Nous avons rencontré le directeur général de Smart, l’équipementier attitré du championnat national lors d’un de ses fréquents voyages au Cameroun. C’est avec une passion débordante et un sourire communicatif que Jean Paul Foundjio vous livre les secrets du succès des équipements qui habillent les clubs camerounais. Le parisien d’adoption est depuis peu à la tête d’un club de football, aux grandes ambitions… Entretien sans chrono où il aborde plusieurs sujets actuels : stade Mbouda, affaire Bamboutos, Minsep/Fecafoot, etc.
Camfoot.com: En quoi consiste le lot d’équipement que reçoivent les clubs ?
Jean Paul Foundjio : Chaque club de Mtn Elite One trois jeux de maillots de 30. Donc, chaque club aura 90 maillots. Les clubs de l’Elite Two reçoivent deux jeux de 30 maillots ; ça fait 60 maillots par club.
Camfoot.com: Et les officiels ?
Jean Paul Foundjio : Vous remarquez que les arbitres sont bien habillés ; chaque officiel reçoit trois jeux de maillots, parce qu’il faut éviter la confusion. Par exemple si une équipe s’habille en noir, ça prête à confusion. On a donc décidé de leur donner trois jeux de maillot de couleurs différentes, ils vont avoir le jaune, le noir et le rouge.
Camfoot.com: L’on constate qu’au fil des temps la qualité des équipements s’améliore, qu’est-ce qui peut expliquer cela ?
Jean Paul Foundjio : On n’a jamais eu un problème de qualité, c’est vrai qu’on évolue avec le temps. Quand la fibre change, on change aussi. Maintenant la mode c’est la grille de transpiration, on s’adapte en suivant la mode. Smart est à l’écoute, dès qu’un modèle sort, Smart fait comme les grandes maisons, d’autant plus que les équipements de Smart sont fabriqués dans les grandes usines, les mêmes que les grandes marques. Donc, on est dans la tendance.
Camfoot.com: Après le numéro sur les shorts, logo de la ligue, logo des équipes, et cette saison les noms des joueurs, planchez-vous sur d’autres nouveautés ?
Jean Paul Foundjio : Je vous remercie pour la remarque d’amélioration constatée. Le mérite revient à la FECAFOOT qui a embauché un infographe pour concevoir les différents logos et les licences. Comme nouveauté, j’ai suggéré à MTN et FECAFOOT de pourvoir aux tenues des encadreurs dont l’habillement ne cadre pas avec le football moderne. SMART offrira dès la fin du mois des chasubles à tous les clubs pour les réservistes des bancs de touche. Vous remarquerez aussi en passant que les arbitres camerounais sont les mieux habillés d’Afrique. Le président des arbitres m’a demandé d’ajouter un carré de velcro sur la poche arrière des shorts et ce sera fait.
Camfoot.com: À l’approche d’une saison prenez-vous des dispositions particulières pour que tous les clubs reçoivent leurs équipements dans les délais ?
Jean Paul Foundjio : Je vous remercie pour la question, car avant le début du championnat, il y a une préparation énorme derrière. Juste pour vous donner une idée, dans l’Elite Two par exemple, il y a 24 clubs, 36 combinaisons de couleurs et des couleurs de toutes sortes, du mauve au bleu ciel en passant par le gris vert, etc. Si j’attends la dernière minute pour préparer tout cela je ne vais jamais réussir. Vous allez avoir un club qui va vous donner du gris jaune et un autre va vous demander du vert bordeaux, du marron, des couleurs incroyables. Donc ça ne peut pas se faire en deux jours, il faut préparer pendant au moins trois mois. Les grands équipementiers ne peuvent mobiliser leurs ressources pour ce genre de demande insignifiante à leurs yeux. Vous avez vu le produit fini… Mais il y a du travail d’artisan et de passionné derrière. Puis il faut mettre le logo, et il faut déjà que la Fecafoot coure après les clubs pour les logos. Une fois que j’ai les logos, je prépare un stencil, une fois que le stencil est prêt, je l’envoi à l’usine qui fabrique les transferts, une fois que les transferts sont prêts, je dois les passer à la presse, quand vous avez le logo du club, le logo de Mtn, le numéro derrière, le nom du joueur derrière, le numéro sur le short, l’Elite One ou l’elite Two sur la chute de la manche, ça fait 6 transferts à faire. Chaque ensemble maillot short passe 6 fois à la presse et ça ne se fait pas comme ça du jour au lendemain. Ces sont des heures de travail, mais un travail de professionnel. Il faut au moins trois mois pour préparer une saison.
