Emportez-le partout et la chance vous sourira. Certains appellent cela « porte-bonheur », mais dans le football, cela porte un autre nom : un joueur génial. Mettez Samuel Eto’o dans votre équipe et vous êtes quasiment certain de gagner tout ce qui peut l’être. Le FC Internazionale Milano a tenté sa chance la saison dernière et n’a pas eu à le regretter. Dès la première année du Camerounais en Lombardie, les Nerazzurri ont remporté le championnat, la Coupe d’Italie et la Ligue des champions de l’UEFA. Eto’o, lui, sortait déjà du même triplé avec le FC Barcelone.
Si le club catalan avait continué sur sa lancée en remportant la Coupe du Monde des Clubs de la FIFA 2009, Eto’o était déjà parti sous les cieux italiens. Un an après, il a regagné le droit de disputer le tournoi des champions, dans lequel il entrera en lice ce mercredi 15 janvier contre Seongnam Ilhwa. Juste avant, il prend le temps de confier ses objectifs, ses ambitions et ses souvenirs de l’année 2010 au micro de FIFA.com.
Samuel, êtes-vous impatient à l’approche de vos débuts dans la Coupe du Monde des Clubs de la FIFA 2010 ?
Depuis le jour où nous avons gagné la finale de la Ligue des champions à Madrid, nous pensons à ce rendez-vous. La pression est là, mais de manière positive, car c’est toujours fantastique de disputer des compétitions de haut niveau. Maintenant, il faut savoir la gérer. Pour le moment, tout se passe bien, on s’entraîne bien, on est bien installé et on n’attend plus que de rentrer sur le terrain.
Ce sera votre deuxième Coupe du Monde en six mois après Afrique du Sud 2010. Comment abordez-vous on ce second évènement majeur de l’année ?
C’est une épreuve toujours aussi belle à jouer. Que ce soit en club ou en équipe nationale, disputer une Coupe du Monde, c’est une occasion d’écrire l’histoire. Mes coéquipiers et moi avons la possibilité de le faire pour l’Inter, et nous allons tout faire pour l’écrire avec un feutre en or. Il ne faut pas qu’on ait de regrets à la fin de cette compétition.
L’Inter Milan a remporté la Coupe Intercontinentale en 1964 et 1965, après ses deux titres de champion d’Europe. Que représenterait un troisième titre mondial pour le club après le troisième sacre européen ?
C’est un objectif majeur. Ce club a une belle histoire et déjà de nombreux trophées. Mais il doit en gagner encore beaucoup. Le nombre de trophées n’est pas conforme à la grandeur de ce club. Aujourd’hui, ce groupe a la chance de rentrer dans cette histoire et d’apporter encore plus à ce club.
Vous avez remporté deux Ligue des champions avec le FC Barcelone mais vous n’avez jamais disputé la Coupe du Monde des Clubs sous le maillot blaugrana, à cause d’une blessure en 2006 et suite à votre transfert en 2009. Remporter l’édition 2010 aurait-il un goût de revanche ?
Mais j’y ai participé avec le Real Madrid et je l’ai gagnée quand j’étais beaucoup plus jeune ! (1998) Je n’ai malheureusement jamais pu la jouer avec Barcelone. Mais je n’ai pas d’esprit de revanche. Je suis conscient de ma chance de pouvoir finalement y participer avec l’Inter. Je me prépare pour être à mon meilleur niveau et donner le meilleur de moi-même. J’espère vraiment que l’aide que j’apporterai à mes coéquipiers nous permettra de décrocher les victoires dont nous rêvons tous, d’abord en demi-finale, puis en finale.
Justement, en demi-finale, vous affrontez les Sud-Coréens de Seongnam Ilhwa. Comment avez-vous préparé cette opposition ?
Nous savons que ce ne sera pas facile, surtout quand on est dans la peau du favori. Nous respectons leurs qualités et leur parcours. Jusqu’à présent, on apprend à les connaître. Mais en général quel que soit l’adversaire, nous nous concentrons d’abord sur nous-mêmes. Si nous montrons notre meilleur visage, ce sera difficile de nous battre.
En tant que Camerounais, accordez-vous une attention particulière au représentant de l’Afrique, le TP Mazembe Englebert ?
