Sur le palimpseste de la gestion de l’activité physique comme politique publique au Cameroun, dont je me suis donné la garde, je note l’arrivée d’un quatrième ministre depuis 2004. J’efface M. Zoah sans écraser la moindre larme et bien content de ne pas accorder d’oraison funèbre à un personnage transparent qui n’a jamais su quoi faire du formidable levier social que peut être l’activité physique. Je pourrais pourtant dire tout le mal que je pense de lui, mais on ne tire pas sur une ambulance.
M. Adoum Garoua, le nouveau MINSEP, semble avoir été tiré par mégarde de sa relative tranquillité au ministère de la Jeunesse et, sur la foi de ses premières heures au poste, il semble prématuré de prédire un embellissement généralisé.
Il faut reconnaître néanmoins que notre nouveau ministre n’est pas totalement nu. Il arrive avec quelques atouts, dont le moindre n’est pas le nom qu’il porte. Par ailleurs, largement recalé à l’oral de septembre, il n’est pas entré au comité central du parti. Cela peut ne pas être totalement rédhibitoire, surtout que, contrairement à certains de ses prédécesseurs, M. Garoua n’est pas professeur des lycées et collèges et aurait plutôt, d’après la rumeur, joué au volleyball et sauté en hauteur à un niveau respectable. Cela est prometteur.
Nous avons un nouveau MINSEP tous les dix-huit mois en moyenne depuis 2004. Ces changements, nous sommes maintenant forcés de le reconnaître, n’ont rien à voir avec les performances des divers ministres par rapport à la conduite de la politique publique concernant l’activité physique au Cameroun. Tous sont intervenus à la suite d’évolutions plus ou moins interlopes et mafieuses sur le front du football.
Cela est déplorable.
Et cela est d’autant plus inquiétant que M. Garoua, à peine à son poste, se précipite dans de vulgaires affaires de football, encouragé par un premier ministre qui n’a rien de plus urgent à faire qu’à régler des différends entre footballeurs professionnels et responsables de l’organisation du football au Cameroun. M. Garoua, comme tous les autres avant lui, doit croire qu’il est le ministre du football.
Cela ne peut pas continuer, et il convient de rappeler au MINSEP les deux ou trois vérités capitales que nous n’avons jamais cessé d’asséner aux autres personnages plus ou moins lamentables qui l’ont précédé. Un ministre de la République n’a pour rôle que d’appliquer la politique publique concernant l’activité de son département. Dans le cas de notre ministère, il s’agit pour le ministre de veiller à ce que tous les Camerounais aient une chance égale d’accès à l’activité physique et au sport, en d’autres termes de créer ce qu’il est convenu d’appeler le level playing field. C’est
tout.
M. Garoua va être viré. C’est inéluctable. Il serait bon, pour une fois, qu’on se souvienne d’un ex-MINSEP non pas pour une affaire plus ou moins claire concernant le football, mais plutôt comme un personnage ayant laissé une empreinte durable en matière d’activité physique au Cameroun. Alors, Monsieur le Ministre, nous vous rappelons que le football professionnel, le football organisé, ne vous concerne pas. Ou si peu. Ce football-là est une activité privée qui doit être laissée aux soins du
privé.