Il parait que en République cacaoyère, le pouvoir, c’est comme le sexe : plus il dure, plus il est bon. Le président de la Fédération Internationale de Football Association, le Suisse Joseph Sepp Blatter, veut donc un 5ème mandat à la tête du football mondial. Une éclatante leçon de démocratie cacaoyère. Rien de plus normal, en Suisse, on adore le cacao pour son chocolat.
Depuis le temps qu’on vous dit que la République Cacaoyère est l’avenir du monde ! Nous avons instauré le système de présidence à vie dans nos Républiques Cacaoyères en faisant des bébés de modifications de durée de mandats présidentiels à nos constitutions. Parce que l’on a découvert, à force de biberonner le vin de palme à tire-larigot (comme un marigot), que le pouvoir, c’est comme le sexe : il est bon quand il…dure. Et les mandats présidentiels sont comme les palmiers en Républiques Cacaoyères : plus ils sont longs, plus ils font un vin blanc du tonnerre ! Bon, on se calme…
Il s’appelle Joseph Sepp Blatter. C’est un citoyen de la République Charcutière de Suisse, qui est à la tête de La République du football mondial depuis 16 ans. A presque 80 ans (78 ans, on exagère, yah ![1]). A la veille de la coupe du monde de juin 2014, il a annoncé qu’il souhaitait être candidat à l’élection de 2016 parce que sa « mission à la tête de la Fiffa n’est pas terminée ».
Ha, on croirait entendre une de nos majestueuses excellences à la veille de la fin d’un dernier mandat présidentiel. Sepp Blatter vise donc déjà son cinquième mandat, à moins que par impossible, le congrès de la Fifa qui se tiendra à Sao Polo le 10 juin, à la même période que les congrès des 06 confédérations des 209 associations membres qui la compose, ne limite par l’âge le nombre de mandats. Ce qui ne risque pas d’arriver, parce que là encore, quelques soupçons de pratiques cacaoyères font florès dans l’institution de Genève : élections truquées, corruption, détournement de fonds, pots-de-vin, matchs truqués.
« Pour le jeu et pour le je »
Sapristi ! On en croirait bien que le président Blatter a fait un stage de maintien au pouvoir en Républiques Cacaoyères : d’abord, il dit que ce n’est pas lui qui veut rester au pouvoir, c’est le « peuple » des membres des fédérations, ensuite à propos de son âge qui serait avancé, il répond qu’il est en « bonne santé », enfin, il annonce qu’il y a du travail à « consolider » à la FIFA, et comme par hasard, il est le seul mouton à six pattes capables de « parachever » cette grande œuvre. Pour un sport qui se joue avec deux pattes, il y a vraiment de quoi être indispensable.
En Suisse, on doit avoir beaucoup de suite dans les idées. Il a bien appris en tout cas sa leçon de démocratie cacaoyère, Sepp, du genre « si je ne suis plus président », c’est le chaos. Rien de tel pour foutre la pétoche, même à ses rares opposants : le seul actuel autre candidat, l’ancien vice-secrétaire général adjoint, le Français Jérôme Champagne avoue déjà qu’il ne pourra pas battre Blatter. Il reste à espérer qu’il ne jette pas l’éponge à la dernière minute comme le Qatarien Mohammed Bin Hammam en 2011, et que Sepp n’ait plus que pour seul adversaire, l’abstention ou le taux de participation. Abstention, taux de participation… Ça ne vous rappelle rien ? « Le président tel, qui brigue un 8ème mandat, au pouvoir depuis 36 ans, est sûr de gagner. Seule inconnue, le taux de participation des électeurs de la République Cacaoyère de… ». Chronique d’une « victoire écrasante » annoncée.
Mais il y a un dernier argument massue que pourrait encore avoir le président du ballon rond mondial : à la Fifa, ces 50 dernières années, on n’aime pas les courts mandats, et le précédent président, lui aussi apparemment en très bonne santé (98 ans aujourd’hui), João Havelange, a passé 24 ans à la présidence de l’institution de Genève. Il a même fallu qu’un scandale de corruption éclabousse le vieil avocat Brésilien pour démissionner à l’âge de 97 ans de la présidence d’honneur de la …Fifa en 2013. Du coup, on a envie de dire qu’à la Fifa, la devise c’est « Pour le jeu et pour le je ». Heureusement que cette formule est intraduisible en anglais.
Nous, nous sommes quand même contents que chez nous, dans notre Confédération Cacaoyère de Football (CAF), on n’ait pas changé de président depuis 1988 (26 ans), et qu’on est sûr qu’il y fera au moins 29 ans. En 2013, il s’est offert une réélection par …acclamation. C’est-à-dire, pour rester dans le langage de la planète football, une réélection sur « tapis verre ». Un tapis en verre ? Oui, trop glissant pour les opposants, à moins d’avoir la « godasse » !
*Un regard impertinent sur l’actualité socio-politique et culturelle du Cameroun et de l’Afrique. Histoires de Républiques Cacaoyères et de République Charcutière. Pour lire/écouter ces chroniques, comme leur auteur, François Bimogo, il faut adorer les Républiques Cacaoyères.