Du haut de son 1,80m, Carlos en impose. Son discours impressionne tout autant. Ambitieux et déterminé, le jeune gardien camerounais veut se faire une place dans l’effectif stéphanois et rattraper le temps perdu avec le Havre. A 18 ans, sa jeune carrière est déjà bien remplie. Champion de France en moins de 15 ans avec le Havre, c’est sous le maillot du Cameroun que Carlos Kameni s’est fait une belle carte visite avec en apothéose un titre de champion olympique en 2000.
A 6 ans, Carlos Kameni découvre le football dans les rues de Yaoundé. Quelques années plus tard, (il a 12 ans), il fait ses premiers pas de footballeur dans un centre, la Kadji Sport Académie à Douala. Partenaire du centre de formation camerounais, le Havre lui offre, en mai 1997, un essai. Essai concluant puisque, trois mois plus tard, il intègre définitivement le centre de formation du Havre. « J’avais 13 ans et demi. Quitter ma famille et mon pays fut une période très difficile » confie-t-il. Au Havre, le jeune gardien normand apprend vite, très vite même. Il est en avance et souvent surclassé dans les catégories. Il écrit une première ligne à son palmarès en remportant le titre de champion de France des moins de 15 ans en 1999.
Mais, c’est avec les Lions Indomptables que Carlos explose littéralement et se fait une solide réputation. A 15 ans, il honore sa première sélection jeune avec le Cameroun. Un maillot qu’il ne va plus quitter. Il enchaîne la Coupe d’Afrique Juniors en 1999 au Ghana (3e place). « A une semaine près, j’ai failli ne pas participer à cette compétition à cause de mon trop jeune âge. Heureusement, j’ai fêté mes 15 ans après le premier match de la compétition » puis la Coupe du Monde junior au Nigéria (8e de finale). En 2000, à 16 ans, il fait sa première apparition chez les A au cours d’un tournoi international en Corée.
Quelques mois plus tard, il remporte son premier titre majeur: les Jeux Olympiques à Syndey. Titulaire à partir des quarts de finale, il est l’un des principaux artisans du sacre camerounais. Décisif en finale face à l’Espagne en bloquant deux penaltys, il devient un héros national. « Tout a été trop vite pour moi. En peu de temps, je suis devenu une sorte d’ambassadeur et j’étais réclamé un peu partout dans le pays ou sur les plateaux de télé ». Logiquement, en 2002, il participe comme gardien remplaçant à la Coupe d’Afrique des Nations au Mali et à la Coupe du Monde au Japon et Corée.
Comment avez-vous géré cette ascension fulgurante?
Ce fut un peu difficile à gérer. Mais j’ai autour de moi un entourage qui m’aide beaucoup. Je sais d’où je viens et ce que je veux. Je n’ai pas encore atteint mes objectifs. Avec les Jeux Olympiques, la CAN, la Coupe des Confédérations et pour finir la Coupe du Monde, j’ai connu beaucoup de choses nouvelles en peu de temps.
Il faut rester humble. Cela fait trois ans que je suis champion olympique et je n’ai pas changé. Même si j’ai été décoré par le Président de la République, je suis resté le même. Le plus difficile fut de concilier mes études avec les sollicitations en équipe nationale.
Parmi votre entourage, le milieu du football est-il présent?
Mes compatriotes, Patrick M’Boma, Rigobert Song, Salomon Olembe, N’Kono (entraîneur des gardiens en sélection) sont des grands frères. Ils m’ont toujours soutenu dans les bonnes comme dans les mauvaises périodes. Ils me téléphonaient tous les jours pour me dire de ne pas lâcher.
Quelle fut cette période si difficile?
Après les Jeux Olympiques, je n’ai plus joué en club. Le Havre m’a mis à l’écart. C’était une période très difficile et inexplicable. Personne au Havre ne m’a expliqué les raisons. Je ne pouvais pas m’exprimer. Les seules occasions de me montrer, c’était en sélection nationale avec le Cameroun.
On vous sent amer?
Le Havre m’a fait grandir mais ne m’a jamais donné ma chance. Ils ne m’ont pas fait confiance. Je n’ai jamais été appelé chez les pros sans que l’on me donne des explications. Ma situation était difficile. J’ai fait des essais à la Juventus du Turin, à Perrugia, à l’Espanyol mais, chaque fois, le Havre fermait la porte et faisait monter les enchères.
Quelles sont vos ambitions en rejoignant l’ASSE?
Je veux continuer d’apprendre et progresser. Ma priorité, c’est d’exercer ma passion : le football. Je veux mettre ma pierre à l’édifice et permettre au club de remonter au classement. En fait, tout s’est fait très vite. Le 26 janvier, mon agent m’a prévenu que l’ASSE voulait me faire effectuer un essai. Le lendemain, j’étais à l’entraînement avec les Verts et quelques jours plus tard, j’étais prêté.
Quel fut le discours de Frédéric Antonetti?
Il m’a dit que j’étais le bienvenu et que je devais faire mes preuves à l’entraînement et me défoncer. Le football est un milieu de concurrence. La concurrence me motive et me permet d’avancer. Le plus important, c’est de travailler.
Appréhendiez-vous ces premiers entraînements avec des pros?
J’ai été parfaitement accueilli. Au niveau des entraînements, je n’avais pas de raisons d’être effrayé. La peur, je ne la connais pas. Pendant les Jeux Olympiques, j’ai déjà joué face Ronaldhino, Luço, Zamorano. J’ai fait des essais à la Juventus avec les Buffon, Trezeguet, Thuram. Il faut respecter les gens avec qui on travaille mais ne pas les craindre.
Lors des premiers entraînements, ce qui nous a frappé, c’est la manière de diriger la défense?
C’est très important pour un gardien de but de beaucoup communiquer. C’est un atout pour la confiance personnelle mais aussi pour toute l’équipe. Les gestes et la parole sont très importants pour positionner ses défenseurs.
Il y a quelques années, vous aviez sûrement dû entendre parler d’un certain Joseph-Antoine Bell qui a fait vibrer le public stéphanois?
Je n’ai pas encore pu le joindre. Mais je sais tout ce qu’il a fait de bien pour Saint-Étienne et inversement. Je vais essayer de suivre ses traces, voire mieux. Avec notamment Bell, Song’o, le Cameroun a toujours été une bonne école de gardiens de but.
Comment se passe votre entente avec Jérémie Janot?
Nos rapports sont sains. Nous nous entendons très bien même s’il y a une rivalité sur le terrain.
Propos recueillis par D.C.