« Le football n’est pas l’assemblée nationale où toutes les régions sont représentées. » dixit François Ngoumou dans une interview accordée à la rédaction de Camfoot. Nous avons évoqué la DTN, la LFP et le banc des lions indomptables avec l’entraîneur de football basé en Belgique.
Camfoot.com: La lfp tarde à prendre ses marques, pensez vous que c’est finalement la solution pour sortir notre football de sa léthargie ?
Ngoumou François : Je vous remercie pour cette question, qui tombe à l’aube d’une nouvelle saison au Cameroun et à la fin des éliminatoires de la CAN 2012.
Pour avoir participé au forum sur le football en 2010 et ayant contribué modestement à la réflexion tant dans la mise sur pied de la direction technique de notre football, que de cette ligue professionnelle, nous ne pouvons que nous réjouir de la mise sur pied de ces 2 structures qui à notre sens, si les moyens sont donnés à ceux qui ont été choisis, vont aider à mettre en application les recommandations du forum.
La ligue qui est sensée gérer notre football local d’élite et la Dtn par la formation des cadres et la détection sur l’étendue du territoire national doivent travailler la main dans la main car on ne peut bâtir une maison sans fondation. La Dtn est la fondation sur laquelle doit s’appuyer la ligue pour aider à avoir les joueurs talentueux et compétitifs pour que nos clubs puissent à nouveau fournir du spectacle gage d’un retour garanti des spectateurs dans les stades.
Mais, le véritable problème qui demeure à mon sens et qui doit être résolu au plus vite, reste celui des infrastructures. Il faut des stades aux normes internationales. Combien y a-t-il de stades opérationnels capables d’abriter deux championnats d’élites au Cameroun ? À peine quatre. Mais comme on est déjà lancé, on ne peut plus reculer. Espérons que le gouvernement va accélérer le processus de construction des stades annoncés et que d’ici un an ou deux, on entre vraiment dans l’ère du professionnalisme.
Camfoot.com: L’heure est à la recherche d’un nouveau sélectionneur. Pensez vous que ce soit la solution pour préparer les prochaines échéances ?
Ngoumou François : Pour nous qui suivons les Lions depuis plusieurs années, ce qui est arrivé était quelque peu prévisible dans le contexte actuel.
Nous sommes sortis d’une CAN catastrophique en Angola sans faire de bilan. On a enchaîné avec la coupe du monde sur les mêmes bases et on a cru qu’en recrutant un entraîneur de la trempe de Clémente issue d’un pays de football, récent champion du monde, il allait faire des miracles alors que les dirigeants ne lui ont pas donné toutes les armes pour réussir dans sa mission. On ne reviendra pas sur l’épisode des bannis et les querelles entre les joueurs que ceux qui devaient aplanir, n’ont jamais réussi à gérer.
Ce n’est qu’à la fin des éliminatoires que certains abcès ont été percés, mais les carottes étaient déjà cuites. Que cette élimination nous serve de leçon. Le Cameroun a un potentiel de footballeurs immense mais là où le bas blesse c’est le management autour de cette équipe.
Il faut des personnes ayant côtoyés l’environnement des clubs professionnels pour accompagner cette équipe, car il faut se rendre à l’évidence que notre sélection est constituée à 90 % de professionnels et ceux qui les encadrent sont des amateurs. Il y a là une dichotomie.
Il faut par exemple une cellule de scouting à l’international constituée d’anciens joueurs et techniciens camerounais qui y résident. Cette cellule serait également chargée de la détection de jeunes talents. Elle travaillerait également avec la direction technique pour dénicher nos fils issus de la diaspora et méconnus au Cameroun. Ceci permettra d’éviter les sélections de complaisance comme on le voit actuellement.
Il faut par exemple renforcer la direction administrative en désignant un directeur général qui sera spécialement chargé de la logistique.
Les compétences ne manquent pas et il ne faudrait pas que les décideurs se précipitent avec des actes politiques. Avec un bon casting, on aura les hommes qu’il faut pour rebâtir une équipe conquérante. Le Sénégal qui nous élimine aujourd’hui l’a fait avec un entraîneur local. L’Egypte, notre bête noir, nous a toujours battu avec un entraîneur national à sa tête. Le Cameroun a les compétences nécessaires. Il faut donc prendre des décisions uniquement sur la base du mérite. Éviter de faire comme s’il s’agissait une histoire de régions car le football n’est pas l’assemblée nationale où toutes les régions sont représentées.
Camfoot.com: Le nom de Denis Lavagne a plusieurs fois été cité …
Ngoumou François :Après 8 ans passé au Cameroun à la tête de Coton qui domine le championnat national sans partage, il a montré qu’il avait une certaine compétence sur le plan local. Il est certes européen avec l’avantage d’avoir côtoyé les réalités de notre championnat au quotidien mais, il s’agit de l’équipe nationale. A-t-il vraiment le profil idéal ? Dix ans de coachs européens à la tête des Lions sans succès devrait nous faire réfléchir. Je pense sincèrement que la formule d’entraineur camerounais ayant fait ses écoles dans le football professionnel reste à explorer.
Camfoot.com: Pensez-vous pouvoir jouer un rôle dans cette reconstruction ?
Ngoumou François : Il ne s’agit pas d’une affaire personnelle. Si on fait appel à nous autres qui avons une formation du haut niveau, nous n’hésiterons pas à apporter notre contribution à la relance de notre football. Nous vivons le football professionnel au quotidien et nous voyons comment cela se passe ailleurs. Il ne s’agit pas d’inventer la bougie.