Gilles Hugon. L’ancien entraîneur des Astres de Douala explique sa démission par le fait qu’il était « de plus en plus en désaccord avec ce qui se passait au club ».
Pourquoi avez-vous quitté Les Astres de Douala?
J’ai démissionné principalement parce que j’estime que les moyens mis à la disposition du staff technique sont trop insuffisants pour atteindre les objectifs élevés du club.
Quand un club veut atteindre les poules de la Champions League, être champion et gagner la Coupe, il doit répondre positivement aux demandes du staff pour un stage bloqué d’une semaine en période de préparation ou l’utilisation, 1 à 2 fois par semaine, d’une salle de musculation (sans parler du minimum vital qui est d’assurer le paiement des salaires des joueurs en temps et en heure ou de fournir aux coaches locaux un chrono et un sifflet).
La 2ème raison est que les dirigeants des Astres FC veulent imposer leur avis dans le domaine technique (nombre de joueurs dans le groupe, système de jeu….). J’ai constaté que ça se passait comme ça dans de nombreux clubs, ici, mais pour moi, c’est totalement inacceptable.
Par exemple : Je dis depuis le mois de mai que, pour bien travailler à l’entraînement, il faut arrêter d’avoir un trop grand nombre de joueurs (34), mais avoir un groupe pro composé de 25 joueurs maximum (dont 10 juniors) et un groupe composé de juniors (tous avec une licence de surclassement, et qui viendraient palier les blessés ou les suspendus). Pour ne pas que les joueurs ne partent pas, il faut simplement bien payer 25 joueurs plutôt que mal payer 36 joueurs. De plus, ils joueraient plus souvent et les coachs auraient à leur disposition tous les meilleurs joueurs. Les dirigeants s’opposent à ça et m’imposent le nombre de joueurs à garder !
Un responsable des Astres a avancé des raisons « de sécurité et de santé » pour expliquer votre départ surprise. Est-ce exact?
Non, c’est faux ! Ma santé était bonne, mis à part la fatigue morale due aux soucis suite aux désaccords avec les dirigeants lors de nos multiples réunions.
Et question sécurité, bien que les spectateurs aient été insultants et menaçants à l’encontre du staff, il n’y a jamais eu d’agression physique, comme l’a injustement écrit un de vos confrères.
Le même responsable dit que vous avez « développé des crises personnelles ». Quel était votre état d’esprit lors de vos derniers jours à Astres ?
Je ne sais pas ce que ce responsable appelle des crises personnelles. Ce que je peux dire, c’est que j’étais de plus en plus en désaccord avec ce qu’il se passait au club. Les coachs, au Cameroun, pensent qu’il faut plaire aux dirigeants et tout accepter, mais si les résultats sont mauvais, ce sont ces mêmes coachs qui sont virés ! Ici, les dirigeants n’ont pas l’habitude qu’on les contredise et quand on insiste pour faire passer une idée dans l’intérêt de l’équipe, on est traité de têtu ou de caractériel. Mais je ne suis pas une marionnette qu’on manipule. Je n’étais plus d’accord sur la manière de procéder et je leur disais mon mécontentement et ma désapprobation, tout simplement !
Au début du tournoi de l’Amitié, vous avez eu une altercation avec Justin Kamgué. Quels étaient vos rapports avec cet adjoint ?
J’avais déjà oublié cette anecdote, qui était une incompréhension due à un papier de remplacement. Mes rapports avec mon adjoint étaient à la fois professionnels et amicaux. C’est un coach que j’apprécie beaucoup, il est compétent et humble. On a déjà travaillé ensemble à Mount Cameroon de Buea et nous nous entendions bien.
Avez-vous l’intention de revenir prochainement au Cameroun ?
Prochainement, je ne pense pas, même si, en signant dans ce club, j’avais envie de m’installer durablement ici et que j’ai des joueurs et des amis que j’aimerais revoir. Mais, dans quelque temps, peut-être que le destin me ramènera à Douala.
Quel souvenir garderez-vous de votre expérience d’un an aux Astres ?
Je garderai en tête les sourires et les efforts de nos joueurs à l’entraînement, malgré les difficultés. Je me souviendrai de la joie des juniors après le titre de champion.
Et, malheureusement, je garderai aussi un goût d’inachevé, en ce qui concerne le projet que je voulais mettre en place. De toute évidence, ce projet incluant un centre d’entraînement et une académie de football n’était pas applicable ici et maintenant.
Quelles leçons aussi en tirerez-vous ?
J’ai appris à être très méfiant, je ne me contenterai plus d’un accord de principe ou d’une parole donnée. Côté football, j’aurais aimé pouvoir retenir ou apprendre quelque chose, mais, malheureusement, ça n’a pas été le cas.
Propos recueillis (via internet) par Pierre Arnaud Ntchapda