Au cours d’une interview accordée à l’émission Téléfoot, Samuel Eto’o confie ce qui s’est réellement passé lors de la Coupe du monde 2010. Le Camerounais évoque aussi l’Inter, le Barça et le Bayern.
Samuel Eto’o ne manie pas la langue de bois. Le joueur camerounais de l’Inter Milan évoque avec franchise dans Telefoot divers sujets tels que la Coupe du monde 2010, le Barça, l’Inter, ou le Bayern.
La fabuleuse saison 2010 de l’Inter
« Qui aurait cru lors de mon arrivée à l’Inter que nous gagnerions cinq titres à la fin de l’année ? Personne ! Il y a eu beaucoup de difficultés aussi, mais au final, nos sommes tous heureux. »
Son départ du Barça et son arrivée à l’Inter
« Je suis parti du Barça contraint et forcé, à ma grande surprise. Ensuite des clubs se sont manifestés, j’ai même failli rejoindre un autre club avant l’Inter. Finalement je me suis retrouvé à l’Inter où j’ai bien commencé, avant que le fameux temps d’adaptation ne me rattrape. J’ai même dû aller sur le banc de touche pendant un mois. En dix ans de carrière ça ne m’était jamais arrivé ! J’ai essayé de donner ce que je pouvais jusqu’au jour où cette situation est devenue insupportable. J’en ai discuté avec José Mourinho et il m’a dit franchement ce qu’il attendait de moi. Il m’a mis titulaire à Catane et m’a dit ‘Maintenant je sais que l’on peut tout gagner, parce que j’ai le joueur qui me manquait’. Et comme par miracle, on a tout gagné. J’ai joué à un poste qui n’était pas le mien mais j’étais heureux de le faire et je ne pouvais que le faire après le discours que Mourinho m’avait tenu. Avoir beaucoup plus de responsabilités tout en ne jouant pas à mon poste, c’était parfois compliqué, mais j’ai donné le maximum à chaque match. »
Une petite revanche après son départ du Barça ?
« Je n’étais pas dans cette optique là, mais comme on dit en Côte d’Ivoire ‘le Bon Dieu a fait mon palabre’. »
Messi Ballon d’or
« Ce n’est pas une surprise car Leo est le joueur en activité qui est au-dessus des autres mais au vu de l’année dernière il y avait d’autres options comme Iniesta, Xavi, ou Wesley (Sneijder). Beaucoup attendaient quelqu’un d’autre, mais quand on parle du football moderne, Leo, s’il n’est pas le meilleur, il est parmi les deux meilleurs au monde. J’ai voté pour Leo, je ne sais plus si c’était pour la première ou la deuxième place, mais j’ai voté pour lui. Je l’ai vu grandir, j’ai eu la chance de le côtoyer en tant qu’homme et c’est quelqu’un de bien qui mérite tout ce qui lui arrive. »
Pronostic sur Barça-Arsenal
« J’adore Arsène Wenger et Arsenal où j’ai failli jouer il y a quelques années, j’ai des coéquipiers de sélection à Arsenal et je souhaite vraiment qu’ils aillent le plus loin possible dans cette compétition. Mais je supporte le Barça car j’ai connu l’une des plus belles périodes de ma carrière là-bas et j’y ai plein de copains. Je souhaite un beau match mais je supporterai le Barça. »
La Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud
« Je ne pense pas pouvoir digérer cette Coupe du monde. Je continuerai à jouer au football, je continuerai à avancer dans ma vie, mais cette Coupe du monde me restera toujours en travers de la gorge. Peut-être ai-je vu plus loin que pas mal de gens, peut-être que j’y ai plus cru que d’autres, je ne sais pas. En tout cas je n’aurai de cesse de demander pardon au peuple camerounais. Sans rentrer dans les détails sur qui a fait quoi, nous nous sommes rendus en Afrique du Sud pour jouer au football, et je crois que nous ne l’avons pas fait. Le résultat est là. C’est dommage car nous avions vraiment une équipe pour mieux représenter notre pays et surtout notre continent. Nous, joueurs, sommes les grands perdants car nous avons perdu quatre ans de nos vies, et ces quatre années, nous ne pourrons jamais les récupérer. »
L’arrêt de sa carrière internationale, une rumeur ?
