1 à 0, ce sera alors le gâteau sur la cerise, pourvu que ce ne soit pas pendant les arrêts de jeu.
Sanga Titi, sanga@camfoot.com