Samuel Eto’o se sentait un peu à l’étroit sur son flanc gauche la saison dernière. A sa demande, l’attaquant camerounais se rapproche peu à peu de l’axe. Et l’Inter n’a pas à s’en plaindre. Eto’o affole les compteurs depuis quelques semaines, à l’image de son triplé face au Werder mardi.
Samuel Eto’o a vécu une grande première mardi soir face au Werder Brême. Lors de la très large victoire de l’Inter, le Camerounais a signé son premier triplé sous le maillot nerazzurro, plus d’un an après son arrivée dans la cité lombarde. Une attente presque anormale pour un buteur de sa trempe. Mais le Eto’o de ce début de saison n’a rien à voir avec celui du précédent exercice. On n’ira pas jusqu’à dire que l’ancien Barcelonais revit. Après tout, il fut un élément clé de la triple couronne milanaise du printemps dernier. Mais derrière ce triomphe collectif émergeait, discrètement, une forme de frustration individuelle. Elle est en train de s’évaporer.
L’avenir dira si l’Inter a perdu au change en remplaçant José Mourinho par Rafael Benitez sur son banc. Une chose est déjà certaine en revanche : personne n’a tiré davantage parti de ce changement que Samuel Eto’o. C’est bien simple, il est actuellement incandescent. En neuf matches officiels cette saison avec l’Inter, Eto’o a déjà inscrit 11 buts, donc 5 en Serie A et 4 en Ligue des champions. Rien ne l’arrête. Et il croit connaître au moins une des raisons de sa réussite actuelle. « Benitez est mieux que Mourinho pour un attaquant, explique-t-il. Avec Mourinho, on jouait tout le temps en contre. Là, on presse beaucoup plus. Pour nous, c’est mieux, car cela veut dire que nous récupérons le ballon beaucoup plus haut. »
Dans l’axe, que du bonheur
Malgré son palmarès et son CV, Samuel Eto’o avait accepté de se sacrifier pour le bien commun sur le flanc gauche la saison passée, à la demande de Mourinho. Sans broncher, il s’était du coup retrouvé dans l’ombre de Diego Milito. Pendant que son compère argentin se gavait dans l’axe en empilant les buts, il rongeait son frein. Maintenant, il veut sa part du gâteau. Une grosse part, si possible. « J’ai eu une discussions assez animée avec Benitez avant la reprise, a-t-il confié récemment. Je lui ai dit clairement que je ne voulais plus jouer aussi éloigné du but. » Le technicien espagnol a compris le message, mais il lui faut trouver un équilibre entre les exigences légitimes d’Eto’o et celles de Diego Milito, qui a tout de même livré un premier semestre 2010 digne d’un Ballon d’Or.
Pour l’instant, la roue de la réussite semble avoir tourné du côté de San Siro. Eto’o flambe, Milito se cherche. Blessé, l’Argentin n’a pas joué cette semaine face au Werder. Du coup, Eto’o, pour la première fois depuis des lustres, s’est retrouvé seul en pointe. On a vu le résultat. « Tout le monde sait que j’adore jouer dans cette position. J’ai pris beaucoup de plaisir », a souligné le Camerounais. Au point que certains, en Italie, commencent à se demander si ce dernier ne va pas (re)devenir indispensable dans l’axe. « Tout est une question d’équilibre, juge prudemment Benitez. L’important, c’est l’équipe. Mais je ne vois pas pourquoi chacun ne trouverait pas sa place dans notre organisation. »
Les trois options de Benitez
Benitez a aujourd’hui trois options devant lui. Il peut d’abord conserver le système actuel, avec Milito dans l’axe et deux joueurs sur les côtés, dont Eto’o à gauche, tout en permettant à celui-ci de jouer plus près du but que de la ligne de touche. Ce fut le cas par exemple contre Bari (4-0), à San Siro, la semaine dernière. Le match référence dans ce domaine, puisque Milito et Eto’o avaient tous deux signé un doublé. Deuxième possibilité, beaucoup plus radicale et assez improbable aujourd’hui, reléguer purement et simplement Milito sur le banc pour laisser la voie libre à Eto’o dans l’axe. Coutinho, voire Babiany, pourrait alors prendre le couloir vacant.
Enfin, il peut choisir une formule radicalement différente en rompant avec le 4-2-3-1 de Mourinho qu’il a pour l’instant conservé, pour jouer avec deux pointes. Un système jamais usité d’entrée de jeu, mais qui a toutefois été testé en cours de match à Palerme. Alors que l’Inter était menée au score en seconde période, Eto’o s’est rapproché de Milito. Résultat, un doublé de l’ancien Catalan et une victoire 2-1. Quoi qu’il en soit, ce sont des problèmes de riche que doit résoudre l’ancien manager de Liverpool. Et sur ce qu’il a montré depuis le début de la saison, Samuel Eto’o est efficace quelle que soit la formule. Tant qu’il ne joue plus arrière gauche, il est heureux. Et ça, Benitez l’a bien compris.
Laurent VERGNE