Camfoot.com: Dans ce genre d’activité on sait que la concurrence est rude, qu’est- ce qui constitue votre force pour qu’aujourd’hui l’on continue à vous faire confiance ?
Jean Paul Foundjio : Je suis un équipementier de proximité, ça veut dire que la Fecafoot, Mtn, tous mes partenaires peuvent me réveiller à minuit pour un problème ponctuel, je ne vais pas hésiter pour le faire. Je vais me réveiller pour le faire puisque je me bats pour avoir le marché et ça me fait un réel plaisir mettre mon savoir-faire au service de mon pays. Et puis, je ne me plains jamais pour avoir le boulot, plus il y en a, mieux je me porte. Ma force c’est que je mets beaucoup de sérieux dans tout ce que je fais. Je rentre moi-même au pays pour faire les transferts des logos de Mtn parce que la partie visible de leur investissement c’est leur logo. Je m’assure personnellement que la charte graphique est au top. Les clubs voient comment ça se passe ailleurs à la télé et ils veulent être aussi habillés comme tous les autres. Bref, j’essaye de donner le meilleur pour que nos clubs aient des équipements de haut niveau.
Camfoot.com: Avez-vous la conviction que les clubs du championnat sont mieux habillés aujourd’hui qu’avant l’arrivée de Mtn?
Jean Paul Foundjio : Quand vous regardez le championnat du Cameroun, à part les infrastructures qui ne sont pas bonnes du tout, je crois le championnat du Cameroun est parmi les plus beaux en Afrique côté vestimentaire, nos arbitres y compris. Avant l’arrivée de MTN, il n’y avait personne. Les clubs devraient témoigner leur reconnaissance à cette Société. Vous avez sûrement dans vos archives les images d’avant MTN. En dehors de Tonnerre, Union, Coton et quelques rares clubs, les autres se contentaient soit de la friperie ou au mieux des grossières contrefaçons qui pullulent au pays. Aujourd’hui il n’y a plus de grands clubs, côté vestimentaire.
Camfoot.com: On observe néanmoins des équipes avec des maillots et shorts dont les numéros et noms sont cachés. Une explication?
Jean Paul Foundjio : Jusqu’en 2008, les équipes recevaient des jeux de maillots shorts numérotés de 1 à 30 et l’on pouvait attribuer n’importe quel numéro aux joueurs le jour de match. À compter de cette saison, les maillots sont personnalisés et les numéros attribués par la FECAFOOT en même temps que les licences. La plupart des équipes ont plus de 35 joueurs, et certaines comme Canon 48. Pour les joueurs classés et qui n’ont pas de maillots, les responsables de clubs utilisent d’affreux sparadraps pour masquer nom et numéro, puis utilisent le feutre pour les inscriptions. La solution est simple, les clubs doivent ramener les maillots au siège de SMART SPORTS à Douala pour des corrections gratuites. Les suppléments de maillots sont disponibles également. La FECAFOOT accepte de financer ce supplément et retiendra l’équivalent sur les subventions à venir.
Camfoot.com: Désormais les matches de la Mtn Elite One seront retransmis à la télé grâce au partenariat entre la Fecafoot et Gateway Télévision. Est-ce une occasion de vulgariser votre marque?
Jean Paul Foundjio : Maintenant que la Fecafoot a décidé de suivre les standards internationaux, vous allez remarquer que tous les maillots sont personnalisés, ça va passer à la télé. C’est d’abord une excellente nouvelle pour Mtn dont les efforts de ces dernières années vont véritablement être remarqués par monsieur Tout-le-Monde grâce au petit écran. Ça va aussi vous faciliter la tâche à vous les journalistes. Parce que parfois quand un joueur marque un but, vous retenez le numéro et vous allez chercher dans la feuille de match pour savoir qui est ce joueur, c’est archaïque tout ça. Maintenant vous avez le nom et le numéro du joueur directement derrière le maillot et ça fait beau et çà aussi c’est grâce au professionnalisme dont la Fecafoot fait montre ses derniers temps.
Camfoot.com: Bamboutos de Mbouda, l’équipe de votre village est toujours dans l’impasse qu’est ce que ça vous fait ?
