Léonidas Ndogkoti dans une brillante chronique du 15 août 2011 intitulée Pierre Semengue, l’assaut permanent et publiée sur le site cammfoot.com conseillait déjà vivement au général d’armée appelé à la tête de la ligue de football professionnel du Cameroun de ne pas y aller. Non seulement il n’a pas suivi le conseil, plus grave, il y est allé à la Christophe Colomb qui, quand il partait ne savait pas où il allait et quand il arrivait ne savait pas où il était. Conséquence, il allume des feux et ignore que ceux-ci le perdront.Plus que jamais, il est une incongruité dans cette dynamique qui ne relève plus de ses repères.
Que ne prend-il pas enfin sa retraite pour s’épargner les tracasseries sans cesse trépidantes des exigences de la gestion au quotidien du football? Ou tout simplement, pour goûter aux vrais délices de la vie que sont, le farniente et l’insouciance? A l’âge où l’on approche (si on ne l’a pas déjà fait) la quatre-vingtaine, il y a, sauf à être un insatiable invétéré, des engagements qu’on ne devrait plus prendre et des responsabilités qu’on se doit de ne plus assumer. Car l’avenir, on ne l’a plus devant soi mais derrière soi. Et suprême bonheur dans nos pays à l’espérance de vie si étriquée, cette tranche d’âge quand on la tutoie, constitue des exceptions de longévité beaucoup plus utiles à la descendance qu’aux affaires. Alors, autant en profiter sans faire de quartier.
Savoir partir…
Au lieu de quoi, l’ex général Semengue, plus haut gradé de l’armée camerounaise entend lui, jouer la partition contraire de ce qui pour le commun des mortels, semble être les prescriptions immuables de l’horloge de la vie. Le vieux ne veut pas lâcher prise. Non seulement il ne le veut pas, il ne l’entend même pas. Pour excuse croit-on savoir, cette lubie du football (je dis bien lubie et non passion) qui l’habite depuis ses années d’activités et l’a conduit, persévérance plus son statut aidant, à présider pour quelques temps aux destinées d’un club populaire de la capitale. Enivrante activité dont on peut aussi supposer qu’elle permet de mettre du beurre dans ses épinards.
Ceux qui, advenu cet âge là entendent être utiles au Cameroun, ceci au regard de leur glorieux parcours, prennent soit la route des exploitations agricoles qu’ils ont eu le temps leur vie durant de créer, soit celle, plus discrète et louable de la fondation d’œuvres à l’amélioration des conditions de vie de leurs semblables plus fragilisés. On ne les voit plus s’échiner à régenter, délivrer d’invraisemblables oukases ou se mettre à dos une arrière génération dont la vision du monde ne recoupe plus des vérités à la ringardise établie.
Pierre Semengue, président de la ligue de football professionnel du Cameroun, quelle promotion de l’inertie et quelle hérésie! Franchement, avait-on manqué de personnalité ressource sérieuse pour devoir se rabattre comme par signe de récompense dont on ne sait quoi, sur un tel monsieur dont les états de service à la défunte Linafoote (ligue nationale de football d’élite) de triste mémoire, ne plaidaient aucunement en sa faveur. Quitte à s’offrir des vieillards, il y avait dans la réserve et concernant le monde du football local, de prestigieux noms qui, tout en se la coulant douce quelque part, ont donné du leur, saigné financièrement et écrit la gloire du football camerounais. En me perdant dans mes souvenirs, j’entrevois les Koungou Edima, Ngassa Happy, Mbous Paul Morand, Ndonga Aléga, Nzoundja, Philippe Mbarga Mboa et j’en oublie de bien nombreux assurément.
Peut-être est-ce parce que l’Etat pour accompagner la mise en place du football professionnel a consenti un effort financier important, qu’il fallait pour encadrer et protéger cet argent, recourir à un ex homme de poigne? Cela se peut mais reste après tout, une belle illusion. Il n’y a nulle part au monde, un professionnalisme de subvention.
…et oublier les ronds de cuir
A l’allure où la ligue de football professionnel du Cameroun entend fonctionner et selon les desiderata de M. Semengue, il ne fait plus guère de doute qu’on n’est pas loin de voir se mettre en place, une sinécure taillée sur mesure où, à force d’arguties, on aura eu la peau de tous les potentiels adversaires ou contradicteurs avisés et réussi le tour de force d’imposer les siens après avoir liquidé sous le fallacieux prétexte de l’incompétence, de sémillants jeunes cadres choisis avec minutie. Le fils sans qu’on sache trop comment n’est-il pas déjà dans la maison?
La sortie de M. Semengue du 18 mai dernier, qui dans un communiqué aussi inopportun que maladroit, dénie toute existence à une quelconque association autre que sa ligue à avoir vocation à représenter les clubs dits professionnels, traduit à suffisance, l’inutile bellicisme qu’il veut engager à un moment où les véritables préoccupations sont: le respect des engagements pris par l’Etat et la réussite coûte que vaille du défi du professionnalisme relevé par les clubs. La ligue de football professionnel concerne au premier chef les clubs, et toute action visant à les fragiliser, émanant de surcroît de la tête même de la ligue, constitue une bizarrerie et pour être clair, un dirigisme passé de mode. Les associations se créent comme elles veulent et l’entendent librement. Elles ne se diluent point par déduction ou ordre dans une autre existante, qui se réserve le droit de les représenter. La ligue a fort à faire que de se perdre dans des querelles byzantines où on veut l’enfermer. Au lieu de mendier une subvention des pouvoirs publics pour se faire entretenir, elle songerait mieux à développer et rechercher ses propres ressources. Le football est un spectacle qui se vend et en tant que tel, un champ immense ouvert aux annonceurs. Lesquels ne demandent plus aujourd’hui qu’ à assurer leur visibilité auprès du public.
Courage donc M. Semengue. Si vous avez encore de la force, profitez de votre nom et jetez-vous sur le terrain pour rameuter à votre responsabilité, le maximum d’annonceurs à même de soutenir par leurs débours, ce qui semble être votre ligue et votre raison de vivre. Au moins aurez vous essayé de rendre service à une association qui s’est trompée de bonne foi sur la qualité de celui qui pouvait conduire ses destinées.Car que vous le vouliez ou non, la donne et les contraintes du vrai professionnalisme, auxquelles vous ne pouvez plus vous adapter, auront tôt fait de vous renvoyer aux oubliettes du volontarisme puéril. Juste velléitaire, inefficace et improductif.