Le président de coton sport de Garoua, l’équipe chérie du département de la Benoué se dit satisfait du titre de champion du Cameroun remporté pour la deuxième année consécutive par son club. Il revient de long en large sur les problèmes rencontrés par sa formation pendant la saison. Comme la saison dernière il entend rempoter la coupe du Cameroun synonyme de doublé. Il juge en dernier ressort la formule sous la quelle s’est déroulé ce championnat.
Camfoot.com: Pour la cinquième fois, Coton remporte le titre. Quels sont vos sentiments à la fin de cette autre saison ?
Pierre Kaptené: Un sentiment de satisfaction bien sûr parce qu’on ne peut avoir un autre sentiment que celui-là. Aussi, une reconnaissance envers le groupe qui s’est battu. Le groupe constitué par le coach Lamine et ses joueurs, parce que quand ça marche, on oublie ses serviteurs de premières heures ; ceux qui se battent, ceux qui souffrent pour essayer de récupérer la gloire pour d’autres personnes. Donc, ma première pensée va à l’encadrement technique et les joueurs qui se sont battus depuis le début de cette saison assez difficile pour nous, parce que c’est une saison expérimentale avec ce championnat à deux phases. Nous terminons la première avec un écart de points assez important ; ce qui veut dire que si on avait arrêté la saison à cette phase, le titre aurait été acquis pour nous à trois ou quatre journées avant la fin, malheureusement la nouvelle formule où on repart à zéro fait qu’à trois journées de la fin, nous n’étions que troisième. C’est le match contre Racing qui nous remet en pôle position et nous gagnons contre Tonnerre pour confirmer ce titre définitivement. Ça a été difficile parce que sur trois fronts, on essayait de se battre à fond ; la compétition internationale, la coupe du Cameroun, qui pour nous heureusement nous permet de discuter une seconde finale. Donc une saison assez pleine, avec beaucoup de peine puisque nous perdons la possibilité de nous qualifier pour la compétition internationale au Ghana… Mais ça fait parti de la vie des sportifs. Il y a des jours où l’on réussit et il y a des jours où l’on ne réussit pas; il faut réussir à tirer des leçons des échecs pour préparer les victoires de demain.
Camfoot.com: Ce match de dernière journée, beaucoup ont pensé que c’était en plein dans les négociations ?
Pierre Kaptené: Vous savez que nous sommes habitués à ces choses. Nous tenons le haut du pavé depuis dix ans, nous occupons ainsi la place de ceux qui étaient là et vous savez que dans la vie on n’accepte pas non plus facilement de laisser la place. Nous savons que nous gênons, mais nous n’allons pas nous attarder sur ces allégations. Pourquoi ne parle t-on pas de la vente du match Racing – Canon puisque le Racing aussi courait après le titre ? Nous avons joué un match de manière claire, ceux qui étaient à Obala peuvent l’affirmer. Ce qui se raconte aujourd’hui c’est la simple attaque, mais ce n’est pas ça qui va nous détourner de nos objectifs. Nous allons continuer à nous organiser, à nous battre pour que ce Coton soit toujours plus fort et qu’il puisse amener au niveau du Cameroun ce que l’on voit ailleurs.
Camfoot.com: Depuis 1997 la suprématie de Cotonsport sur le plan national est incontestable, mais sur le plan international vous traînez la patte ?
Pierre Kaptené: La remarque est pertinente. Je dis ça devait amener ceux qui s’intéressent à ce sport, le football, de réfléchir de manière sérieuse parce qu’effectivement Coton ne gagne pas à ce niveau. Mais vous savez que coton n’est pas le seul club qui représente le Cameroun dans les compétitions internationales ces dernières années. Cela veut dire que même les autres clubs n’arrivent pas à faire ce que Coton ne fait pas. Donc, c’est un mal général. Pour coton effectivement, on lui pardonne moins parce qu’on considère quand même que c’est un élève doué, mais c’est un mal général sur le quel nous devons réfléchir de manière sérieuse. Le football camerounais a eu des victoires à une époque avec une certaine organisation. Aujourd’hui, d’autres pays se sont organisés et apparemment nous n’avons pas suivi cette mutation. Il est donc important que nous essayions de réfléchir sur les mutations qui sont faites ailleurs pour qu’à nouveau, les clubs camerounais puissent connaître les gloires connues à une certaine époque.
Camfoot.com: Au moment du bilan, on pense à cette saignée observée dans vos rangs en cour de saison. Qu’est-ce qui s’est passé pour que plusieurs de vos éléments quittent la barque avant même la fin de la saison ?
