L’avocat au barreau du Cameroun et secrétaire général du Syndicat national des footballeurs du Cameroun (Synafoc), explique ce qui va se passer après l’annulation des élections par la Commission des recours de la Fécafoot.
Quelle est votre réaction après cette décision de la Commission des recours qui annule les élections qui se sont déroulées le 19 juin dernier ?
Je suis d’abord surpris, parce que c’est une décision qui vient d’un organe interne de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot). Un organe qui, par le passé s’est illustré par son mutisme chaque fois qu’il a été sollicité. La seule décision que cet organe a rendu était celle qui validait la candidature de M. Iya Mohammed. La surprise passée, nous constatons qu’elle a posé là, un acte républicain, citoyen et nous la félicitons pour cela. Nous demandons à cette Commission de continuer à sévir sur tout ce qui s’est passé autour de ces élections.
Selon des sources la Fécafoot entend interjeter appel auprès du Tribunal arbitral du sport (Tas). Comment appréciez-vous cette réaction ?
C’est un droit reconnu à tous. Il faut bien qu’on fasse la distinction. Les décisions des organes juridictionnels de la Fécafoot sont d’application immédiate. Cela veut dire que depuis hier (mercredi, ndlr) M. John Begheni Ndeh, par la force de la loi, a repris son poste de président de la Fécafoot. Il faut ensuite savoir que ce n’est pas la Fécafoot, il ne faut pas que les gens parlent de la Fécafoot. Si quelqu’un, en particulier estime que ses droits ont été lésés dans le cadre de cette décision, il peut effectivement interjeter appel. Aujourd’hui, la seule personne qui peut parler au nom de la Fécafoot, et engager cette fédération, c’est M. John Begheni Ndeh. Il ne faut pas faire d’amalgame en disant que la Fécafoot va faire appel. Si quelqu’un fait appel au nom de la Fécafoot, en lieu et place de M. John Begheni Ndeh, cet appel devrait être irrecevable et ne peut jamais aboutir.
Le Tas est-elle la juridiction compétente à ce niveau, alors qu’il y a la Chambre d’arbitrage du Comité national olympique ?
C’est ça l’esprit des subtilités retords de ceux qui ont fait le Code électoral. Pour aller au tas, ça coûte beaucoup d’argent (plus de huit millions de FCfa pour une procédure, ndlr). Malheureusement, ils ont introduit dans le Code électoral que la voie de recours à ce niveau, c’est le Tas. Si on a annulé les élections sur la base des dispositions du Code électoral, cela veut dire que ce sont les textes de la Fécafoot qui restent au-dessus de tout. M. John Begheni Ndeh va d’abord gagner en reconnaissant toutes les sentences rendues par la Chambre de conciliation et d’arbitrage du comité national olympique. Mais aussi, en imposant par la force de la loi et non par sa volonté, la compétence de cette Chambre, qui est sur le plan interne, la plus haute juridiction en matière de sport au Cameroun. Ils peuvent faire appel où ils veulent. Mais, dans les discussions qui auront lieu, nous allons démontrer que le Tas n’est pas compétent en cette matière, avant qu’on ait saisi la Chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique.
Cela veut-il dire que une fois installé John Ndeh devra, en application des décisions de cette Chambre, faire relire les textes de la Fécafoot, avant de procéder à toute élection ?
C’est une évidence. Il y va aussi de son propre intérêt. Il ne peut pas avoir décrié quelque chose jusqu’à avant-hier au cours d’une conférence de presse à Bamenda, ne pas remettre les choses d’abord en ordre. La logique et le bon sens voudraient que dès son arrivée, il reconnaisse les décisions de la Chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique, qui sont d’ailleurs devenues définitives et que toutes les actions qui sont en cours aujourd’hui s’arrêtent. L’article 47 dit que le président engage la Fédération par sa seule signature.
De quelles actions s’agit-il ?
Toutes les actions d’annulation des élections et l’action qui tend à contester les sentences arbitrales de la Chambre du Cnosc, qui réintégrait l’association des footballeurs, les actions qui ont annulé les élections dans la région du Nord et qui, à ce jour, est pendante devant le Tas. Il y a des actions qui ont été portées par M. Nkou Mvondo, pour demander l’harmonisation des textes. Toutes ces actions visent le processus électoral à la Fécafoot. Voilà les chantiers qui attendent M. John Ndeh. Nous avons été son avocat et nous continuons de l’être. C’est ce qui nous lui conseillerons s’il nous consulte. C’est la voie de sortie de crise aujourd’hui. Il doit aussi assainir les mœurs dans cette institution. Il y a eu beaucoup d’actes de corruption au cours de ces élections du 19 juin dernier. Il a l’occasion aujourd’hui d’enlever toutes ces brebis galeuses, pas personnellement, mais au nom de la Fécafoot, de saisir les commissions spécialisées et même la justice camerounaise, parce qu’il s’agit des actes de corruption. Ce n’est pas une chasse aux sorcières. Il faut assainir cette Fédération afin qu’elle continue sa marche vers l’émergence. Il faut que le football sorte du sous-sol et revienne au sommet, comme par le passé. Ce n’est que dans l’organisation managériale de ce football que cela est possible. Les actions de John Ndeh seront observées à la loupe par le public et nous espérons qu’il restera logique dans sa position de développement du football camerounais.
Sera-t-il aisé pour John Ndeh de travailler avec l’administration actuelle à la Fécafoot ?
C’est lui le patron de l’administration de la Fédération et je fais un appel républicain aux employés de la fédération, pour leur dire qu’ils sont au service d’une institution et non d’une personne. Ils ont l’occasion, pour ceux qui se sont égarés, de revenir sur le droit chemin. Il est de l’intérêt de tous ceux qui y sont de travailler avec le président John Ndeh. S’ils ne le font pas, il ne faudra pas qu’à l’avenir, si quelqu’un est sanctionné, qu’il ne crie pas à la chasse aux sorcières. John Ndeh, avec l’esprit de rassembleur qu’il a, ne vient pas avec l’intention de jeter tout le monde dehors.
Entretien mené par Antoine Tella à Yaoundé