En refusant d’appliquer à la lettre la sentence du Tribunal Arbitral du Sport (TAS) et les prescriptions gouvernementales, le président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot) qui a connu peu de réussites tout au long de sa carrière, a entamé une bataille aux conséquences insoupçonnables. De Seidou Mbombo Njoya (59 ans), le président de la Fecafoot, l’on sait surtout qu’il est un homme du sérail. Homme au pedigree académique discutable, il aurait eu plusieurs opportunités que lui a offert sa naissance, en tant que fils d’un ancien ministre très influent de la République, puis Sultan du Royaume des Bamoun.
Mais la réussite n’a pas souvent été au rendez-vous comme l’attestent ses passages à la defunte Loterie nationale du Cameroun, à Royal Football School du Noun, ou au Bureau régional FIFA.
Plusieurs théories sont aussi évoquées pour expliquer son élection à la tête du football camerounais. On parle du rôle quasi-crucial qu’ont joué Samuel Eto’o et le richissime Gilbert Kadji, sans compter celui qui dirigeait les opérations en tant que Président du Comité de Normalisation, Dieudonné Happi. À la recherche d’un homme lisse et froid, il a réussi à se faire coopter, comme ce fut le cas en 2013 après la mise en arrestation de Mohammed Iya. On parle aussi de pses soutiens dans le cercle gouvernemental des ministres Ibrahim Talba Malam et Joseph Lé.
Intronisé sans véritablement aucun mal à la présidence de la Fecafoot, son obstination envers le vieux Général Pierre Semengué rappelle à tous que si la vengeance est un plat qui se mange habituellement froid, l’impatience peut s’avérer coupable, et c’est peut-être ce qui le perdra si on s’en tient à la brutalité avec laquelle il souhaite chasser son contradicteur de son poste.
C’est le 29 septembre dernier que Mbombo Njoya va comprendre que le gouvernement a décidé de s’aligner du côté du vieux Général lorsqu’après le Conseil de cabinet, le ministre Secrétaire des services du Premier ministre Séraphin Fouda a, après le ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République Ferdinand Ngoh Ngoh, affiché les prescriptions gouvernementales qui demandent une application « immédiate et scrupuleuse » de la sentence du Tas.
Présence inopportune de la Fecafoot
Nonobstant la sentence du TAS, Seidou Mbombo Njoya a décidé de gérer elle-même la Ligue, en nommant un Sécretaire Général qui est en fait celui qui gère l’institution. L’heureux élu n’est d’autre que Paul Mebizo’o, le chef de département des compétitions de la Fecafoot. Et pour marquer le coup et afficher ouvertement le différend par rapport à l’État, le 2 octobre 2020, il s’est fait remarquer par son absence au Minsep, lors de la cérémonie d’installation des membres du Comité de suivi de la sentence du Tas.
Lors de son élection à la tête de la Fecafoot, il avait, à travers sa profession de foi, promis de s’investir à fond avec son Comité exécutif pour développer le « sport roi » au Cameroun dès la base. Cela fait près deux ans. Le football jeunes, le football féminin et amateur sont toujours aussi moribonds. Pour se donner raison, il a, au nom de la Fécafoot, intenté ou s’est défendu de nombreux procès pour la plupart perdus, effectué une multitude de missions à l’étranger.
Faillite de la défunte Loterie nationale
L’empire dont le « prince du Noun » a hérité se concentre désormais sur l’affaire pendante au TAS qui oppose la Fecafoot à l’Association des clubs amateurs du Cameroun, cette dernière ne demandant pas moins que l’annulation de l’élection qui a conduit Seidou Mbombo Njoya à la tête de l’instance faitière du football camerounais. De son propre avis, la Fecafoot a dépensé ces cinq dernières années à peu près 930 millions de F CFA dans les batailles judiciaires.
Avec des procès hors de prix, les versements d’honoraires disproportionnés, l’on comprend mieux pourquoi l’on a atteint près du milliard dépensé. Au Cameroun où les footballeurs dits « professionnels » ont un salaire mensuel (versé par l’Etat) de 100 000 FCFA pour les joueurs de Ligue 1 et 50 000 F CFA pour les athlètes de Ligue 2, il est clairement établi qu’au pays de Paul Biya l’argent du football n’est pas fait pour servir les footballeurs. Dans une fédération, où un poison, celui précisément de la médiocrité, s’est érigé en valeur, il y a lieu de s’inquiéter.
Le fils du sultan des Bamoun devrait méditer cette pensée de Nietzsche : « l’Etat est le plus froid de tous les monstres froids ». D’ailleurs le Tribunal Criminel Spécial a encore de très beau jours devant lui.
Abani Ekoulé, Correspondance Particulière