Et si l’on avait fait le choix de développer une marque camerounaise au lieu d’aller chercher un équipementier avec la fin du contrat Puma ? La télévision payante, la téléphonie mobile ont montré qu’on pouvait adresser le marché camerounais de façon ingénieuse, dans des modèles qui lui sont propres. Et Bamboutos a démontré en 2016 que le produit dérivé fonctionnait. Point de vue
Kadji, Fotso, Sohaing, Bayero, Ngouchingué, Nana Bouba, Noutchogoin, Foyou, Mukete, Fokam, Danpullo. Connus ou pas des Camerounais, ces noms sont ceux des dix familles (ou personnes) les plus riches du Cameroun, pesant à elles seules plus de 4 milliards de dollars. Certains sont des industriels, d’autres dans le commerce, l’énergie, les activités portuaires. Mais, il ne me semble pas que nous soyons en mesure de citer un de leurs produits (ou une de leur marque) qui soient distribués dans une boutique sur les Champs-Elysées ou dans tous les centres commerciaux occidentaux.
C’est dire qu’au Cameroun, il y a un marché. Et un réseau de distribution qui n’est pas dans les radars des études internationales du marché international. Le pays n’offre pas de grands centres commerciaux avec la présence des grandes marques internationales de distribution, mais le commerce de proximité y est puissant, malgré une organisation sommaire pour ceux qui ne le connaissent pas. Au moment où l’on annonce le retour du Coq sportif au Cameroun, il n’est pas totalement superflu de repenser à ces éléments. Combien de points de vente la marque française pourra-t-elle avoir au Cameroun ? Quelle est la logistique d’acheminement des produits pour les supporters ?
Un des soucis lorsque l’on parle du sponsoring, et donc de construction de l’univers d’une marque, on en oublie que derrière l’émotion, le sponsoring est avant tout un des éléments de la communication et que celle-ci est destinée à vendre un produit. Avec ce contrat, la marque parisienne vient de se payer une belle campagne de presse : sans avoir à payer de publicité, elle vient de rappeler qu’elle équipe Saint-Etienne, la Fiorentina. Tout le service commercial pourra bénéficier de ce retour de presse au moment de négocier les contrats pour les années futures.
Et le Cameroun dans tout ça ? Peu de choses. Avec une signature de contrat en avril et deux grosses compétitions en juin (Coupe du monde féminine et la CAN), il y a peu de chance d’avoir des lignes de vêtements dédiées. Et c’est bien le problème lorsqu’on travaille dans la précipitation, en pensant que c’est le prestige de la marque équipementier qui fait rayonner l’image du Cameroun. Or, les Lions indomptables sont d’abord soutenus par les Camerounais. Ceux de l’étranger, mais surtout ceux du Cameroun, ceux des grandes villes, ceux des villes moyennes et des campagnes. Ceux avec des hauts revenus, et ceux qui n’en ont que très peu.
Les produits des replicas doivent donc s’adapter à ces Camerounais. Qu’il y ait des maillots, et produits en général que l’on trouve sur les marchés et dans les commerce de proximité, qu’il y en ait pour ceux qui ont d’avantage de revenus, avec le merchandising et les tarifs adaptés. Quoi de mieux qu’une entreprise camerounaise pour mieux adresser ce marché et montrer que les Lions indomptables ont une valeur ? Qu’y a-t-il de compliqué dans la confection des maillots ? Le design ? La fabrication sur des sites marocains, turcs, indonésiens, ou éthiopiens ?
Pas de magie donc à produire en série des maillots pour notre équipe nationale. Comment donc adresser le marché ? Des intelligences existent si on veut bien les associer. Comment Thierry Nyamen a-t-il imposé sa marque Tanty dans les rayons et les habitudes ? Comment les Directeurs commerciaux de Congelcam, de Fermencam, Sita, ou bien d’autres font pour que leurs produits se retrouvent dans le pays entier ? Quelle longueur de gamme pour les produits de la marque Lions indomptables ? Quels prix ? Comment développer des produits adressés au public féminin ? Demandons aux commerçants qui gèrent déjà les contrefaçons ou a Ciccam comment commercialiser un produit pour avoir durablement un succès comparable à celui du pagne du 8 mars.
Les solutions existent, les compétences sont présentes, et en encourageant cette mise en place et ce système de distribution, peut-être que les grands équipementiers reviendront pour prendre une participation au capital de cette marque. Et au véritable prix du marché.