Samuel Eto’o s’est confié à notre rédaction. Il se fixe le cap de la CM2014 en équipe nationale. Après, tel qu’il l’exprime, cela dépendra des autres. Avant cela, il souhaite être de toutes les batailles avec l’équipe du Cameroun.
Quelle est l’ambition du Cameroun dans sa poule des éliminatoires Can 2012 maintenant qu’on est deuxième. Devrions-nous au moins sécuriser l’une des trois places de meilleurs deuxième ?
Avec tout le respect que je dois au peuple sénégalais, et tout humblement, je n’ai jamais eu peur d’un match et ce match ne me fait pas peur. Au contraire, c’est un grand match, c’est un match que tout le monde attend, nous irons tout humblement à Dakar pour essayer de faire la meilleure prestation possible. Mais avant d’aller à Dakar, il ne faut pas qu’on tombe sur les erreurs de 2010 ou de 2009.
Il faut qu’on ait une équipe, il faut qu’avant d’aller à Dakar qu’on sache qu’on a la meilleure équipe. C’est ça le défi du Cameroun aussi. Avoir ses meilleurs enfants, ensuite que ces enfants aient envie de jouer ensemble, d’être ensemble. Je suis convaincu que si tous ces enfants regardent dans la même direction, vraiment nous n’aurions pas beaucoup de problèmes.
Quand vous voyez aujourd’hui que pas mal de braves fils de notre pays dominent les grands européens, même les joueurs sénégalais dominent aussi certains grands clubs européens, je souhaiterais avoir les meilleurs éléments, la meilleure équipe. Je crois que le résultat suivra. On travaille pour ça.
Seul je ne peux rien faire, j’ai besoin des journalistes. Je crois que tous les débats qui ont été crées à tord ou à raison, je crois à tord, je souhaite que cela cesse et que 2011 nous apporte ce qu’on veut, l’union. On veut avancer, j’aimerais arriver en pleine forme jusqu’au mondial 2014. Après le mondial, nous verrons si je continue dans notre équipe nationale. Vous aurez la décision de dire si Samuel continue ou pas.
Moi, je veux arriver au prochain mondial en étant bien, physiquement. Après je rentrerais dans une phase de ma vie où je ne pourrais plus trop
voyager. Mais la décision vous reviendra parce que vous êtes au dessus de moi et je ne peux que me plier à la volonté de mon peuple. Mais à 33 ans, je pense que j’aurais déjà tout donner et ça me fera 17 ans à l’équipe nationale. C’est plusieurs années, c’est plusieurs kilomètres. Les trois ans qui nous séparent de la coupe du monde, je peux encore courir, je peux encore marquer les buts, mais j’ai besoin des meilleurs éléments pour le faire.
Qu’est ce que cela te fait de recevoir une lettre du Chef de l’État?
Mon devoir c’est de dire, Samuel tu as tout gagné merci. Mais notre pays a besoin de toi. Quand j’ai eu la chance de lire cette lettre, j’étais très ému mais en même temps c’était comme tiré un cinquième penalty qui vous donne la victoire en coupe du monde. Votre cœur bat fort, vous ne sentez même plus vos jambes pour pouvoir tirer ce penalty. J’ai beaucoup d’expérience dans le football, je sais souvent gérer ces émotions mais avec la lettre du chef de l’état, l’émotion était forte.
Je crois que avec l’aide des uns et des autres et surtout avec l’aide de la Fecafoot qui est responsable du football camerounais, parce que il ne faut plus qu’il y ait plusieurs voies, c’est la fédération qui est responsable de l’équipe nationale du Cameroun, à partir de là quand on a un patron on a des idées claires, et le capitaine ne peut que suivre que ce patron et son équipe.
Aujourd’hui, l’impression qu’on a c’est que, la fédération joue son rôle, le capitaine suit, les joueurs suivent, on a évidement certains frères qui ne sont pas là et qui doivent être là. On a besoin de tous ces frères, ceux qui méritent d’être là, et ceux qui veulent être à l’équipe nationale, qu’ils y soient mais avec le cœur pur.
Lorsqu’on a gagné autant de titres comme vous est ce qu’on a encore faim ?
Quand on a gagné, on veut toujours gagner. Je ferais mes comptes plus tard. Il y a un jeune camerounais qui me rappelait au Caire après le quatrième ballon d’or. Il me disait, Samuel on a l’impression que ce quatrième ballon d’or ne te dit rien. Je dis non. Il est même plus important que le premier parce que là il n’y a plus débat. C’est vrai, là, il n’y a plus débat. Ce ballon d’or permet d’occuper un rang, mais ce n’est pas Eto’o, c’est notre pays. Quand on dira quel est le premier footballeur africain à avoir quatre ballons d’or, on dira c’est Eto’o et il est de quelle nationalité, on dira camerounaise. Cela nous concerne tous et j’espère que Dieu et mes coéquipiers me permettront d’avoir le cinquième ballon d’or. Je me sens bien physiquement après mon adaptation difficile même si j’ai gagné beaucoup de titres avec l’Inter, je compte prendre beaucoup de plaisir avec l’Inter jusqu’à la fin de mon contrat. J’ai encore trois ans de contrat.