Pierre Kaptené: C’est une situation que nous déplorons tous, pas seulement à Coton sport, d’autres clubs ont connu cette situation cette saison. Les présidents de clubs se sont réunis pour voir avec la fédération qu’est-ce qui peut être fait pour que certains joueurs, les meilleurs d’ailleurs, n’abandonnent pas leur club au moment ou on ait le plus besoin d’eux. Vous savez c’est une réalité qu’il ne faut pas ignorer, à savoir que tous les footballeurs maintenant rêvent de devenir professionnel, avec la prolifération des soi-disant agents de joueurs qu’on a installé au pays. Il y en a qui passent leur temps à raconter aux enfants les chimères en leur disant que, c’est moi qui ai fait partir Eto’o, Mbami, je vais vous envoyer dans tel ou tel club. Malheureusement, les enfants n’ont pas toujours le recul qu’il faut pour faire l’analyse par rapport à ses déclarations ; ils se font embarquer dans des aventures qui souvent se terminent mal pour eux et mal pour leur club. Il faut que nous essayions de trouver une solution soit viable pour les deux parties. Il n’est pas question de condamner un joueur ou de lui empêcher d’avoir un bien-être matériel que procure la pratique du football de haut niveau. Nous sommes tous humains, chacun a besoin d’améliorer sa condition de vie, on le comprend. Mais il ne faudrait pas non plus sacrifier l’avenir des clubs au moment où l’on a besoin d’eux pour que les clubs puissent avoir une notoriété, qui demain leur permettrait d’avoir une assise plus importante et leur apporter aussi un encadrement meilleur.
Camfoot.com: S’ils partent en masse de votre équipe, c’est dire qu’ils n’ont aucune garantie ?
Pierre Kaptené: La garantie on peut le voir à deux niveaux : le premier niveau c’est la possibilité que certains joueurs ont tout de même eue de faire une bonne carrière à partir de coton sport. Aujourd’hui vous pouvez compter au moins une dizaine de professionnels qui sont partis à partir de l’encadrement que nous avons apporté. Notre rêve c’est de permettre à ces jeunes de se faire une vie à partir de la pratique du football. Mais un autre niveau est que sur le plan local, nous essayons de les mettre à l’abri des besoins élémentaires, ce qui les permettraient d’avoir des prestations à la limite de ce que nous attendons d’eux. Maintenant il faut trouver le juste milieu entre les deux ; le souci légitime de partir, mais de partir dans les règles. Ce que nous déplorons c’est que certains disparaissent sans qu’on ne sache où ils vont, pour quels résultats ? Et pourtant, lorsque c’est bien pensé et bien conçu, nous sommes prêts à les aider.
Camfoot.com: S’il y’ avait quelque chose à regretter, c’est certainement la non-participation en finale de la coupe des confédérations ?
Pierre Kaptené: C’est cela, il n’y a pas autre chose que cela… La grosse déception cette année c’est effectivement cette élimination à la coupe des confédérations. Mais ce qui nous fait le plus mal c’est peut-être le fait que nous fassions un nul à Garoua sur un match que nous aurions pu gagner, parce qu’il faut rappeler que c’est un compatriote qui nous refuse un but clair marqué et validé par le central.
Camfoot.com: Quels sont les enseignements qu’on peut tirer de la nouvelle formule de championnat ?
Pierre Kaptené: Vous êtes sans ignorer que deux objectifs étaient poursuivis par cette nouvelle formule : la réduction des charges pour la couverture de la saison par les clubs et une meilleure compétitivité du championnat, notamment la compétitivité sur le fait qu’en fin de saison, on assistait souvent à des matchs arrangés lorsque les équipes du milieu du classement savaient qu’elles n’étaient plus menacées de relégation, ou qu’elles ne pouvaient plus prétendre au titre. Donc, la formule testée devait permettre de limiter les problèmes de marchandages. Effectivement sur ce plan on peut considérer qu’il ya eu une petite amélioration, même si on considère toujours que Coton a arrangé le match contre Tonnerre, donc on a pas échappé entièrement à ces allégations. Le deuxième aspect qui était celui de la réduction des charges, là on est passé complètement à côté de la plaque. Nous avons rencontré la même équipe six fois (le cas de Sable de Batié). À notre avis il faut revoir cette formule.
Camfoot.com: Dans l’immédiat, c’est la coupe du Cameroun devant l’Union de Douala qui est en ligne de mire. On dira tout de même que c’est un gros morceau à avaler ?
Pierre Kaptené: Oui, surtout que le président Kamdem rappelle qu’il avait gagné le premier trophée du septennat du chef de l’état en 1997, et qu’il souhaite rééditer le succès avec cet autre septennat. Nous disons que nous avons gagné le dernier trophée du septennat et pour boucler la boucle il faudrait que nous gagnions le premier trophée de ce septennat… Rires.
Camfoot.com: Et si on était plus sérieux ?
Pierre Kaptené: Union nous a battu à deux reprises cette saison. Cela veut dire que nous venons en outsider parce qu’ils sont considérés comme favoris. Mais pour nous, il n’est pas question de perdre trois fois devant le même adversaire durant la même saison.
Camfoot.com: On annonce déjà dans vos rangs pour la saison prochaine pas mal de noms. On peut avoir quelques précisions ?
Pierre Kaptené: Pour le moment c’est encore des annonces ; on ne peut rien dire en ce moment, laissons la saison se terminer. Après la coupe du Cameroun, nous dirons ce que sera le visage de Coton sport l’année prochaine.
Camfoot.com: Un mot à l’endroit des supporters du club chéri de la Benoué ?
Pierre Kaptené: Nous leur disons merci parce qu’ils ont toujours été derrière nous, on a eu besoin de leur soutien dans les moments où nous nous sentions incompris et ils étaient là pour apporter ce soutien qui nous permet aujourd’hui de savourer ce titre. Nous espérons qu’ensemble nous aurons la possibilité de lever le trophée de la coupe du Cameroun.
Propos recueillis par Guy Nsigué à Yaoundé, nsigue@camfoot.com