Personne ne battra M. Semengue à quoi que ce soit au Cameroun. Soit. Mais cela veut-il dire que personne ne peut se mesurer à lui avec la détermination et la hargne voulues pour le faire trembler et douter ? La situation actuelle, s’agissant de la direction de notre Ligue de football professionnel, me semble pourtant propice à la candidature d’une personnalité jouissant du crédit de la jeunesse et de l’expérience.
Battu d’avance, victime expiatoire en quelque sorte face aux obus de l’ancien élève de l’École d’application de l’artillerie de campagne de Châlons-sur-Marne, le moindre « opposant » au général acquiert le statut enviable de personne n’ayant rien à perdre. Donc de personne ayant tout à gagner.
M. Happi, il me semble, serait un challenger tout à fait crédible, pour peu qu’il montre qu’il veut vraiment. Il a pour lui une jeunesse relative, une expérience reconnue et un amour du football qui n’est pas né d’hier. Mais voilà, il y a comme un petit malaise qui persiste, un peu parce que M. Happi donne souvent l’impression d’avoir un pied dedans et un pied dehors. On dirait que s’il avait l’occasion de porter l’estocade finale au général, il hésiterait, tétanisé peut-être par l’âge et l’aura de l’ancien compagnon de Max Briand, le « viking » des ZOPAC de l’Ouest et de la Sanaga-Maritime.
Il n’existe pourtant aucune règle qui interdit de taper sur un vieux qui cherche la bagarre. Certes, M. Semengue reste, parmi les princes de la République, un homme tout à fait fréquentable qui n’a jamais suscité le dégoût que beaucoup, moins exposés que lui, ont suscité. Mais la présidence de la LFPC n’est pas un concours de popularité, et l’élection à ce poste n’est pas un combat à fleuret moucheté. On ne battra jamais le général la fleur au fusil.
M. Happi doit quand même le savoir. Et il doit savoir que M. Semengue, même s’il s’en défend, surfe largement sur la rumeur qu’il est l’homme du gouvernement, qu’il est le seul à faire donner Etoudi en cas de coup dur, qu’il sait comment amener le gouvernement camerounais à subventionner à coups de milliards une activité privée comme la pratique du football. C’est là le socle du programme du général. Et ce socle est en stuc et non en acier trempé. On peut le démolir. M. Happi aurait donc intérêt à attaquer, sabre au clair.
M. Semengue a toujours la force de tenir un MAS 36 entre ses mains, il n’y a aucun doute à cet égard. Mais il n’a pas compris que son rôle était justement de sortir l’État du financement du foot en trouvant des sponsors privés et, surtout, en amenant les investisseurs, qui profitent du football, à financer eux-mêmes cette activité. C’est un constat désolant. Peut-être bien, en fait, que le peu d’enthousiasme dont M. Happi fait preuve au front, lui qui adore rouler les mécaniques sur les plateaux de télé, s’explique par le fait qu’il ne comprend pas non plus ce qu’on attend du président de la LFPC.
Léon Gwod