Alain Wabo est connu comme étant un communicateur rigoureux qui exprime clairement ses pensées. Pour quelques minutes de conversation, il nous brosse les difficultés qu’il rencontre dans sa préparation avec les juniors en route pour la coupe du monde. « Capello » refuse de céder au découragement et est convaincu que l’équipe ira loin.
Camfoot.com : Vous êtes entrés en stage ce mardi pour la dernière ligne droite de cette préparation. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Alain Wabo : Les premiers jours sont toujours difficiles parce que les joueurs arrivent au compte goutte. Mais vous savez que pour un entraîneur, la satisfaction c’est lorsque qu’il a son effectif au complet et ce n’est pas encore le cas. Le plus embêtant c’est que cette situation va durer une semaine parce qu’une bonne partie de l’effectif ne sera là que le 1er septembre. Ce que je peux vous dire, c’est que nous allons travailler avec ceux qui sont déjà présents.
Camfoot.com : Parmi les premières arrivées, on note celle du capitaine François Beyokol. Peut-on parler de soulagement quand on sait qu’il a été longtemps blessé ?
Alain Wabo : Je crois que c’est un soulagement pour tout le monde. Il vous a dit qu’il se sentait mieux. J’en suis heureux car c’est un garçon que je connais très bien et qui a un mental d’acier. S’il est sur pied, je sais qu’il jouera sa carte à fond.
Camfoot.com : Sur le plan administratif, on semble assister à une forme d’improvisation et à un amateurisme des vieux jours…
Alain Wabo : Vous avez raison et il faut être honnête. Vous savez au Cameroun, lorsqu’on dit la vérité on vous tire dessus, mais il faut savoir dire les choses. Pour ma part, je crois qu’il faut dire ce qu’on ressent. L’équipe nationale junior n’a pas eu l’attention nécessaire qu’il faut pour préparer une coupe du monde. Sur le plan administratif, il faut dire que tout est bafoué et rien n’est fait de manière cohérente. Tout se fait à l’emporte pièce et on réagit au coup par coup. Et à ce moment, ça devient difficile pour l’entraîneur.
Camfoot.com : Les autres pays qualifiés à cette coupe du monde se préparent dans de très bonnes conditions en Europe et en Asie. Est ce que tout ceci ne tend pas à vous décourager ?
Alain Wabo : Non pas du tout. Ça ne me décourage pas. J’ai une carte personnelle à jouer. Sinon comme vous le dites, ce serait facile de céder au découragement. Quelle que soit la modicité des moyens mis en place par le gouvernement, je me battrais à fond avec mon staff pour pouvoir amener le Cameroun loin dans cette compétition.
Camfoot.com : Vous avez retenu douze joueurs sur les dix huit qui étaient à la CAN. Qu’est-ce qui justifie la mise à l’écart des six autres ?
Alain Wabo : Vous savez, la préparation de la CAN avait également été bâclée. Vous convenez avec moi que je n’ai que eu dix jours pour préparer cette coupe d’Afrique. Je n’ai donc pas eu suffisamment de temps pour prospecter. J’ai dû prendre ceux qui étaient présents à ce moment-là et qu’il m’était facile de voir. Lors de la CAN , j’ai compris que certains joueurs avaient un niveau beaucoup trop faible pour pouvoir tenir la dragée haute.
Camfoot.com : Il y a également que certains de vos joueurs clés comme Ebanga Bertin de Tiko United ont des problèmes de passeport et de qualification. Tout cela doit forcément vous turlupiner…
Alain Wabo : Tout cela s’ajoute aux différents problèmes que je vis avec mon staff. Mais je crois qu’il y a encore du temps et nous allons trouver les moyens de recadrer tout cela le plus rapidement possible pour qu’il n’y ait pas ces petits problèmes qui pour moi sont gênants.
Camfoot.com : A la Can au Rwanda vous avez présenté une équipe robuste et tactiquement au point, malgré un début poussif. Pour cette coupe du monde, qu’est ce que celui qu’on présente, et ne le prenez pas mal, comme « la grande gueule Alain Wabo » veut présenter comme équipe aux yeux du monde ?
Alain Wabo : (Rires) Vous parlez d’un début poussif, mais c’est simplement parce que vous n’avez pas l’expérience nécessaire pour comprendre. Vous savez, une équipe qui est bien préparée physiquement et qui a les moyens de sa politique démarre une compétition toujours comme un moteur diesel. Et au fur et à mesure que la compétition avance, les joueurs se mettent en exergue. Je crois que pour cette coupe du monde, nous avons un avantage qui est que la majorité des joueurs évoluent en Europe. Ce qui veut dire qu’ils ont quelque chose de plus. Il faut savoir qu’à la coupe du monde, la tactique et la stratégie devraient occuper une place prépondérante. Pour répondre aux défis des autres nations, il faut être à la page.
Camfoot.com : Vous étiez à la Can au Rwanda avec des joueurs qui venaient de Bangangté, de Tiko, de Foutouni, de Guider, Maroua, etc. Vous revenez en stage avec les mêmes joueurs, mais qui cette fois-ci viennent de Marseille, de Majorque, de Suisse, de Milan, de Barcelone, etc. Est ce que la manière de les manager va changer ?
Alain Wabo : Je peux dire oui puisque à chaque maladie correspond un antibiogramme. Vous savez, la coupe du monde est un autre palier et il faut trouver, avec ces joueurs qui ont forcément évolué, des repères tactiques pour contrer les différents adversaires parce que le niveau de la compétition sera forcement différent de celui de la Can.
Camfoot.com : Maintenant il n’est plus question de détection mais de préparation. Sur quoi allez vous axer cette avant-dernière phase de la préparation ?
Alain Wabo : Il faut comprendre que le plus difficile maintenant c’est de trouver la cohésion et la compréhension des joueurs du même compartiment et des compartiments voisins. Cela s’acquiert par la redondance du geste et par la vraisemblance. Tout ceci c’est pour dire que nous allons beaucoup insister sur les matches amicaux pour que les joueurs trouvent leurs repères. Dix jours avant la compétition, nous allons simplement faire des réglages nécessaires pour que l’équipe soit au point.
Camfoot.com : Et lors de la dernière phase de la préparation en Egypte, sur quoi allez vous travailler ?
Alain Wabo : La dernière phase en Egypte sera consacrée à l’intégration technico-tactique. Nous allons beaucoup insister sur la tactique parce qu’elle prend beaucoup de temps. Il faut trouver la stratégie et travailler la cohésion. Nous allons insister sur cet aspect pour que les joueurs aient plus facilement des repères sur le terrain.
Entretien mené par Guy Nsigué à Yaoundé