Son séjour à Loum aura été de très courte durée. Le temps de quatre journées de Ligue 1. Et le voilà contraint de quitter son poste d’entraîneur de l’Union des mouvements sportifs (Ums), pour « incompatibilité d’humeur » avec ses dirigeants. Rencontré à Yaoundé, l’ancien sélectionneur des Lions juniors revient sur les contours de son limogeage, le mode de fonctionnement de ses anciens employeurs, et parle du cas Wome, parti du statut de meilleur joueur d’Elite one l’an dernier pour n’être qu’un simple remplaçant de luxe à Loum. Entretien.
Qu’est-ce que ça fait de perdre son poste, juste après quatre journées de championnat ?
C’est évident que c’est prématuré. Après quatre journées, il est impossible de tirer de conclusions. Parce que les choses ne sont pas encore complètement en place. L’équipe est jeune, et il y a une mutation qui s’effectue progressivement. Il faut savoir avoir de la patience. Le sport est une école de patience et d’humilité. Quand une équipe sort de deuxième division, malgré ses ambitions, il faut d’abord bien prendre la température.
Que vous reprochait-on exactement à Loum ?
Peut-être mon insubordination … Parce que dès notre deuxième match, il y a eu un incident à Douala. Et constatant la tournure que les événements prenaient, j’ai demandé une séparation. Car les dirigeants et moi, on était opposés sur tous les points. Surtout au niveau du fonctionnement. Mais au lieu de ça, c’est mon adjoint, Njamba qui a été débarqué. Moi j’ai continué à travailler sans adjoint. Et il y a eu une accalmie après la victoire contre Renaissance, mais tout est reparti en vrille après la défaite contre Panthère. Je pense que compte tenu de nos divergences, il était important que l’on se sépare le plus tôt possible. Heureusement, c’est ce qu’il s’est passé. Le football moderne confère un certain rôle précis à l’entraineur. A cet effet, un entraîneur, dans un club professionnel est un cadre de conception et non un agent d’exécution des instructions de ses dirigeants. Or, ça, je ne pouvais pas l’accepter. Autant ne pas être entraîneur du tout. Car si on doit vous dicter tout ce que vous devez faire dans votre domaine de compétence, c’est très grave.
Est-ce à dire qu’il est difficile d’être entraîneur du club de l’Ums de Loum ?
Un entraîneur qui a un peu d’orgueil et de personnalité ne peut pas faire long feu, avec le mode de fonctionnement de l’Ums de Loum. On vous dira que ce sont les habitudes du club. C’est soit vous devenez une marionnette, soit vous devenez l’ennemi de vos dirigeants parce que vous aurez essayé de garder votre territoire inviolé.
Est-ce ce mode de fonctionnement dont vous parlez, qui explique la situation que traverse actuellement Pierre Wome ?
Tout ce qui précède peut répondre à cette question. L’administration et moi, étions totalement divergents sur ce cas. On m’a dit que Wome n’a pas été recruté pour jouer. Alors je me suis demandé : qui est celui qui doit déterminer les joueurs qui peuvent jouer ou pas ? Il faut que chacun assume son choix. Et moi j’espère que la situation de Wome va changer, pour le bien du joueur et pour le bien de club. Parce qu’on ne peut pas expliquer comment un joueur international, qui a connu une carrière glorieuse, avec un statut de meilleur joueur de la saison dernière avec le Canon, devienne un joueur de galerie. C’est une insulte envers le joueur, et envers ceux qui lui ont décerné ce titre. Je crois que c’est le joueur le plus utile de cette équipe.
A-t-il des regrets ?
Vous savez, on ne gère pas Samuel Eto’o, comme on pourrait gérer Joël Matip. On ne gère pas Wome comme on pourrait gérer n’importe quel joueur du championnat local. Je crois qu’il faut avoir une discussion permanente et franche avec le joueur. C’est une star. Et s’il n’y a pas ce dialogue comme c’est le cas à l’Ums, je pense que c’est une bombe qui peut exploser à tout moment. J’ai beaucoup discuté avec lui, sans entrer tout le temps dans les détails. Il avait certaines informations que je prenais sur moi, mais je dis qu’il faut que chacun assume. Il n’y a pas deux Wome dans notre championnat. De ce fait, il est absurde qu’il lui arrive ce que nous savons. Si le club n’a pas besoin de lui, qu’il le lui dise. Parce qu’à moi, je le répète, on m’a dit qu’il n’a pas été recruté pour jouer. C’est extraordinaire. Quand on sort de deuxième division, il vaut mieux être discret. Pour ne pas attirer trop de regards sur soi. L’Ums veut être champion cette année. Je crois que c’est une ambition démesurée. Parce qu’en dehors des deux gardiens, de Gérard Bakinde et de Pierre Wome qui n’est pas très utilisé, je ne pense pas que ce club ait l’effectif nécessaire pour rivaliser avec Coton Sport ou Union de Douala. Il faut un temps d’adaptation. Etre ambitieux, c’est légitime. Mais, il ne faut pas être prétentieux.
Entretien mené par Arthur Wandji à Yaoundé