Rendez-moi fou, Samuel, tuez-moi seulement, c’est trop ! Vous êtes tout, vous remplacez le beurre (et sans doute les maris absents à l’occasion), vous êtes le sel de la terre, vous êtes le cadeau que le ciel a bien voulu donner au Cameroun, à l’Afrique, à New-Bell Babylone, au monde entier. Je dis ça, mais en fait, je n’en pense rien, vraiment.
Pour tout vous dire, Samuel, vous êtes sans doute la plus grande vedette du foot qui ne me fait ni chaud ni froid. En fait, autant que je me souvienne, le crédit que je vous donnerai toujours, c’est de m’avoir inspiré l’un de mes meilleurs mots de scribe sportif. Vous vous rappelez peut-être aussi : j’avais dit que vous étiez un véritable poète et que, comme tout poète, vous aviez tendance à poéter plus haut que votre luth.
C’était joliment balancé et, de surcroît, très vrai. Je suis tout aussi extraordinaire à tourner une phrase que vous à pousser un ballon. Je suis aussi né à Nkongmondo, à deux pas de New-Bell. Mais là s’arrêtent les similitudes. Nous n’avons vraiment pas les mêmes lectures. Vous êtes un intolérable peigne-cul, un ruffian dans l’âme, un être primaire que ni la gloire ni la fortune ne réussiront jamais à dégrossir. Et c’est vous, Samuel, qui pensez avoir le loisir de décider qui doit exister sur cette terre ?
Vous avez ce droit parce que, dites-vous, vous avez tout gagné sauf la Coupe du monde. Que vous faites avancer le Cameroun, que vous faites rayonner le Cameroun, bref, que vous travaillez pour le Cameroun. Et puis, quoi encore ? Croire cela est une idiotie, bien sûr, d’abord parce que le Cameroun ne vous en demande pas tant, mais surtout parce que vous ne travaillez que pour vous. Le Cameroun vous demande, comme il demande au moindre de ses enfants, nous pauvres écrivaillons compris, de travailler dur, d’aimer sa femme et de faire vivre sa famille et, accessoirement, de bien se comporter pour l’honneur du pays.
Tout ce que vous avez gagné, vous l’avez gagné pour vous et grâce à votre travail. C’est le seul mérite que vous avez. Vous ne travaillez pour personne d’autre. Vous vivez comme un blanc, vous trombinez des poufiasses sur tous les matelas, vous culbutez des roulures émerveillées par vos montres en or, vous êtes invité aux meilleures tables, votre opinion et votre présence sont recherchées. Soyez donc heureux, c’est le tribut qui est payé à votre notoriété et à votre talent. Vous l’avez mérité. Mais c’est tout.
Là où vous avez tout faux, c’est lorsque vous vous toquez de croire que les Lions indomptables sont votre chose et que le reste du Cameroun doit se prosterner devant vous. L’équipe du Cameroun, contrairement à ce que vous fait croire la Fécafoot qui bave face aux miettes qui tombent de votre poche, ne vous appartient pas. Si vous approchez de cette équipe et acceptez d’en faire partie, nous allons vous poser toutes les questions que nous voulons et critiquer le moindre de vos gestes. Si vous vous rebiffez, allez-vous-en. On vous pleurera comme on a pleuré Mboma, Milla, Nkono, Bell. Rien de plus.
Parce que, malheureusement, votre très grand talent n’a jamais déteint sur l’équipe toute entière. Vous avez failli en tant que capitaine et principale vedette de cette équipe parce que vous n’avez ni donné l’exemple d’un meneur juste et au-dessus des intrigues et des luttes d’influence, ni élevé le niveau de jeu de vos coéquipiers moins doués. Au lieu d’amener les autres à se bonifier, vous vous êtes employé à contrecarrer toute velléité de contestation de votre leadership dont le principal socle est l’argent. Vous êtes le capitaine des Lions et, c’est dur à croire, vous êtes le principal responsable, aux yeux de beaucoup de Camerounais, de la mauvaise atmosphère dans le vestiaire des Lions. Cela devrait, à défaut de vous faire taire parfois, émousser votre ego ridicule et vous amener à prendre conscience du fait, irréfutable au demeurant, que votre morgue et vos réflexes d’enfant attardé de New Bell Babylone sont en train de défriser votre blason.
Leonidas Ndogkoti