Patron d’une pizzeria et directeur technique du centre Samuel-Eto’o au Gabon, le défenseur camerounais n’a toujours pas remisé les crampons.
Il était venu à Libreville en 2011 terminer une belle et longue carrière professionnelle du côté du FC Sapins – ça ne s’invente pas – après un dernier tour de piste en National avec Strasbourg. Quatre ans plus tard, le champion d’Afrique 2002, aujourd’hui âgé de quarante ans, joue la prolongation. «Initialement, j’avais répondu à une offre de Pierre Aubame, le père de Pierre-Emerick (NDLR : Aubameyang), qui me proposait de rejoindre ce club dont il était le manager général.» Le Gabon s’apprêtait à organiser la CAN 2012 avec la Guinée équatoriale, le moment était parfait pour «promouvoir le football gabonais», se souvient le natif de M’Biam. «Je n’avais encore jamais joué dans un club africain puisque j’ai rejoint la France à l’âge de huit ans. Contrairement à beaucoup d’autres, j’ai donc voulu goûter à ce type d’expérience. Je suis revenu aux racines, d’une certaine façon.»
Contacté par Samuel Eto’o
Voilà donc l’ancien pensionnaire du centre de formation de Caen, passé par l’ASOA Valence, Nice, Montpellier, Kaiserslautern et Al-Khor au Qatar parti pour deux saisons de découverte des réalités de la D1 gabonaise, au côté d’un certain Daniel Cousin et de Willy Aubameyang, le frère de Pierre-Emerick. «Pour quelqu’un qui n’avait connu que le professionnalisme européen, j’ai débarqué dans une formation qui n’avait passé que deux ans en D1. Au début, on se changeait au bord du terrain, c’était encore très amateur. Mais aussi très enrichissant sur le plan humain.» Dans le même temps, son ami Samuel Eto’o, très proche du président de la république gabonaise Ali Bongo, ouvre à Libreville, dans l’arrondissement de Nzeng-Ayong, un centre de formation. «Samuel m’a appelé, il voulait que je sois de l’aventure. J’ai accepté !» Responsable des entraîneurs, Bill Tchato a hérité il y a peu la responsabilité technique du centre depuis le départ du directeur espagnol venu de Barcelone. «On travaille avec 63 gamins, âgés de onze à quinze ans, qui logent dans l’un des hôtels bâtis pour la CAN 2012. Les enfants sont inscrits dans la Ligue de l’Estuaire et disputent les Championnats de jeunes. Je suis présent tous les jours, sachant que les gamins jouent le samedi et le dimanche.»
Comme si cela ne lui suffisait pas, l’an passé, le défenseur s’est lancé dans une toute autre activité, la restauration. «On a ouvert en mai 2014 une pizzeria du côté d’Angondjé, dans le quartier du nouveau stade. Il y a quatre employés et ça marche plutôt bien. On a eu des visiteurs prestigieux comme Deco, Patrick Mboma et Samuel Eto’o. Notre pizza vosgienne, la préférée des Gabonais, cartonne ! De temps en temps, je passe derrière le comptoir. On a une dizaine de tables au total. On fait aussi du fast-food, du poisson braisé et des chawarmas (mets libanais).»
Une finale de Coupe du Gabon à jouer
Conforté dans son choix par la popularité de son établissement, le Camerounais songe à ouvrir un glacier. Le projet devrait, en principe, voir le jour d’ici à un an, même si rester à Libreville implique des sacrifices, notamment sur le plan privé. «Mais j’ai la chance d’avoir une épouse formidable. Ma famille vit toujours à Montpellier. J’ai d’ailleurs deux fils à l’école de foot du MHSC.» Le football justement, l’ex-Caennais n’a pas tiré un trait définitif dessus après ses deux années au FC Sapins. «J’ai repris une licence dans un club, l’AFJ, qui évolue en D2 gabonaise. Et il m’arrive de disputer encore quelques matches, soit en tant qu’ailier gauche, soit en numéro 10.»
Vingt ans après ses débuts au Stade Malherbe, l’ancien Lion indomptable rugit toujours. Il y a quelques jours, il s’est qualifié pour la finale de la Coupe du Gabon. Son club a successivement éliminé trois clubs de l’élite et défiera début septembre le CF Mounana (D1). En cas de succès, le Camerounais jouera-t-il la prolongation une saison supplémentaire, histoire de goûter à la Coupe de la Confédération africaine, à quarante et un ans ? «Ce n’est que du plaisir, de toute façon», répète à l’envi Bill Tchato, qui profite de la proximité avec le Cameroun pour goûter, quand son emploi du temps le lui permet, au pays qui lui a offert ses plus beaux souvenirs.
Frank Simon