Que se passe t-il à l’Inter de Milan ?
Vous savez comme tout grand club, j’ai vécu cette situation après notre brillante saison 2006 avec Barcelone, ou on a plongé dans une vague de mauvais résultats. Ça peut arriver à un club. Ça arrive à l’Inter aujourd’hui, j’espère que les mésaventures qu’on a connues avec les blessures où à chaque mach on perdait un joueur, s’arrêteront à la reprise.
Dans le journal Afrique Magazine, vous avez dit je ne digérerais jamais la coupe du monde. Est ce que avec la lettre du chef de l’état, elle passera mieux ?
Je ne pourrais jamais oublier cette mauvaise aventure de la dernière coupe du monde. C’est un cauchemar pour moi, je pense que c’est un cauchemar pour tous les camerounais, parce que avec l’équipe qu’on avait en coupe du monde on ne méritait pas ce résultat. On ne le méritait pas parce qu’on n’a pas joué et c’est ce qui est décevant. Si on avait joué, si on s’était battu et on avait perdu parce que les adversaires étaient plus forts que nous, alors on aurait dit il y a eu plus fort que nous. Il n y a pas eu plus fort que nous. On n’a pas joué. À partir de là, c’est difficile d’oublier, même si au passage la lettre de son Excellence monsieur Paul Biya, les trophées que j’ai gagnés apportent un peu de sourire, mais mon rêve était de faire de cette coupe du monde en Afrique un événement unique. On est passé à coté.
Vous avez dit indirectement que vous êtes prêts à aller rencontrer les supposés bannis. Est ce que vous pouvez nous dire ici et maintenant que vous êtes prêts à aller rencontrer les joueurs mis de côté après la dernière coupe du monde ?
Je n’appellerai pas les frères qui ne sont pas à l’équipe nationale les bannis. Les encadreurs sont là pour faire leur boulot, les gens ont pris le temps pour réfléchir sur ce qui n’a pas marché, sur ce qui a marché, comment nous pouvons faire ceci, comment nous pouvons faire cela. Je pense que si vous jouez en club et vous êtes meilleurs, vous venez à l’équipe nationale et vous êtes disciplinés, alors vous avez votre place. Mais par contre, même si c’est mon père Roger Milla qui revenait à l’équipe nationale et qui fait le désordre, je serais contre Roger. Je m’opposerais à tous ceux qui mettent le désordre à l’équipe nationale. Je ne me cache pas, je n’ai plus l’âge de dire des demi phrases. Je suis l’ainé de ces jeunes. Au dessus de moi, j’ai des patrons à qui je dois rendre compte. Au dessus de moi, il y a la Fecafoot à qui je dois rendre compte. La Fecafoot qui nous apporte tout le soutien donc on a besoin, à mon tour je dois jouer mon rôle. Je veux avoir tous les jeunes camerounais qui peuvent jouer à l’équipe nationale mais qui se plient aux règles de discipline de l’équipe nationale. Ça par contre, moi Samuel, je ne négocie pas. Maintenant j’ai des patrons, si eux ils négocient sur la discipline, ils vont prendre leur responsabilité.
Votre parcours est dense. Réalises-tu ce que tu as fait jusqu’ici ?
Un rêve reste un rêve et je suis dans mon rêve. Quand je vais arrêter ma carrière, j’aurais le temps de réaliser comment était mon rêve.
Est-ce possible pour l’Inter et toi, de remporter un des titres en jeu cette année ?
Après mon adaptation qui a été vraiment difficile, il m’a fallu beaucoup de temps pour m’adapter à la vie italienne, à la mentalité des Italiens. Aujourd’hui je retrouve cette joie de vivre que j’avais à Barcelone, et ça vous pouvez le voir dans les stades. Je prends beaucoup de plaisir. J’espère marquer beaucoup de buts cette saison. Au delà de tout, j’espère surtout qu’après un mauvais départ de l’Inter, nous reviendrons sur le Milan pour gagner ce championnat. C’est un défi personnel. Je pense que l’Inter est la meilleure équipe du championnat Italien. On a eu des difficultés même si on est à 10 points avec deux matches en retard. C’est jouable. Le pari est important et j’aimerai prendre un peu de plaisir et voler cette victoire aux Milanais.
On vous annonce du côté du Real de Madrid. Est-ce possible après tout le lourd passé entre vous ?
En football les choses vont tellement vite qu’on n’a pas le temps de se rendre compte. Si jamais, quelque chose se développe avec le Real vous serez les premiers à le savoir. Je ne peux en dire plus.
Propos recueillis par Guy Nsigué