Le premier vice-président de la Fédération Camerounaise de Football (Fecafoot) et président de la commission des infrastructures dans cette même fédération nous a entretenu sur le projet de construction des stades engagé par l’instance dirigeante du football national. L’ancien secrétaire général de la Fecafoot a également évoqué le cas du Centre technique de la Fecafoot qui aurait dû être inauguré depuis deux ans.
Camfoot.com: Nous avons été à Mbouda où nous avons pu apprécier les travaux de construction du stade municipal de Mbouda. Comment vous est venue l’idée à la Fecafoot de vous attaquer à cet épineux problème d’infrastructures ?
Jean René Atangana Mballa : Vous savez le problème des infrastructures est un problème qui a une importance au Cameroun, quand on sait que la pratique du football et du sport en général doit d’abord se faire sur des infrastructures réglementaires tel que l’exige aujourd’hui les normes internationales. Le Cameroun de l’avis du grand public sportif souffre du manque d’infrastructures. Ces infrastructures qui normalement doivent être réalisés par l’état ou bien les collectivités locales, n’ont pas été réalisées jusqu’à présent parce que l’état ou les collectivités locales avaient d’autres priorités. La fédération sans attendre a arrêté ce programme parce qu’il y avait urgence. La qualité du football est entrain de se dégrader considérablement et nous avons arrêté un programme qui permettrait que d’ici trois à quatre ans que le championnat national de première division se joue sur des stades réglementaires avec une pelouse gazonnée, une main courante, des tribunes avec des places assises, etc. Donc c’est le projet tel que nous l’avons élaboré et étudié.
Camfoot.com: Pourquoi avoir commencé par Mbouda ?
Jean René Atangana Mballa : Mbouda a eu la priorité parce que si vous suivez bien les différents championnats qui se sont déroulés, le stade de Mbouda a déjà été suspendu deux fois pour des cas d’invasion de terrain, donc à cause des incidents. Alors nous avons pensé qu’il était urgent de commencer par ce stade ; c’est pour cela que la première étape de ce projet a été faite à Mbouda. En principe sur les dix stades que nous voulons construire, on s’est dit que par soucis de géopolitique du Cameroun, qu’on donnait déjà un stade à chaque province, et on privilégie aussi les départements qui ont des clubs en première division. Après Mbouda nous avons Akonolinga qui est prévu pour cette année 2007. Lors de la dernière réunion, nous avons décidé de lancer deux stades au même moment, celui d’Akonolinga et celui de Guider. Comme ça nous pouvons construire deux stades pour que d’ici la fin 2009 qu’on ait construit entre cinq à dix stades.
Camfoot.com: Où trouvez-vous les moyens pour tout cela, lorsqu’on sait que même l’état a du mal à construire les stades ?
Jean René Atangana Mballa : Le stade que nous construisons en ce moment a été entièrement financé par notre partenaire MTN et la fédération Camerounaise de football. Comment est-ce que le financement de ce projet est parti, vous savez que nous avons un contrat avec MTN qui sponsorise les compétitions, le championnat, les interpoules. L’année dernière (2005-2006) il y avait cette super ligue à deux sous poules ou MTN avait mis un peu plus d’argent. La suppression donc de cette super ligue a laissé une enveloppe qu’il fallait bien mettre quelque part. Alors avec MTN on s’est mis d’accord pour qu’on reverse cet argent dans les infrastructures et la fédération s’est chargée de payer le reste. C’est la commission des infrastructures de la Fecafoot qui a au départ étudié ce projet avec les coûts et l’a donc soumis à MTN qui s’est associé à d’autres techniciens dans la matière pour sortir une maquette définitive. Le coût également avait été étudié en conséquence et nous sommes heureux aujourd’hui de voir qu’on peu réaliser un beau stade avec peu d’argent. Quand je dis peu d’argent c’est moins de 250 millions. C’est aussi un appel du pied que nous voulons faire au gouvernement, à l’État, parce que dans l’esprit de beaucoup de personnes quand on dit un stade de football on parle des milliards. Voilà un stade de football fonctionnel que nous avons construit avec moins de 250 millions. Vous savez à ce montant là, je crois que nous pouvons en construire au moins dans chaque département.
