« Je crois que Lauren avait raison d’avoir engagé son départ de la sélection nationale et qu’il a encore raison aujourd’hui, plus qu’hier. A ce jour, tout le monde a un peu ouvert les yeux sur ce qui se passe vraiment au sein des Lions Indomptables, nous allons donc essayer de faire en sorte que tous ceux qui sont partis de cette équipe puissent revenir, ce ne sera pas facile de les convaincre, car le temps a passé et beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, mais nous devons les convaincre qu’il existe un projet et qu’ils font partie de ceux qui peuvent le mener à bien. »
Africafoot.com: A vous entendre, le calme est revenu au sein de l’équipe.
Modeste Mbami: Depuis un moment, nous sommes bien revenus dans le bain, à part le faux pas que nous avons fait à Bordeaux. Aujourd’hui, nous construisons quelque chose d’important avec un projet défini par nos dirigeants. Il est clair que nous ne sommes pas encore au top, mais la rencontre comme celle de ce soir me fait penser que nous sommes sur le bon chemin. Notre début de saison a laissé beaucoup de traces et il va falloir travailler dur pour effacer cela, afin d’arriver à construire le groupe fort qui s’est manifesté ici, à Londres. Nous devons maintenant améliorer les phases offensives, car nous commençons défensivement à bien nous installer. Il faut donc travailler notre circulation de balle vers l’avant.
Africafoot.com: Qu’est ce qui vous a poussé à claquer la porte de la sélection nationale, les Lions Indomptables ?
Modeste Mbami: Je pense que vous constaterez avec moi que le temps m’a donné raison très vite. Il est clair que depuis un moment, c’était devenu invivable en sélection nationale, je me posais souvent la question de savoir ce que j’y faisais et pourquoi j’y allais, tant le climat était difficile et malsain. Au vu du groupe qu’y était le nôtre et des résultats, les gens le percevaient sans réellement savoir ce qui s’y passait. Il faut dire qu’avec un groupe pareil, il est impossible de ne pas gagner des matches, surtout devant certains adversaires moins nantis que le Cameroun de qualité des joueurs. J’ai donc manifesté un ras le bol et j’ai pris la décision de ne plus répondre à la sollicitation de la direction technique des Lions, tant que des solutions ne seront pas apportées aux revendications qui étaient les miennes. Je ne demandais à personne de me suivre dans ma démarche, car je venais de comprendre pourquoi certains l’avaient fait avant moi. Aujourd’hui, les choses sont en train de s’arranger pour éradiquer le mal qui mine l’équipe nationale, j’ai discuté avec des émissaires venus me voir, envoyés par le ministre des sports de mon pays, j’espère tout simplement que mon acte jouera positivement pour que la machine redémarre en mars 2005 et pour que nous retrouvions la place que nous méritons.
Africafoot.com: Avez-vous pris une décision pour un retour au sein des Lions Indomptables ?
Modeste Mbami: Non, je n’ai pas encore pris de décision en ce sens, nous avons amorcé un dialogue et j’attends certaines résolutions qui doivent permettre le retour au calme. Pour cela, j’ai demandé des garanties et ce n’est pas seulement Modeste Mbami qui est concerné par cela, j’ai déclaré ce que tout le monde pensait tout bas depuis plusieurs mois. Mes coéquipiers sont avec moi dans cette démarche et s’il n’y a pas de changement, je ne reviendrai pas sur ma position actuelle. J’ai discuté avec le ministre des sports, Monsieur Etamé Massoma, qui m’a compris et je crois qu’il est d’accord avec moi sur les revendications que j’ai faites sur la gestion de la sélection nationale. Il m’a assuré que le ménage sera fait, ce que j’espère, pour que nous puissions nous exprimer, afin d’apporter cette joie et ce bonheur que notre peuple a l’habitude de recevoir.
Africafoot.com: Avez-vous le sentiment que le retour d’un garçon comme Lauren Etamé s’impose aujourd’hui au sein des Lions Indomptables ?
Modeste Mbami: Vous savez, quand Lauren a claqué la porte de la sélection nationale, personne n’a donné du crédit à son geste, personne n’a réagi et c’est dommage! Certains dirigeants ont dit que c’est un joueur qui part et qui peut être remplacé, bref, on lui a attribué des griefs qui n’existaient pas, au lieu de chercher à comprendre son geste. C’est au moment où l’on se trouve en difficultés que l’on pense à son retour et à engager le dialogue avec lui. Je crois que Lauren avait raison d’avoir engagé son départ de la sélection nationale et qu’il a encore raison aujourd’hui, plus qu’hier. A ce jour, tout le monde a un peu ouvert les yeux sur ce qui se passe vraiment au sein des Lions Indomptables, nous allons donc essayer de faire en sorte que tous ceux qui sont partis de cette équipe puissent revenir, ce ne sera pas facile de les convaincre, car le temps a passé et beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, mais nous devons les convaincre qu’il existe un projet et qu’ils font partie de ceux qui peuvent le mener à bien.
Africafoot.com: Le groupe qui a disputé la CAN junior en Ethiopie (2001), à savoir Djemba, Makoun, Kameni,Marcus Moukakè… et vous bien sûr, est en train de prendre le pouvoir au sein de l’équipe fanion des Lions. Ne pensez-vous pas que c’est cela qui pose problème en ce moment?
Modeste Mbami: Il est clair que c’est cela et vous avez parfaitement raison. Il y a un réel conflit de génération, comme dans toutes les sociétés fortes. C’est une grosse partie du problème qui mine notre équipe, il y a des jeunes qui montent et qui bousculent les anciens, qui l’acceptent très mal. La sélection nationale d’un pays est le regroupement des élites, des plus méritants. La concurrence devrait exister comme partout ailleurs, on ne vieillit pas en sélection ou du moins, on ne devrait pas y prendre racine. Les plus méritants doivent avoir leur place, car nous servons une nation et non pas des intérêts personnels, il faut savoir passer la main quand rien ne va plus. Il y a des garçons qui méritent de jouer, mais qui sont relégués au banc de touche. Je ne voudrais pas jouer le rôle de sélectionneur, mais regardez l’équipe en ce moment et vous comprendrez, il ne faut pas être sorcier pour cela. Il y a une montée en puissance de certains jeunes qui prouvent dans leurs clubs que l’on devrait leur faire confiance, il faut donc qu’on nous laisse faire. En parlant de cela, il y a eu une réunion la semaine dernière où son excellence Roger Milla a pris la parole et a évoqué cela en des termes qui lui sont propres. «Nous avons laissé une équipe et des acquis, nous avons laissé un patrimoine sur lequel ceux qui intègre cette équipe ont le devoir de sauvegarder et celui aussi de peaufiner. Alors faites la même chose. Les conflits n’ont pas lieu d’exister au sein des Lions et il faut laisser faire ceux qui ont la capacité de continuer l’œuvre, au lieu d’engager la bagarre». En clair, les jeunes veulent prendre des places loyalement et les anciens ne l’acceptent pas.
C. Mouna et J. Roux, Africafoot