Jean Paul Foundjio : Je ne sais pas, l’histoire de Bamboutos est trop compliquée, dès qu’il y a une petite porte de sortie elle se referme aussi tôt. Bamboutos est victime de son ancien président qui a manqué de respect envers le club et envers le président de la Fecafoot. Je n’ai pas compris son attitude… Les responsables de Bamboutos ne veulent pas affilier l’équipe en d2 régionale et préfèrent attendre l’issue de la procédure judiciaire en cours. C’est dommage, car en attendant l’équipe n’évolue nulle part.
Camfoot.com: Une situation qui a laissé un vide que vous avez comblé en créant Olympique Mangwa de Mbouda ?
Jean Paul Foundjio : Olympique Mangwa Foot est pour l’instant le porte-étendard du département. Les Élites du département viennent d’ailleurs de décider de soutenir Manga Foot jusqu’en Elite One. Si entre temps Bamboutos refait surface, notre ville, comme Douala, Yaoundé aura deux bonnes équipes. La population soutient massivement Mangwa Foot qui soit dit en passant n’a pas été créé pour remplacer Bamboutos. J’ai dépensé beaucoup d’argent, j’ai recruté de très bons garçons, j’ai acheté un mini bus pour les amener au stade. Les enfants sont logés, nourris, ils sont dans de bonnes conditions, ils ont des compléments alimentaires. Ça veut dire que si on s’occupe des jeunes, ils peuvent faire de très bonnes choses. En 4 mois, ils sont arrivés jusqu’à la finale de la ligue de l’Ouest (ancienne D2). On a failli représenter la province au tournoi pour la montée en Mtn Elite Two. Mais le problème qui s’est passé c’est que, Racing de Bafoussam a usé d’intimidation, ils ont amené les repris de justice au stade pour intimider les officiels. Ils ont même séquestré mes joueurs au stade pendant deux heures de temps, n’eut été l’intervention des forces de l’ordre, je ne sais pas qu’est-ce qui serait advenu.
Camfoot.com: Pour la saison qui commence le 24 janvier prochain, à quoi peut-on s’attendre de votre club ?
Jean Paul Foundjio : Pour cette année, nous avons effectué de bons recrutements, des bons gars que je vais salarier à Mbouda. J’ai fait venir des grandes villes (surtout Douala) une dizaine de bons joueurs ; ils sont logés, ils ont des salaires mensuels, ce ne sera pas un gros salaire, mais ils auront le minimum pour vivre. Nous serions certainement les seuls en troisième division à salarier les joueurs. Je vais leur donner les outils pour s’exprimer, et après c’est à eux qui veulent faire du football leur métier de prouver, je vais assurer. Mais je peux vous dire que cette année ce sera très chaud dans l’Ouest.
Camfoot.com: Peut-on dire que les joueurs de l’équipementier sont à l’abri des problèmes d’équipements sportifs?
Jean Paul Foundjio : (Rires) Je ne peux pas être un tailleur et mes enfants marchent nus. Vous allez remarquer que Olympique Mangwa sera l’équipe la mieux habillée du pays, ils n’auront rien à envier aux équipes de la Mtn Elite One. En plus de la marque maison Smart, je ne vous cacherai pas que je suis le représentant de Umbro au Cameroun, et le directeur de Umbro France a été sensible à ma démarche et va aussi habiller mes jeunes. Ils seront gâtés, ils seront à la mode ; chaque joueur aura un ballon, le matériel didactique est là, un parcourt d’oxygénation est balisé en montagne pour le conditionnement, un Gymnase à leur disposition et le nouveau stade sera bientôt à leur disposition. S’ils ne réussissent pas, c’est que ce n’est vraiment pas leur métier ou alors nous avons effectué un mauvais casting des joueurs.
Camfoot.com: Parlant de stade, où en est-on avec la réception du stade de Mbouda dont les travaux sont achevés depuis des mois ?
Jean Paul Foundjio : La réception du stade est prévue pour la fin Janvier, mais avant cela les maîtres d’œuvre, (MTN et FECAFOOT), envisagent une visite des lieux le 17 courant en compagnie des autorités traditionnelles, administratives et politiques. Je pense que le premier match de championnat aura lieu dès l’inauguration dans la mesure où le championnat régional de l’Ouest démarre le 24 Janvier.
Camfoot.com: La réalisation de cette infrastructure unifie-t-elle finalement toutes les forces vives de la région ?
