Iya Mohammed, président de la Fédération camerounaise de football: « Notre parcours est plus qu’honorable puisque nous sommes classés deuxième, là où personne ne nous attendait. Nous sommes doublement satisfaits parce que d’abord nous sommes vice-champion, ensuite et surtout parce que le tournoi nous a permis de découvrir de nouveaux jeunes talents à l’instar d’Alexandre Song, Stéphane Mbia et Jules Augustin Binya »
Quelle appréciation faites-vous du parcours du Cameroun au Ghana ?
Notre parcours est plus qu’honorable puisque nous sommes classés deuxième, là où personne ne nous attendait. Nous sommes doublement satisfaits parce que d’abord nous sommes vice-champion, ensuite et surtout parce que le tournoi nous a permis de découvrir de nouveaux jeunes talents à l’instar d’Alexandre Song, Stéphane Mbia et Jules Augustin Binya. Ces jeunes, s’ils sont bien suivis et encadrés, assureront la relève.
Avant cette CAN, on a décrié une préparation bâclée de l’équipe du Cameroun. A votre avis, ces critiques sont-elles fondées ?
Je vous concède que la préparation pour cette CAN a laissé à désirer, Il y avait deux défaillances, d’un, l’entraîneur a été recruté avec beaucoup de retard et de deux, il manquait à l’équipe des matches amicaux. Mais la FECAFOOT n’est pas responsable de cette situation. En ce qui concerne les matches amicaux, la Fédération a voulu que les Lions prennent part du 17 au 21 novembre 2007 au tournoi des quatre nations à Accra. Ce tournoi regroupait quatre anciens champions de la CAN. Malheureusement, la tutelle n’a pas marqué son accord. Le match contre le Japon s’est relativement bien passé et celui de Vigo a été saboté par certaines personnes et boycotté par certains joueurs sur l’instigation de certains encadreurs techniques de l’équipe nationale. S’agissant de l’entraîneur, la FECAFOOT a tiré la sonnette d’alarme depuis le mois de mai 2007 et proposé une liste d’entraîneurs à la tutelle qui avait répondu à l’époque que ce n’était pas une priorité. Nous ne savions pas alors que le ministre avait déjà porté son choix sur M. Otto Pfister bien avant les directives du président de la République et bien avant le travail de la Commission paritaire FECAFOOT/MINSEP. Comment voulez-vous donc avoir une bonne préparation dans cet environnement flou où on ne veut pas reconnaître à la fédération son rôle le plus élémentaire qui est celui selon la loi N° 96/09 du 05 août 1996, de constituer les sélections nationales et de les gérer.
Malgré la finale disputée par le Cameroun, de nombreuses insuffisances (préparation, discipline interne, encadrement technique…) ont été relevées. Et la Fécafoot a été pointée du doigt…
Je ne vois pas en quoi la Fédération a failli. Au Ghana beaucoup de défaillances ont été constatées au niveau du Comité local d’organisation (LOC). Il y a eu des problèmes réels relatifs à la sécurité, aux terrains d’entraînement, à la billetterie, à l’accréditation etc. La Fécafoot a tant bien que mal suite à son intervention auprès de la CAF, résolu certains problèmes. D’autres problèmes comme celui du refus de l’hôtel ALISA, est un faux problème que nous-mêmes, avons inutilement créés. S’agissant des problèmes de discipline interne, ils sont du domaine du directeur administratif qui est nommé par le Ministre (encore une autre anomalie). Quand certains joueurs ont été suspendus par le ministre, on nous a simplement transmis la copie pour informer les intéressés. Voilà à quoi on veut réduire le rôle de la Fédération. Quant à l’encadrement technique, celui-ci obéit uniquement à monsieur le ministre et à ses collaborateurs. L’encadrement ne comprend pas certains de ses devoirs et obligations à ce niveau de compétition. Il a fallu par exemple les contraindre à accepter la tenue de conférences de presse et ouvrir au moins une séance d’entraînement aux journalistes accrédités etc. Je ne souhaite pas faire d’autres commentaires, j’ai simplement remarqué lors de notre séjour, le rôle prépondérant de certains joueurs sur le choix des onze entrants. Ce sont les joueurs qui ont, en fait, imposé leurs choix technique et tactique à l’encadrement technique.
L’opinion s’interroge d’ores et déjà sur l’avenir et la coupe du monde 2010, Comment entrevoyez-vous cet important rendez-vous ?
Pour préparer la Coupe du monde et la CAN 2010, nous allons saisir l’encadrement technique afin qu’il nous communique son programme, notamment en ce qui concerne les matchs amicaux en vue de les dispositions pour les organiser en espérant qu’on nous laissera les mains libres. S’agissant de l’avenir, je crains qu’il soit sombre si nous continuons à poursuivre la politique actuelle qui consiste à dépenser de l’argent uniquement sur les Lions Indomptables. Est-il normal de donner à un seul joueur 50 millions de FCFA pour avoir atteint la finale de la CAN et 100 millions à un seul entraîneur et de n’apporter aucune assistance (même pas d’un seul franc) aux équipes de jeunes (U-17 et U20) et aux clubs ? Dans ces conditions, peut-on espérer une bonne relève des Lions Indomptables et exiger que nos clubs soient champions d’Afrique ? Je regrette de constater que la tutelle ne se soucie pas du football des jeunes. Ce football à la base qui doit constituer la pépinière des Lions Indomptables.
Faisons un calcul simple, les primes de deux Lions Indomptables plus deux entraîneurs valent 300 millions de FCFA, de quoi organiser convenablement le championnat national U-17 au Cameroun. Tant que nous poursuivrons la politique actuelle, il sera difficile d’envisager l’avenir avec sérénité.
La bonne santé de l’équipe nationale de football est également liée à l’harmonie des rapports entre la Fédération camerounaise de football et la tutelle…
C’est juste. L’harmonie entre la Fédération et la tutelle est nécessaire pour la réussite des Lions Indomptables et Dieu sait que nous avons tout tenté pour entretenir des relations correctes et cordiales avec la tutelle en cooptant des fonctionnaires du Ministère dans notre organe exécutif, en signant des conventions avec la tutelle etc. Mais aucun retour d’ascenseur n’a été remarqué de la part de la tutelle. Un projet commun en tant que tel n’existe pas mais nous savons que les deux parties ont les mêmes objectifs à savoir remporter la CAN 2010 et qualifier les Lions pour la phase finale de la prochaine Coupe du Monde. Nous n’atteindrons cet objectif que si chaque partie joue son rôle et rien que son rôle tel que défini par la loi de 1996.
Simon Pierre ETOUNDI