Si Adoum Garoua le fait, ce sera une « belle gifle » pour Joseph Owona. Nommer un collège de quatre entraîneurs européens, pour épauler Volker Finke dans la préparation des Lions pour le Mondial 2014, après que le président du Comité de normalisation de la Fécafoot ait, lui-aussi, décidé de nommer quatre entraîneur-observateurs camerounais dans le même but ? Ce serait un tacle par derrière. Et le ministre des Sports serait prêt à le faire. Quelle que soit la couleur du carton (jaune ou rouge) qui va suivre.
Une situation qui ne laisse pas Jules Nyongha indifférent. Au micro de Camfoot.com ce jeudi, l’ancien entraîneur des Lions commente et parle de l’impact qu’une telle situation pourrait engendrer. Entretien…
Après Joseph Owona, Adoum Garoua pourrait aussi nommer des entraîneurs pour épauler Volker Finke dans la préparation du Mondial. Quel commentaire cette situation vous inspire ?
Vous m’apprenez quelque chose de terrible. Parce que si en plus des quatre désignés pour la supervision, on se retrouve à vouloir peut-être ajouter quatre autres entraîneurs, c’est une catastrophe. Si Finke était à la base de la décision de nommer des superviseurs, cela veut dire qu’il tiendra compte de leurs rapports, et qu’il était d’accord avec ce principe. Qu’on nous dise qu’il a fait une proposition au ministre d’en nommer quatre autres, cela veut dire qu’il n’était pas d’accord avec la Fécafoot qui a certainement eu tort de ne pas lui demander son avis. A 50 jours du Mondial, l’équipe des Lions va avoir douze encadreurs à son chevet. C’est la première fois que cela arrive. Donc il y aura plus d’un entraîneur par joueur sur le terrain. C’est du jamais vu. Je pense qu’on n’ira pas jusque-là.
Et si cela arrivait, quel impact cette situation pourrait avoir dans la préparation et même la participation des Lions à cette compétition ?
Les questions se resume à qui fera quoi à ce moment ? Finke ne sera-t-il pas débordé par les suggestions de ce monde autour de lui ? Les joueurs écouteront qui ? Pourront-ils supporter une telle présence, sans que cela ne pèse sur le jeu de l’équipe ? S’il n’y a pas une harmonie dans l’encadrement technique, ça ira dans tous les sens. Ce sera dommage. Entre 2005 et 2014, le Cameroun a connu neuf entraîneurs. Est-ce que dans cette mouvance on peut construire ? A côté des neuf entraîneurs que le Cameroun a eus durant cette période, l’Allemagne n’en a eu qu’un seul. C’est pour ça que ça marche dans ce pays. Nous, on est à se demander si les amateurs doivent aller au Mondial. C’est autant de choses qui amènent une pression inutile dans la tanière. En mon temps, j’avais démissionné avec l’espoir que ça allait susciter une prise de conscience au niveau des décideurs de ne pas trop se mêler de l’encadrement technique des Lions. On peut dialoguer, mais ne pas s’ingérer.
Vous n’avez pas l’impression que c’est maintenant, à 50 jours du Mondial, que le Cameroun veut débuter sa préparation ?
C’est une catastrophe. Une Coupe du monde se prépare en quatre ans. Ce sont les saisons du Mondial. Donc, c’est depuis 2010 que le Cameroun devait avoir mis sur pied un programme de développement de son football, et un programme de préparation des qualifications et de la phase finale de la Coupe du monde. Ce n’est pas en 50 jours qu’on va le faire. Et comme on ne l’a pas fait, on est en train de vouloir recruter 12 encadreurs techniques pour rattraper le temps perdu. Le Mondial 90 a été préparé en dix ans. En 82 nous sommes en Coupe du monde en Espagne, on ne perd aucun match. En 84, on gagne la Can en Côte d’Ivoire. En 86 cette équipe est finaliste à la Can d’Egypte. En 88 elle gagne la Can du Maroc. En 90 elle fait une mauvaise Can, mais elle est extraordinaire en Coupe du monde où elle termine quart de finaliste. Ça a pris dix ans. Ce n’est pas la magie.
Est-ce que cette situation ne trahit pas ce manque de cohésion entre le ministère des Sports et la Fécafoot ?
L’équipe nationale est sous l’aile des autorités publiques, donc, du ministre des Sports. C’est lui qui nomme des entraîneurs. La Fédération fait des propositions. Il y a toujours eu bagarre entre Minsep et Fécafoot. C’est pourquoi nous avions voulu un retour à l’orthodoxie qui veut que la Fécafoot soit l’organe technique, et le ministère des Sports l’organe administratif. Mais les choses ne se passent pas comme ça. C’est pourquoi il y a toujours un choc. Si nous voulons donner les chances à notre équipe de réussir, il faut mettre fin à toutes ces interférences.
Ne pensez-vous pas que le président de la normalisation en fait un peu trop ? Mettre deux Directeurs techniques nationaux au service d’un entraîneur supposé être leur subalterne…
Le patron des entraîneurs au Cameroun, c’est le Directeur technique national. C’est lui qui doit veiller sur le fonctionnement des entraîneurs nationaux, et en faire des rapports. Dès l’instant où on le met sur le terrain pour aller superviser des équipes, et de venir rendre compte à celui qu’il est supposé chapeauter, ça pose problème. C’est peut-être dans l’envie de trop bien faire qu’on pêche.
Entretien mené par awandji@camfoot.com