Camfoot.com: Après plusieurs participations en coupe du monde c’est quand même regrettable qu’on soit à jouer le championnat national de première division au stade militaire dans l’état que nous connaissons ?
Jean René Atangana Mballa : Ce que je vous ai dit au début c’est que les infrastructures sportives sont du domaine de l’état qui doit doter la jeunesse des infrastructures sportives et puis les collectivités locales doivent aussi participer à la réalisation de ces infrastructures dans la mesure où en parlant du football c’est ces collectivités locales qui sont représentées par les équipes qui sont quand même leur porte flambeau. Il y a des villes aujourd’hui que nous connaissons grâce au football et grâce aux équipes de football de ces localités. Voyez un peu dans les grands clubs en Europe, les grands clubs portent pratiquement les noms des villes ; vous avez Paris, Bordeaux, Marseille, Lens, Nice etc. Ça fait que ces collectivités contribuent non seulement au fonctionnement de cette équipe parce qu’elles réservent toujours une part de leur budget au fonctionnement de l’équipe, et puis au niveau des infrastructures, ces collectivités y prennent une grande part. Je souhaite que se soit de même ici au Cameroun et je crois que aucun camerounais ne peut me dire le contraire. Le football est quand même un de nos meilleurs ambassadeurs, ambassadeur sur le plan international, il peut l’être aussi sur le plan national. Donc il faut que les collectivités essayent de le comprendre ; ce serait déjà quelque chose pour la jeunesse, parce que si vous voyez les plans d’urbanisme qu’on fait, il est regrettable aujourd’hui de constater qu’on ne prévoit pas beaucoup d’aire de jeu et ça c’est au détriment des enfants, de la jeunesse. Nous sommes contents de voir l’engouement affiché par les mairies que nous avons contactées parce qu’on leurs a proposé une convention. Et dans cette convention la responsabilité de la maintenance de ces stades reviendra aux mairies. Ces mairies vont contribuer à la réalisation des forages pour la maintenance. C’est très important qu’un stade qui a du gazon ait une autonomie en matière d’eau.
Camfoot.com: Est-ce que c’est le même partenaire qui va accompagner la Fecafoot pour la construction des autres stades ?
Jean René Atangana Mballa : Absolument. Pour le moment c’est le seul, mais la porte est ouverte à tous les autres partenaires. Je le dis même parce que MTN est d’accord, il attend voir d’autres partenaires s’associer à ce projet. Parce que aujourd’hui attendre que l’état fasse tout est assez difficile, il faut voir le contexte économique. Mais si d’autres bonnes volontés peuvent apporter leur soutien à la réalisation de ce projet, je crois que ce serait très bien venu.
Camfoot.com: A la fin des travaux le stade va appartenir à qui ? Est-ce qu’il va rester la propriété de la commune ? Est-ce que la Fecafoot aura désormais un droit de regard ? Comment se passera la gestion de ce stade ?
Jean René Atangana Mballa : Il faut d’abord dire que c’est un stade municipal. Les stades sur les quels nous amenons notre projet doivent d’abord appartenir aux municipalités, et c’est la fédération avec son partenaire qui viennent donc investir, mais ça reste une propriété de la municipalité. La municipalité signe une convention avec la fédération pour la gestion de ce stade. C’est une convention qui a prévu d’ailleurs certains domaines en matière de gestion des recettes ; il y aura une commission bipartite fédération municipalité pour la maintenance de ces stades. La fédération ne peut pas se contenter d’abandonner les stades à la commune et se croiser les mains. Notre but c’est que le stade soit bien entretenu, que le gazon pousse, qu’il soit bien traité.
Camfoot.com: Est-ce qu’il n’est pas possible de programmer les matches internationaux sur ce stade de Mbouda et les autres stades que la fédération va construire question de les valoriser ?
Jean René Atangana Mballa : Quand on sait qu’on n’a joué des matches internationaux au stade militaire (rire) on comprend bien qu’un stade comme celui de Mbouda c’est sans complexe. On aura ce genre de stade un peu partout où on a choisi les sites.
