L’hégémonie du football égyptien qui s’est accentuée avec la dernière champions league africaine remportée par Al Ahly, commande un recul pour sonder les secrets de cette quatrième pyramide, et déchiffrer les hiéroglyphes d’une domination qui condamne désormais le Cameroun au rôle de dauphin.
Le bon sens veut qu’on se départe pour une fois d’un quant-à-soi nourri par des postulats éculés : “le Cameroun c’est le Cameroun, impossible n’est pas camerounais”. Reconnaissons que l’Egypte a placé la barre très haut; il faudra non seulement être sourcilleux sur des « détails », mais, pour reprendre Alain Ouombléon, être « parfait ».
Etre « parfait » ne concerne pas seulement le volet technico- tactique, mais tout l’environnement qui forge le mental de gagneur. La double confrontation Al Ahly/Coton Sport aura donné à voir le fossé étanche qui existe entre une équipe qui a un objectif bien déterminé et qui met tout en œuvre pour l’atteindre, et une autre qui malgré ses qualités semble être surprise de disputer une finale.
Les défaites contre l’Egypte se suivent et se ressemblent à quelque détail près. Elles ont au moins un dénominateur commun : l’ignorance crasse de l’adversaire. Or, depuis l’épopée des lions en 1990, et bien avant, l’Egypte a fait du Cameroun un rival à battre, en témoignent les différents matchs d’anthologie livrés par les Lions que la chaîne Nile sport repasse chaque année. Cet intérêt en plus des matchs amicaux livrés contre le Cameroun ont donné à l’Egypte un ascendant psychologique qui semble être le socle sur lequel repose ses dernières victoires sur le Cameroun.
Reconnaître qu’une équipe est sa bête noire est bien, mais s’atteler à ne pas tomber dans ses filets est encore mieux. Si les différents voyages en Egypte étaient archivés, on saurait que le Sheraton Héliopolis est le même hôtel où les Lions sont descendus en 2005 lors de leur match éliminatoire Can/Coupe du monde 2006; et le stade de Madinet Nasr appartenant à Al Ahly fut réquisitionné pour les entraînements. Le même hôtel et le même stade ont été mis à la disposition de Coton Sport. Les égyptiens ne font rien pour rien. Coton Sport n’avait donc pas à fuir les stratagèmes d’Al Ahly pour remettre ses rênes entre les mains d’un égyptien, un certain Fayed, qui avec la complicité de certains membres influents de Coton Sport est allé cantonner l’équipe à Ismailiya à 48 heures de la finale. Changer d’hôtel et de terrain d’entraînement, tout en restant au Caire, aurait suffit pour gagner une première bataille psychologique. D’ailleurs Al Ahly a donné un bel exemple de professionnalisme en déléguant un émissaire tâter le terrain et aplanir tout obstacle avant son arrivée à Garoua.
On peut, à la louche gloser sur l’arbitrage. Mais, ce qu’il est bon de savoir c’est que l’algérien Heimoudi et le béninois Kofi Kodja sont de ces arbitres « porte-bonheur » à l’Egypte. Avec eux, l’Egypte gagne toujours. Pourquoi le marocain Abdel Rahim Arjoun (il a arbitré le match Cameroun/Ghana à la Can 2008) est voué aux gémonies et ne pourra plus à jamais fouler le sol égyptien ? Mustafa Fahmy, « l’homme qui dirige véritablement la maison Caf » détient la réponse. Il lui est souvent reproché de ne pas « suffisamment défendre les intérêts de l’Egypte à la Caf « . En exultant de joie à l’égalisation d’Al Ahly à Garoua, il voulait sans doute se racheter aux yeux de ses pairs.
L’Egypte avec ses allures d’ogre, est partie pour trôner au sommet du football africain pour longtemps. Les bases sont saines et les dirigeants ont tu les querelles intestines pour l’intérêt national. Des noms tels que Hassan Saqr, Samir Zâhir, ne disent rien au camerounais. Pourtant le premier est le ministre des sports et le second le président de la fédération. Contrairement aux nôtres qui brillent par les pantalonnades à qui mieux mieux, ceux-ci sont tapis dans l’ombre et dirigent le football avec maestria, allant même jusqu’à donner des coudées franches à Hassan Chéhata pour des résultats que nous connaissons.
Il y a six ans, il suffisait de dire qu’on est camerounais pour être invité à s’attabler dans un café pour prendre une tasse de thé et écouter l’égyptien conter les exploits des lions depuis 1982, il suffisait de dire qu’on est un parent de Milla ou Bell pour écourter une longue formalité dans l’administration paperassière, aujourd’hui, on n’a plus droit qu’à la raillerie caustique. Mais on reste tout de même camerounais. On va faire comment ?
Moustapha Nsangou, au Caire