Un autre jeune camerounais flambe à Nantes et rêve lui aussi de la grande équipe des Lions. Portrait. « Franchement je ne peux pas venir. Comme Olembé et Ndjemba vont à la Can, il faut que je me batte pour avoir une place de titulaire ». C’est en ces termes que Hugues Bilayi Ateba s’est excusé auprès de sa famille et de ses amis qui l’attendaient pour les dernières fêtes de fin d’année.
Ce beau monde espérait partager la joie du jeune canari (21 ans) qui a signé son premier contrat “pro” (en même temps que Ndjemba Ndjemba) avec le FC Nantes à l’entame de la présente saison.
Bilayi Ateba s’est donc mis au travail et n’a pas eu beaucoup de peine à s’imposer dans un effectif nantais alors à la dérive. Raynald Denouiex et plus tard Angel Marcos n’ont pas hésité à promouvoir ce jeune dont les qualités cadrent fort bien avec le label de la maison jaune. Une ascension programmée qui ne surprend guère la soeur de l’intéressé qui n’a rien oublié des attitudes et de la volonté tenace de Bilayi à réussir une carrière de footballeur. “Mon frère cadet a toujours été un garçon calme et réservé. Il n’a jamais eu qu’un seul objectif : devenir un grand joueur de football. Et il a tout mis en oeuvre pour y parvenir”. Dans un ton emprunt de fierté, Jeanne d’Arc Ateba se répand en révélations : “il partait de Mélon où nous habitons à pied pour aller jouer à l’Omnisports avec des enfants nettement plus âgés que lui. Il n’allait presque jamais à l’école et ne réclamait même pas l’argent des beignets comme nous avions coutume de le faire. Hughe ne pensait qu’à jouer au football”.
Diamant volé!
Une passion brûlante et dévastatrice. Un talent naissant. Une petite émeraude qui avait de qui tenir. “Mon père fut lui-même un excellent footballeur, ajoute Jeanne d’Arc. “Pierre Ateba (alias Dubour) a même été capitaine de l’équipe nationale dans les années 50 avant d’être sous-préfet. Malheureusement il est décédé en 1989 et n’a pas pu voir son fils jouer. Mes oncles disent que Jojo (le petit nom d’Ateba) a le même talent que mon défunt père. Quant à maman, ce n’est que plus tard qu’elle a vraiment accepté que Jojo joue au football”.
Plus tard. En 1996 exactement Bilayi dispute avec l’équipe nationale cadets une rencontre qualificative pour la Can contre la Côte d’Ivoire. Mais avant, le jeune défenseur a dû faire ses classes dans le centre de formation de Norbert Nguewo et son union minimes. Véritable machine à fabriquer des champions. Nguewo qui a vu passer les Kameni, Wome, Olembe, Kioyo, (Allemagne) Essola (Creteil) et bien d’autres n’a rien oublié des qualités de son ancien pensionnaire : “Bilayi est un enfant calme, travailleur et très courageux sur le terrain. Déjà tout jeune, il était très difficile à passer et savait se montrer accrocheur. Il avait aussi une très bonne détente. Depuis qu’il est passé “pro”, il a encore travaillé sa prise de risque et a affiné sa technique. C’est un vrai diamant”. Norbert Nguewo connaît son jeune pouce par coeur pour lui avoir appris les fondamentaux du métier de footballeur dès sa tendre enfance : “il est arrivé chez moi en 1991. Il y est resté 6 ans et a gagné 4 coupes Top avec l’Union minimes”.
Dès 1994 Bilayi est repéré par le centre de formation des Brasseries du Cameroun mais continue à jouer pour son club formateur qui devient Nassaras FC. Titulaire d’une licence junior (n°05752 du 05/05/1995) il affronte même le Dragon de Yaoundé en 1995 avec son club alors affilié en D3. En 1996 Bilayi est “kidnappé” par le centre des Brasseries du Cameroun dans l’optique du tournoi de Montaigu. Le petit “Jojo” éclate et tape dans les yeux des recruteurs présents à Montaigu. Six clubs le demandent mais il opte pour Nantes “pour le sérieux et la qualité de son centre de formation”.
On le voit, c’est chez Nguewo que Ateba apprend les bases de son métier. Eludant ce fait Nantes n’a négocié qu’avec les Brasseries qui sont les seuls jusqu’à ce jour à avoir perçu l’indemnité de formation d’un joueur qui n’est même pas resté un an dans leur centre. Excédé, floué Nguewo a multiplié des correspondances à la Fifa et à la Fécafoot sans suite. De passage au Cameroun le jeune Bilayi a même intercédé pour ce dernier auprès des Brasseries pour que lui soit versé une quote-part mais ceux-ci ont choisi de faire dans la roublardise.
Le Nantais déplore cette situation mais encouragé par Nguewo lui-même, il tient à garder le moral. Après avoir fait son trou au sein d’un effectif nantais qui se sort progressivement de la zone de relégation, Bilayi ne rêve plus que d’une chose : “jouer avec la grande équipe des Lions. J’y pense depuis ma tendre enfance. En plus, je souhaite effacer le triste souvenir de la Can junior 2001 d’Ethiopie où nous sommes passés à côté”. Un rêve? Que non. Un simple objectif logiquement accessible quand on considère que Suffo, Olembe et Ndjemba Ndjemba autres pièces précieuses camerounaises de la filière diamantifère du FC Nantes viennent d’être sacrés champions d’Afrique avec les Lions. Et quand on pense à l’immense talent et à la détermination d’un jeune qui a toujours su où il allait.