Camfoot.com: Que répondez-vous à ceux qui disent que toutes Ces réalisations engagées par la Fecafoot sont à ranger dans un sursaut d’orgueil de fin de mandat ?
Jean René Atangana Mballa : Ça ne peut pas être un sursaut d’orgueil de fin de mandat, c’est un projet que le président de la Fecafoot monsieur Iya Mohammed m’a confié depuis plusieurs années, c’est-à-dire quand nous avons été élus. Nous avons arrêté tout un programme aujourd’hui qui continu a être respecté malgré toutes les difficultés que nous avons. Il était question dans un premier temps de doter la fédération d’infrastructures administratives, ce qui a été fait. Aujourd’hui il y a un pourcentage de 75 à 80 %, de ligues provinciales qui ont des sièges qui appartiennent à la fédération. La fédération a aujourd’hui un patrimoine qui se chiffre à plusieurs centaines de millions, c’est-à-dire partir de zéro, parce qu’il faut rappeler qu’on a rien trouvé, la fédération a dans ses tiroirs des biens qui lui appartiennent et qui sont évalués à des centaines de millions. Après les infrastructures administratives, il était question maintenant qu’on s’attaque aux infrastructures sportives, c’est un programme qui a été arrêté bien avant, je ne crois pas que se soit un sursaut de dernière heure. Si vous voyez d’ailleurs le montage qui a été fait et le temps que cela a pris… Je crois que c’est MTN qui peut vous répondre ; ça a fait l’objet de plusieurs réunions avant même qu’on ne parle de fin de mandat.
Camfoot.com: Il est quand même question de fin de mandat…
Jean René Atangana Mballa : Bien sûr, chaque mandat a un début et une fin. Personnellement si j’ai mis l’accent sur ces aspects c’est parce que pour moi si on veut relancer le football Camerounais il faut s’attaquer aux problèmes fondamentaux. Ces problèmes fondamentaux je les cite souvent c’est d’abord le problème des infrastructures, il faut créer des infrastructures. En dehors des stades de football, il faut aussi créer des grands espaces de jeu, c’est à dire aménager des espaces où les jeunes peuvent jouer au football à longueur de journée. On voit ça par exemple en France où il y a des zones de plus de dix hectares à côté de Paris, se ne sont que des terrains de sport et vous voyez le week-end c’est tout le monde qui vient faire du sport. Ça il nous le faut aussi en dehors du stade. C’est à partir des stades que nous pouvons suivre ce qu’on appelle formation. Il faut voir les jeunes qui travaillent aujourd’hui dans des caniveaux avec tous ces mécènes qui veulent créer des écoles de football. Ils jouent dans des conditions qui laissent à désirer. Les infrastructures c’est un fondement de la pratique du football, il faut que ce problème là soit pris très au sérieux si nous voulons avoir demain un football digne de notre pays.
Camfoot.com: Les autres stades que vous allez construire, c’est sur le même model ou alors vous allez construire en fonction de chaque site ?
Jean René Atangana Mballa : Nous avons un plan type, mais avant de commencer les travaux sur un site, il y a un architecte qui va se déplacer pour aller faire un recalage, c’est-à-dire adapter le plan actuel à la configuration du site. Ce sont des stades où il y a des œuvres précises, on a privilégié d’abord une clôture, une aire de jeu engazonnée avec une main courante pour séparer les joueurs des spectateurs, une tribune avec 3000 places assises, des vestiaires pour permettre aux joueurs de se laver de s’habiller avant et après les matchs, les salles de réunion, les salles des officiels, des toilettes pour le public. Ça c’était les priorités, c’est ce que nous voulons voir dans chaque stade. Quelque soit les petites modifications qui pourraient avoir, l’essentiel c’est que l’installation soit réalisée.
Camfoot.com: Sera t-il toujours question de réhabilitation ou réaménagement comme à Mbouda ou alors il va arriver des fois ou vous allez simplement construire un nouveau stade ?
