De complément aux com- pliments. Lorsqu’il dé- barque cet été, Dany Nounkeu est un « joueur d’appoint », dixit Alain Casanova. Trois mois plus tard, le Camerounais récolte les lauriers en défense centrale : quatre titularisations au compteur dont trois d’affilée, série en cours.
« Oui, reconnaît l’intéressé, presque gêné, hier midi, sous les feux de la rampe en conférence de presse, ça a été plus vite que prévu. Mais je ne me prends pas la tête… »
Non, pas le genre de la maison. Plutôt adepte de la cool attitude, l’ami Dany. Toujours le sourire aux lèvres, la poignée de main au diapason. En totale inadéquation, finalement, avec l’image qu’il peut véhiculer sur le terrain : dur au mal, combattant de tous les instants. Le jour et la nuit, en somme.
Il explique la métamorphose : « En match, je suis continuellement sous pression ; je suis obligé de bien faire. En dehors, je suis comme auparavant, d’un naturel casanier ; ce n’est pas parce que ça marche pour moi en ce moment que je vais changer mon style de vie… Je ne bois pas, je ne fume pas, je ne sors pas en boîte. J’ai mes amis que j’invite, ou qui m’invitent. J’ai conservé le même petit univers. » Qu’à Pau, en CFA, ajoutera-t-on, où le TFC est allé chercher ce défenseur à tout faire (il y a aussi évolué «6»). En premier, rappelons-le. « Un pari », avait dit à l’époque l’entraîneur toulousain. Déjà gagnant, donc. « Même si Dany doit progresser, surtout tactiquement », répète depuis le début de saison Casanova. Nounkeu, en écho : « Le coach est un père pour moi. Il me parle énormément. Me prodigue un tas de conseils. Comme les collègues, plus expérimentés. »
Dany est à l’écoute, en prend de la graine, les sème – ensuite – sur le pré vert. Impeccable dans les «un contre un» (ceux qu’il a perdus dans sa semaine à trois matches doivent se compter sur les doigts d’une seule main, et encore), un peu moins au marquage (le but sur corner à Belgrade). Il le sait : « à ce niveau, si tu laisses partir quelqu’un ou le moindre ballon dans ton dos, ce n’est pas sorcier : tu es corrigé. »
En attendant, l’oiseau fait son nid petit à petit. « Plus je gagne en temps de jeu, plus je gagne en confiance. Plus je suis à l’aise, quoi. » Et même dans la citadelle de Gerland où les Violets n’ont plus gagné depuis 1965-66 ? « Ce n’est sûrement pas comparable avec Nancy, mais il n’y a aucun souci. On se sent de mieux en mieux : le groupe vit bien. Moi avec. »
Lui qui, « comme tout Africain débarquant en Europe, rêvait de devenir pro : même en Russie… » Lui qui, « comme tout Africain, a débuté le foot pieds nus dans la rue, avec une boule de chiffon en guise de ballon : bon pour les duels ! » Lui qui, « comme tout Africain, fait sa prière le matin, le soir et avant chaque match dans les vestiaires ». Dany encore, qui, amateur, avait été présélectionné chez les Lions indomptables. « Un jour, j’espère, mais ce qui compte aujourd’hui à mes yeux c’est le TFC. »
Bref : Dany Achille Nounkeu Tchounkeu, 23 ans, 1m84 pour 80kg, un doux-dur. Un peu dingue aussi, sourit-il : « Parfois, je viens à l’entraînement en métro. » Histoire, peut-être, de rompre un peu son train-train quotidien…
Patrick Desprez