Le délit de lâcheté, que je confesse ici volontiers, m’a tenu à l’écart des stades au cours de cette Coupe du monde. Je n’ai pas eu le cœur d’affronter l’issue que je savais inéluctable. Si toutefois j’avais une once de fatuité en moi, je bomberais le torse maintenant et vous dirais que j’avais largement prédit le désastre. Le niveau des Lions est à l’étiage depuis longtemps. Je l’ai dit.
Le seul coach qui, à mon avis, aurait pu retarder la chute a été vidé par la volonté des Français, les intrigues d’un ancien footballeur amer et vain, la palinodie permanente au sommet des affaires publiques, l’injustifiable démission du premier responsable du football face à ses responsabilités. À ce cocktail s’est ajoutée la légendaire morgue des Camerounais, collection de gogos et de béats réfractaires à la confrontation d’idées, au travail à long terme et à la défense de l’intérêt commun.
En guise de coach, nous avons hérité d’un type au mieux correct et au pire un ectoplasme largement considéré comme nul par la communauté du football de son pays, que nous avons accueilli comme le nouveau maître de l’Oubangui-Chari reconquis. Notre capitaine au bout du rouleau a passé le témoin à celui qu’on croyait le meilleur du groupe et qui, à défaut d’avoir créé une atmosphère favorable dans le vestiaire, a fourgué quelques pièces de joaillerie de grande facture. Nous sommes ainsi allés en Afrique du Sud avec du clinquant aux poignets et les poches bien garnies de deniers de la République, dans une délégation officielle de plus de 80 personnes. Dont M. Iya, président de la Fécafoot.
Zéro point. 31e sur 32 équipes. Deux petits buts de rien du tout. Un désastre que je ne me rappelle pas avoir déjà vécu au cours des quinze dernières années. Nous n’avons jamais été aussi lamentables ; nous n’avons jamais été aussi humiliés. Mais cela n’est rien comparé au désespoir que nous ressentons parce que nous savons bien que rien n’arrivera à personne, que personne ne prendra ses responsabilités, que personne ne se sent tenu de rendre des comptes, que tout continuera comme si tout allait bien. Cela est intolérable et inadmissible.
M. Iya, Dieu merci, est une personnalité fréquentable. C’est, je crois, sa plus grande qualité. Mais être plus vertueux que la majorité de nos grands clercs ne suffit pas pour diriger la Fécafoot. Diriger la Fécafoot, c’est prendre la responsabilité du football sous toutes ses formes. C’est rendre compte aux Camerounais et se sentir lié au destin du football camerounais. M. Iya n’est sans doute pas coupable, mais il est responsable. Le produit Lions Indomptables, c’est le produit de M. Iya. À cet égard, le président de la Fécafoot a lamentablement échoué.
Il ne reste rien d’autre à considérer, et je crois qu’il y a déjà pensé. Ce serait bien qu’il fasse le pas ; ce serait bien pour son intégrité personnelle, et ce serait bien pour le football camerounais.