L’ancienne présidente de la Ligue de football régional du Sud est en liberté. Comme nous l’annoncions il y a quelques jours, la candidate malheureuse de la dernière élection à la présidence de la Fécafoot est sortie de prison, il y a près de deux semaines. Elle a accepté de nous accorder sa première interview – en exclusivité – après les huit derniers mois passés à la prison centrale de Nkondengui. Dans cet entretien, Marlène Emvoutou fait son mea culpa, et parle de son avenir dans le football. Interview…
Camfoot : comment vous sentez-vous deux semaines après votre libération ?
Caddy Marlène Emvoutou : je suis épuisée et surtout déstabilisée par l’épreuve que je viens de traverser.
Comment avez-vous vécu ces huit mois de privation de liberté ?
Ces huit mois ont été très pénibles pour moi. L’absence de mes enfants et de l’homme que j’aime était insupportable. Toutefois, j’avais décidé de vivre sereinement cette parenthèse disgracieuse de ma vie. Huit mois qui m’ont permis de redéfinir mes priorités, de prendre conscience de mes erreurs, de pardonner à tous ceux qui m’ont fais du mal, et à implorer le pardon de toutes les personnes que mes actes ou mes propos ont heurté. Je pense que le plus important est que la prison m’a inculqué l’humilité, le partage et la solidarité. Cependant, cette parenthèse représente pour moi la plus grande aventure humaine que je n’ai jamais imaginée. Même dans mes rêves les plus fous. Vivre quotidiennement et dans la promiscuité la plus absolue avec des personnes de divers horizons, d’autres cultures, a été un vrai défi à relever. La prison a été pour moi la matérialisation de la valeur tolérance, l’acceptation de l’autre et de la chaine d’union. Par ailleurs, j’avais trouvé de l’occupation dans ce milieu très difficile. J’avais été désignée représentante des prisonniers. Cette position m’a permis d’apprécier les efforts du gouvernement pour améliorer les conditions de détention, et des avancées notoires en ce qui concerne le respect des droits de l’homme dans notre pays. L’autre priorité des autorités pénitentiaires étaient la promotion des activités visant à préparer les détenus à la réinsertion sociale. C’est ainsi que j’ai été autorisée à organiser des tournois de football, des causeries éducatives, j’ai pu parler aux jeunes détenus de la République et donc du Cameroun que nous devons aimer de toutes nos forces. Car seul cet amour pourrait nous faire abandonner les égoïsmes pour nous consacrer à l’intérêt général.
Dites-nous un peu plus sur les accusations qui avaient été portées contre vous au moment de votre incarcération, si tant est que vous avez été relaxée à la surprise générale ?
Permettez-moi de ne pas commenter les décisions du juge. Je ne retomberai plus jamais dans les même travers. Je respecte les décisions de justice, je vous citerai tout simplement Mendes France qui disait : « seule la vérité guidera nos pas ».
Envisagez-vous de poursuivre la bataille que vous avez entreprise pour redorer l’image du football camerounais ?
Je suis encore très épuisée. Je veux m’accorder un temps pour réfléchir. Pour le moment, mon lit bien chaud est meilleur que n’importe quel strapontin. Ma bataille aujourd’hui est de me libérer de cette frustration que j’ai ressentie. Mes amis d’hier m’avaient oublié. J’etais devenue un objet d’opprobre pour ceux m’adulaient. Aujourd’hui, le doute s’est installé dans ma tête. A certains moments je me convaincs que le football camerounais n’a pas besoin de moi. Et à d’autres moments j’ai bien envie de réaliser le rêve que j’ai partagé avec ceux qui m’ont soutenu jusque derrière les barreaux. Cependant, mes enfants ont vraiment besoin de moi.
Comment avez-vous apprécié la mise sur pied d’un comité de normalisation à la Fécafoot, puis sa prorogation en mars dernier ?
S’agissant du Comité de normalisation, j’étais trop préoccupée par mes démêlés avec la justice pour apprécier son action. Je suis convaincue qu’ils font du mieux qu’ils peuvent. Le milieu du football n’est pas facile à manœuvrer ; pour s’en sortir, il faut être un passionné.
Quels sont vos rapports avec les membres dudit Comité ?
Je n’ai vraiment aucun rapport avec ce Comité. Par contre j’ai beaucoup apprécié le geste des femmes de la Fécafoot conduite par madame Eko Céline, qui sont venues soutenir les femmes détenues à la prison centrale de Yaoundé. Je leur souhaite beaucoup de courage. Et je profite de cette occasion pour remercier madame Olivia Song – l’épouse de l’international camerounais, Alexandre Song – qui a pensé aux femmes détenues à l’occasion de la journée de la femme, en envoyant des centaines de pagnes de la fête.
Camfoot.com vous remercie pour cette interview exclusive …
C’est moi qui vous remercie.
Entretien mené par Arthur Wandji