Jean Paul Foundjio : Cette infrastructure est un vecteur de développement pour la ville de Mbouda et un produit d’appel pour les touristes. Imaginez une rencontre DSCHANG VS BAHAM. Ce sont 5000 spectateurs venus d’ailleurs, 5000 personnes à transporter, 5000 bouches à nourrir, etc. Si chacun ne dépense que 1 000 FCFA, c’est tout de même 5 000 000 f injectés dans l’économie de cette ville et surtout quand on sait que la majorité des transporteurs au Cameroun sont Mbouda. A la demande du Président IYA, j’ai eu le plaisir d’équipé ce stade avec du matériel hi-tech : une brouette traceuse, une tondeuse thermique, des buts avec perches arrières, les mêmes abris de touches qu’au stade de France et tout ceci aux couleurs du Sponsor MTN.
Camfoot.com: Il y a 12 mois, vous ouvriez les portes de votre gymnase à Mbouda, comment il se porte ?
Jean Paul Foundjio : Le gymnase est fonctionnel, c’était un complexe tout nouveau genre au Cameroun ; il y a un restaurant, il y a une salle de spectacle, il y a un ring, il y a un tatami, il y a des chambres. Il a fallu que je trouve du temps pour m’en occuper, malheureusement je n’en ai pas beaucoup, j’ai dû faire avec le personnel local qui n’ai pas qualifié, donc ils sont en formation. Mais on arrive à atteindre quand même le seuil de rentabilité, ce n’est déjà pas mal pour une activité qui a démarré il y a juste un an. Tout n’était pas encore actionné, là le Vsat commence à fonctionner, la téléphonie à l’international ça fonctionne, le restaurant, ça tourne bien, pratiquement tous les mariages de la ville se font s’y font, l’orchestre olympique que j’ai monté joue tous les week-ends et c’est une belle ambiance que les visiteurs apprécient.
Nous proposons actuellement aux clubs qui vont venir jouer à l’ouest pour 150.000 Frs CFA je pourrais loger une équipe de 25 personnes avec trois buffets, c’est-à-dire qu’une équipe qui arrive pour 150.000 Frs CFA elle aura trois buffets, un le matin, un à midi et un autre le soir et une nuitée. En pension complète une équipe ne paye que 150.000 Frs CFA avec accès à toutes les commodités, avec accès au net, à la salle de machine, au spectacle, c’est un milieu convivial. Union de Douala s’y est intéressée lors de son séjour dans l’ouest pour leur match à Bafoussam (face à Fovu) et à Dschang contre Aigle. Les week-ends, beaucoup de personnes quittent Bafoussam pour venir se restaurer à Mbouda, assister au spectacle en life. Récemment on y a organisé des spectacles, dont un festival du Bikutsi où les gens on pu voir Aïe Jo Mamadou, Lady Ponce, tout ce qui compte de beau en bikutsi est descendu à Mbouda.
Camfoot.com: Que vous inspire l’éternel conflit entre le Minsep et la Fecafoot, et quel impact sur votre travail équipementier et de président de club?
Jean Paul Foundjio : Pendant que le Ministre et le Président de la FECAFOOT refusent de se serrer la main, les adversaires du Cameroun se frottent les leurs en souhaitant que cela aboutisse à la disqualification de notre pays par la FIFA. Il doit bien exister quelque par des textes qui réglementent leurs relations et qui définissent clairement les rôles, pourquoi ne s’en inspirent-ils pas? Vous avez bien constaté la chaîne de désagrément dû au malentendu qui a provoqué le report du démarrage du championnat. Tout le monde a payé cash, des clubs jusqu’aux médias, en plus des joueurs et des spectateurs. Comme Camerounais vivant à l’étranger ce n’est pas un bon exemple pour l’image du pays. Je souhaite sincèrement que nos frères mettent de côté les considérations personnelles et œuvrent ensemble pour l’intérêt général.
Camfoot.com: Votre mot de Fin?
Jean Paul Foundjio : Ce sera celui de l’équipementier, car c’est le plus important. Smart investi pour le sport pratiqué ici. Vous avez vu la qualité de marquage des maillots fait cette année. Nous avons acheté deux ‘’ ploter ‘’ de découpe, nous sommes entrain d’acheter une grosse machine d’imprimerie de façon à ce que tout le marquage que je traite souvent en France avant le transfert, soit fait ici au Cameroun. Nous allons investir environ 25 millions pour que ça se passe désormais totalement au Cameroun. Avec un personnel bien qualifié, le public peut être rassuré d’avoir la grande qualité et que nos clubs seront toujours au top au niveau vestimentaire. Merci de m’avoir tendu votre micro et Bonne année à tous vos lecteurs.
Entretien mené par Guy Nsigué à Yaoundé