Honni par le gotha du football national pour une absence criarde de références conséquentes, moqué par les journalistes pour son statut flou à la tête de la sélection nationale et bien plus, pour cette espèce de satisfaction guillerette qu’il semble tirer de sa place inattendue auprès des Lions indomptables, Denis Lavagne imperturbablement creuse son trou. Ses succès même en demi teinte commencent à lui donner une certaine épaisseur.
Pour sa première sortie au stade Ahmadou Ahidjo avec les Lions Indomptables, il ne fallait surtout pas se louper. L’enjeu étant l’épreuve stressante des jalons qualificatifs à la coupe du monde 2014 au Brésil. Pour le malheur de ses détracteurs, ce veinard de Denis Lavagne une fois de plus a pu tirer son épingle du jeu. Sans liant ni panache, la sélection qu’il a mise sur pied, orpheline de nombre de ses cadors, a triomphé aussi simplement que ça d’une république démocratique du Congo très peu inspirée dans son jeu. 1 but à zéro pas du tout rassurant mais suffisant pour avancer. Et pour les statistiques, seule vérité de l’analyse, cela fait 5 sorties pour 5 victoires à mettre au palmarès de cet « indésirable coach ». La méthode et la manière restant après tout, des chichis d’après match pour commentaires de bistrots et d’arrière-cours.
Jeu d’ombre et illusion
Sacré bonhomme que ce Denis Lavagne. Qui en a entendu en peu de temps de belles sur son compte et vu des vertes et des pas mûres auprès de cette problématique équipe nationale que peuvent être les Lions Indomptables. Baptisé au feu d’une revendication intempestive de primes suivie d’un boycott inapproprié du match amical Cameroun-Algérie pour ses premiers pas avec la sélection nationale, il avait su dans la tourmente de ces événements, cultiver la discrétion de ceux qui n’ont pas voix au chapitre. Et il faut dire qu’une prise de position tranchée de sa part en ces douloureux moments là, sensée ou pas, aurait déclenché les foudres de tous ceux-là qui n’attendaient qu’un moindre prétexte pour lui fondre dessus et lui demander de quoi au juste il se mêle. Lui, le protégé de l’autre honni qu’est Iya Mohamed (président de la fécafoot) et dont l’entregent a réussi à l’imposer contre toute attente à la tête de l’équipe nationale de football. Mal choisi, Denis Lavagne l’est assurément. Et c’est bien cela qui pose problème. Pour tout aggraver encore, il flotte sur sa tronche, un air peu rassurant de banalité. Sa faute confessons-le, c’est d’avoir été un banal entraîneur de club local et un expatrié sans réelle consistance fleurant bon la petite indigence. Tout cela, ne pardonne pas.
Mais au fait et en sachant raison garder, qui a-t-on déjà bien choisi pour entraîner les Lions Indomptables? Entre bosseurs au long cours et quelques pigistes pour compétitions précises, l’histoire de notre sélection nationale de football est jalonnée de taches répugnantes de recours incessants à des mercenaires. N’ayant jamais intégré la formation et la prévision dans la politique globale de gestion de notre football, on ne devrait plus s’étonner que l’illusion soit le principe de choix de nos entraîneurs. Ainsi, reste bon coach au Cameroun, celui qui entretient sur la durée, l’illusion de la performance et des victoires.Cela est si vrai qu’on comprend mieux aujourd’hui, la partie de poker menteur à laquelle se livre le Minsep et son entraîneur par défaut, relativement au contrat sensé les engager et pour lequel on s’efforce à entretenir par tous les moyens le silence. Sans être devin, il ne fait pas de doute que derrière cette entente qui épouse les contours du provisoire, l’une des parties se réserve la latitude sans risque quelconque de la rupture à tout moment et l’autre, l’opportunité rare de conduire à moindre frais une sélection de renom avec en espoir, des sursauts de réveil et au bout du compte, une reconnaissance internationale qui établira et lancera sa carrière.
Valeri Nepomniachi, Claude Leroy, Pierre Lechantre sont avant leur heure de gloire avec le Cameroun, d’illustres quidams dont on pouvait à peine tolérer la moindre prise de position. Les victoires s’enfilant au palmarès de Denis Lavagne, il ose de plus en plus des propos. Il serait malvenu de croire qu’il restera longtemps encore, le défouloir de ces illuminés qui s’enroulent du drapeau camerounais pour hurler à tout va leur mépris et appeler urbi et orbi à son départ.De toutes les façons, c’est toujours avec des veinards de cette trempe que le Cameroun a tutoyé les cimes du football mondial et engrangé de nombreux trophées. Cela ne relève d’aucune logique nous le confessons. Mais au moins d’une permanence qui a semblé nous réussir. Alors bouclons-la et laissons à ce volontaire téméraire plein de bonne fortune, le bénéfice du courage.
Par Edgar Zacharie YONKEU