Jean René Atangana Mballa : Nous avons la possibilité de construire parce que l’étude a été faite pour construire, mais quand on va sur place, la mairie nous montre un site et pour la plupart ils privilégient un stade existant. Avec l’existant, vous savez tous dans quel état il se trouve et souvent c’est en plein ville. Pour le cas de Mbouda c’était le plus facile parce que s’il fallait avoir un terrain accidenté il faut déjà prendre en compte les terrassements qu’il faudra faire et qui coûtent parfois très cher.
Camfoot.com: Ce que nous ne comprenons pas c’est que le stade de Mbouda que vous avez entamé bien après sera bientôt livré alors que les travaux du centre technique sont bloqués. Qu’est-ce qui se passe finalement avec ce centre technique de la Fecafoot ?
Jean René Atangana Mballa : Ça fait combien de temps que vous n’êtes pas allés au centre technique ? Si vous allez au centre technique maintenant vous aller voir que le centre technique est pratiquement terminé ; il y a déjà de la lumière, l’éclairage public même, la route est bitumée, les bâtiments sont finis, les peintures sont finis, le gazon a poussé, donc c’est un centre qui est arrivé à sa fin. Mais je vais quand même signaler que la fédération n’avait pas la maîtrise de la réalisation de ce projet. Si la fédération est intervenue c’est en tant que utilisateur, bénéficiaire des infrastructures. Les travaux réalisés par la Fifa obéissent à une procédure. La Fifa confie tout à un architecte et il y a des bureaux « Goal » qui surveillent les travaux. Même quand nous allons sur ce site pendant la construction ce n’est pas de façon statutaire, on y va parce que c’est à nous.
Camfoot.com: On dit pourtant que la fédération a voulu aller au-delà de ce que la Fifa a prévu ?
Jean René Atangana Mballa : La fédération a voulu aller au-delà parce que la Fifa ne nous a pas dit de construire un centre technique. C’est nous même qui avons choisi un centre, c’est la fédération qui a choisi de construire un centre et à cet effet nous avons acheté un terrain qui nous permettra des extensions sur 6 hectares. Nous avons fait une étude et la Fifa donne une participation forfaitaire à toutes les associations qui est de 400.000 dollars ce qui représente aujourd’hui 200 millions de frs CFA. Mais quand vous voyez l’infrastructure qui est entrain d’être construit, déjà le terrain, une clôture de 1 km et demi, les bâtiments, vous voyez donc que la fédération a eu une ambition réelle vu la nécessite de ce centre technique qui va régler, je peux vous l’assurer, beaucoup de problèmes.
Camfoot.com: Finalement à quand l’inauguration de ce centre technique ?
Jean René Atangana Mballa : Vous faites bien de me demander à quand l’inauguration de ce centre technique. Nous avons malheureusement repoussé la date de la réception du centre parce que les travaux contractuels n’avaient pas prévu les gradins or le site sur le quel nous avons construit le stade était un site accidenté selon l’image du stade que nous avons vu au Japon. Il avait été construit et puis les Japonais avaient fait des gradins en épousant les formes du talus qui était resté. Nous voulons faire la même chose et cela va être fait par la fédération qui vient d’ailleurs de lancer un appel d’offre à cet effet. Dès que ce travail est fini je crois que le stade sera très très beau aussi. Nous avons eu peur qu’avec les pluies, les érosions de terre redescendent sur le terrain et peut-être causer des dégâts sur la pelouse et sur le reste.
Camfoot.com: Vous êtes président de la commission des infrastructures de la Fecafoot, quels sont les prochains chantiers de votre commission ?
Jean René Atangana Mballa : Les prochains chantiers de la commission des infrastructures c’est dans un premier temps dresser un bilan de l’état des infrastructures au Cameroun. Après ce bilan, on va essayer de mettre en ordre tous les dossiers qui ne sont terminés ; par parce que nous avons des acquisitions qui ont été réalisées mais qui ne sont pas encore finalisées par les documents, à l’instar du titre fonction. Tout le côté administratif de ces transactions, nous voulons terminer en priorité. Puis la commission va donc suivre ce projet de stade qui n’est quand même pas un petit projet. Le centre technique est déjà là, faites un tour et nous allons en parler un peu plus.
Propos recueillis par Guy Nsigué à Yaoundé