Je vous assure, j’étais le premier à avoir les maux de tête, quand j’ai appris que c’est à Garoua, que les Lions Indomptables du Cameroun devaient accueillir les Simbas du Congo. J’ai pensé à tous ces morts de choléra, que la presse chaque jour entasse dans ses colonnes, j’ai rougi de colère et pleuré !
Je pleurais le sort de ces malades qui n’ont la possibilité qu’une fois tous les trois ans de voir les Lions et qui cloués dans leur lit d’hôpital, ne pourraient vivre un tel évènement unique. J’ai pensé à tous ces sudistes qui voyaient le Choléra comme la Catastrophe du Nord et qui du coup pour l’amour des Lions, seront bien obligés d’aller côtoyer ce choléra lointain( ?). Et puis plongé dans cette angoisse, il y en a qui m’ont dit : « Il ya aussi le Choléra à Douala et à Yaoundé, donc partout on est en danger ! ». Et puis ironiquement je me suis dit : « ok ! Le Choléra se rencontre à Garoua le 9 octobre prochain ».
Dans ce soliloque je vous assure, une seule préoccupation me traversait l’esprit, comment faire la fête en ayant peur d’attraper une maladie qui a décidé de s’inviter au rendez-vous ? J’étais furieux de savoir que ce match ne se jouerait pas à Yaoundé, qui est loin d’être une « ville saine », mais qui est quand même moins exposée et plus « contrôlable » que Garoua. Une fois de plus plongé dans cette réflexion intime, on est venu me dire que la rencontre est délocalisée pour deux raisons principales, dont une officielle et une autre officieuse. On m’a dit que les travaux de réaménagement du Stade Ahmadou Ahidjo dans la perspective de la finale de la Coupe du Cameroun avait commencé, donc impossible en fait de perturber les « travailleurs ». Je me suis encore plus énervé, ne comprenant pas qu’un stade qui est normalement entretenu au quotidien, avec un Directeur et des agents payés pour cela, ait besoin d’une longue fermeture pour des réaménagements qui se résument en fait à des couches de Wash Wash, cette mauvaise peinture à eau qui te salit, même quand tu passes à un mètre du mur.
J’ai donc conclu que de deux choses l’une, soit ce stade n’est pas régulièrement entretenu et donc on paie des gens pour rien, soit cette hypothèse de travaux est une farce pour masquer autre chose de plus sérieux ! Et puis je me suis dit « passons ! ».
Mais voilà, la deuxième raison qu’on m’a donnée pour expliquer la délocalisation, m’a rendu plus furieux encore. On m’a révélé que les Patriarches de Mfandena auraient prédit la défaite aux lions si le match se jouait à Yaoundé, car ils sont fâchés. Et alors je me suis dit deux choses, d’abord que mêmes les hauts fonctionnaires, cartésiens en public croyaient donc si fort à ces choses là et la deuxième c’est que en y réfléchissant, le stade n’appartient donc pas au Cameroun, mais à un groupuscule de patriarches qui régulent son utilisation, au rythme de leurs humeurs et des bourdonnements de leur ventre.
Bon sang ! Doit-on nous faire chier jusqu’à ce niveau ? Et même si Yaoundé nous refuse son stade, doit-on nous livrer alors dans la gueule du loup Choléra à Garoua ? Je vous assure, c’est à ce moment que je me suis rendu compte, qu’il y avait une épidémie au Cameroun, plus grave que celle qui nous fait peur. Il ya une épidémie beaucoup plus prononcée qui ne nous laisse plus beaucoup de choix en dehors de Garoua. En voulant coller à l’actualité, j’ai appelé ça, « Le Choléra des infrastructures ». La situation des infrastructures est la même dans les dix régions du Cameroun, et du coup, je suis convaincu que c’est une épidémie.
Les symptômes et les manifestations de la maladie sont à quelques exceptions près, les mêmes : Aire de jeu poussiéreuse ou avec des herbes sauvages euphémiquement appelée gazon, vestiaires à ciel ouvert, toilettes publiques où l’intimité épouse si bien le terme public, clôtures poreuses et présentant les rides et une sénilité éloquente !
Non ! Tout cela ne peut être une simple coïncidence…Vous voulez me faire croire que tous ces stades se sont passé le mot pour présenter les mêmes symptômes ? Non, ils se sont passé les maux, assimilables à une épidémie. Mais c’est là où réside tout le problème. Pour le choléra, j’ai vu des ministres défiler aux chevets des malades, j’ai ouï dire qu’il y avait des Plans Marshall pour stopper l’épidémie, et puis on nous a dit que le Choléra était maîtrisé. Et maintenant qu’en est-il du choléra des infrastructures ?
Personne ne semble bouger le petit doigt, pourtant chaque jour, comme le vrai choléra, il tue le spectacle et les génies. Et c’est pour cela qu’au moindre caprice de Yaoundé, Garoua reste le seul et le dernier rempart, parce que la Sodecoton a pris sur elle et depuis des années d’entretenir cette antre de Roumdé Adja, sinon… Oui sinon ce stade serait comme celui de Douala aussi, où le gazon synthétique contraste avec des tribunes, amas de ferrailles, prêt à caresser les cranes et où les tribunes à ciel ouvert, offrent des cailloux de combat lorsque les circonstances l’imposent, des cailloux issus d’un ciment qui s’est désagrégé avec le poids de l’âge. Je me suis donc rendu compte, qu’il n’y avait pas d’autres solution que de faire jouer le match à Garoua. Je me suis rendu compte que le choléra des infrastructures, nous condamne à faire des bisous au vrai choléra. C’est le prix à payer pour contourner les caprices de jeunes filles des patriarches de Mfandena, c’est le prix à payer pour une épidémie qui n’a pas d’antidote.
Pour finir, François Omam Biyick en donnant la liste des vingt-trois et pour justifier le choix de Garoua, a dit que ce choix faisait suite au vœu du Capitaine des Lions Indomptables Samuel Eto’o, de voir les Lions se balader dans les villes du Cameroun. J’ai envie de voir où on ira après Garoua ? Dans la poussière de Bafoussam, de Maroua où alors les tribunes piégées du Stade de la Réunification de Douala ?
Pauvre Omam, Pauvre Eto’o, ils ont peut-être oublié que toutes les infrastructures sportives au Cameroun, vivent une épidémie qui attend sa fin avec le programme annoncé de construction des infrastructures sportives dans les dix régions du Cameroun. Mais au fait, où sont passés les Chinois ?