C’est avec une appétence boulimique que je regarde les débats s qui fleurissent sur tous les sujets d’actualité : ce sont de véritables occasions d’élévation de l’esprit et de jouissance parfois silencieuse pour quiconque s’autorise le temps d’écouter. Jamais on n’entendra traiter son contradicteur d’aigri pour les idées qu’il défend, car il peut arriver qu’il vous convertisse à sa chapelle. S’il est persuasif. Et ses idées convaincantes.
La période post Coupe du Monde de football 2010 et le traumatisme qui s’est ensuivi ont donné lieu, chez nous comme ailleurs, à mille et un forums où se sont exprimés des centaines de points de vue visant, les uns comme les autres, à aider à la reconstruction du football dans les pays où les résultats des sélections nationales avaient été catastrophiques. En France, où les Bleus ont connu le fracas et la honte, des mécanismes ont été élaborés, pour que plus jamais l’équipe nationale ne sombre comme en Afrique du sud. Non pas que l’on ait extirpé à jamais la défaite de ses gênes, mais que désormais celle-ci découle de la vérité du terrain et de la supériorité de l’adversaire, plus que des contingences extra sportives.
Au Cameroun où les Lions indomptables ont fait piètre figure au même Mondial, l’heure est toujours au grand tâtonnement. Les dirigeants se comportent encore comme si rien de bien grave ne s’est passé en Afrique du sud. En consultant la dernière liste des joueurs convoqués pour le match amical contre la Macédoine, l’on se rend compte que le terreau sur lequel s’était construite la mésaventure sud africaine est toujours en place. Pour la cinquième fois les entraîneurs de l’équipe nationale ont convoqué des joueurs sous le drapeau. Cette fois encore, une liste nouvelle est présentée. Preuve de leurs hésitations. Et du long chemin qu’il leur reste à faire. Des joueurs évoluant aux confins de la terre (Etats-Unis) sont préférés à ceux qui éclaboussent quotidiennement nos écrans de leur talent. D’illustres inconnus ont frappé dans l’œil des sélectionneurs tandis qu’ils font preuve de cécité devant la brillance de vrais lingots ?
Il est de mode, au Cameroun, que l’on traite ceux dont les critiques gênent les consciences défaillantes et bousculent les inerties cervicales, d’ «aigris ». C’est la voie choisie par les chiens à mordre de la Fécafoot face à tout débat sur l’incurie de l’institution. Le drame c’est que ceux qui sur-abusent de cet adjectif ne présentent pas le même confort intellectuel ni matériel de ceux qu’ils condamnent au seul nom de leurs idées.
Jean-Lambert Nang