« J’avais pris la décision d’arrêter. Ce qui s’est passé pendant mais surtout après la Coupe du monde m’a fait me demander dans quel monde vivons-nous. On m’a accusé de tout, on a tout dit sur moi, mais Dieu seul sait ce que j’ai voulu apporter à mon pays et à mon continent. Je l’ai fait car je pensais et je pense que mon pays le mérite, qu’il fallait faire ces efforts, et si c’était à refaire, je le referais. Il y a eu de la malhonnêteté de la part de certaines personnes. Je ne sais pas si je suis un grand joueur, mais je sais que j’ai une belle carrière, je le dis humblement. J’ai joué avec des grands joueurs et ça s’est toujours bien passé. J’ai toujours eu de bons résultats partout où je suis passé. J’était capitaine à 19 ans à Majorque. J’ai gagné avec Majorque, j’ai gagné avec Barcelone qui n’arrivait pas à remporter de titre malgré le grand Ronaldinho, j’ai gagné avec l’Inter… Je sais ce que c’est de gagner et comment y parvenir. Donc à ceux qui ont voulu me faire passer pour celui qui a gâché la Coupe du monde, je réponds que j’avais tout à gagner sur cette Coupe du monde. Je crois qu’après la saison que j’avais faite, en atteignant simplement les quarts de finale, j’aurais peut-être été Ballon d’or. »
« Je rêvais de la gagner, car cette Coupe du monde était vraiment ouverte. Je l’avais dit à Didier Drogba quand il s’est blessé. Je lui ai dit ‘mon frère, même si tu joues sur une jambe, tu dois être en Afrique du Sud, nous avons le devoir d’être là. C’est la Coupe du monde des Africains’. »
Le départ de Paul Le Guen
« Je pense que les dirigeants ont pris leur décision trop tôt, sans vraiment la mûrir, sous la pression du public. Mais si on réfléchit on se rend compte qu’avant Paul Le Guen, le Cameroun était dernier de son groupe de qualification. Le match à Yaoundé face au Gabon est un des plus beaux que la sélection ait joué. Alors expliquez-moi comment cette équipe qui jouait si bien en qualification, dont Le Guen était sélectionneur et moi le capitaine, a eu des problèmes pendant la CAN puis la Coupe du monde ? Je pense que Paul connaissait très bien cette équipe, il avait identifié les problèmes et on aurait pu le laisser continuer son travail. Ainsi on aurait eu une équipe avec un sélectionneur qui connaît bien tous les problèmes internes. Même si je suis heureux de travailler avec Javier Clemente, cette décision a été prise trop tôt. »
Le départ de Mourinho
« Je l’ai vécu avec beaucoup de tristesse. Nous avions réalisé une grande année et voulions remettre ça. Après l’annonce de son départ j’ai discuté avec lui mais pas de cela car il voulait déconnecter. Je sentais quand même qu’il était motivé pour ce nouveau défi qui s’était présenté, et comme il adore les défis. Le problème c’est qu’en face de lui il a peut-être le plus grand Barcelone de tous les temps, donc c’est compliqué mais jusqu’ici il est encore en course dans les trois compétitions et j’espère qu’il ira jusqu’au bout. »
Le choix du Real Madrid
« Même si je n’ai pas pu y jouer, c’est le Real Madrid qui m’a permis de venir en Europe. Ils m’ont donné la possibilité de rêver. »
Rafa Benitez à l’Inter
« Tout ne s’est pas mal passé, il a quand même gagné deux titres en cinq mois. Malgré tout ce qu’on peut dire, il a gagné. Maintenant nous sommes avec Leonardo, qui parle toutes les langues, qui comprend les problèmes des joueurs. »
Leonardo
« Il nous comprend. Le footballeur veut s’entraîner peu et jouer tous les matches ! Leo a toujours le discours approprié. »
Le championnat avec l’Inter
« Nous ne sommes qu’à cinq points du Milan AC, et il reste le derby à jouer contre eux. Je pense que ça sera animé jusqu’à deux, trois journées de la fin. »
Le match contre le Bayern
« Le match aller ne s’est pas bien passé car nous avons perdu (0-1) mais tout est possible en sport. Même si on aura en face une très bonne équipe du Bayern avec un grand Ribéry qui a été excellent à Milan. J’espère d’ailleurs qu’il retrouvera très vite l’équipe de France. »
Sa fondation
« Le 17 j’organise un gala à Milan. Pour le cinquième anniversaire de ma fondation, mes collaborateurs et moi avons décidé d’offrir un hôpital pédiatrique à la population de Douala (Cameroun). Nous, footballeurs, ne nous rendons pas souvent compte des besoins des autres et il y a quelques années j’avais décidé d’apporter cette aide d’une manière un peu plus ordonnée. »
Propos recueillis par Sébastien Barniaud