J’ai suivi leurs débuts au moment où je suis arrivé à Abou Dabi. Leur match n’était pas terminé et, avec tous les Africains de l’équipe, on a commencé à les encourager en espérant qu’ils gardent le résultat. Ça m’a fait énormément plaisir qu’ils remportent ce match. Ils représentent fièrement notre continent et je leur dis un grand bravo de l’avoir fait de cette manière. J’espère qu’ils iront en finale. Mais si on doit les affronter en finale, alors ils redeviendront un adversaire comme un autre.
Ce tournoi est-il aussi une occasion de vous éloigner un peu de la pression en Italie, due aux résultats mitigés en Serie A et en Ligue des champions, et à votre suspension ?
Nous n’y pensons pas. Nous sommes tous très calmes, aussi bien par rapport aux résultats de l’équipe qu’à ma situation personnelle. J’ai pris trois matches de suspension parce que j’ai manqué au code disciplinaire de tout joueur. Cela peut arriver, mais je sais que ça n’arrivera plus. Collectivement, nous avons eu des soucis, en partie parce qu’on a eu beaucoup de blessés ces cinq derniers mois. Ça va beaucoup mieux depuis quelques temps, on a pratiquement tout le groupe à disposition et des jeunes intègrent l’effectif. Nous avons la conviction que, au complet, nous allons retrouver notre meilleur niveau et des résultats conformes aux ambitions du club.
L’Inter de la saison dernière donnait parfois l’impression d’être invincible. Les défaites de la première partie de saison ont-elles entraîné une remise en question ?
On ne s’est jamais vu dans la peau de la meilleure équipe au monde. Et depuis le début de la saison, on sait qu’on part en devant défendre tout ce qu’on a gagné l’année dernière. C’est difficile ! Les blessures n’ont rien arrangé, on n’a pas fait deux matches d’affilée avec la même équipe. Il faut à chaque fois s’adapter. Mais malgré tout, on n’a pas tout raté. On est à dix points du premier en championnat, mais tout est jouable. Nous en avons fait nous-mêmes l’expérience l’an dernier, puisqu’on avait plus de dix points d’avance à la trêve et on attendu les toutes dernières journées pour être champions. Et en Ligue des champions, l’objectif était d’abord de passer le premier tour. Donc nous sommes dans les temps. Maintenant que la compétition prend une autre tournure, il faudra plus de concentration. Nous savons que les gens attendent beaucoup mieux de nous, et nous savons que nous pouvons y arriver.
En finissant deuxième de votre groupe en Ligue des champions de l’UEFA, vous allez nécessairement affronter un premier de groupe. Ce tirage au sort vous inquiète-t-il ?
Il faut avoir beaucoup de respect pour l’adversaire que le sort nous réserve, mais un sportif n’a pas le droit d’avoir peur. Je pense aussi que pour les premiers groupes, tomber sur l’Inter doit faire peur. Et l’expérience joue en notre faveur. La saison dernière, nous n’étions pas favoris mais nous avons battu des clubs meilleurs que nous. Simplement parce qu’on y a cru, qu’on a joué à notre meilleur niveau, en croyant en nous à chaque occasion. C’est avec ce même état d’esprit qu’on doit aborder le reste des compétitions qui nous attendent. On dit qu’on apprend beaucoup dans la défaite. Nous, nous avons beaucoup appris dans la victoire.
Dans quelques semaines sera attribué le FIFA Ballon d’Or 2010. Trois de vos anciens coéquipiers barcelonais sont finalistes : Andrés Iniesta, Lionel Messi et Xavi. Quel est votre favori ?
C’est déjà difficile de les comparer, alors les départager, là c’est impossible ! Les trois méritent de gagner et j’aimerais juste une chose : qu’on puisse faire une exception au règlement et les récompenser tous les trois. Distribuons trois Ballons d’Or cette année !
De votre côté, vous êtes encore nominé pour le trophée de Joueur africain de l’année, sept ans après votre premier sacre. Quel est le secret de votre régularité à ce niveau ?
Non seulement de continuer à travailler, mais surtout essayer de faire mieux d’année en année. Ne pas se contenter de son meilleur niveau mais chercher à le dépasser. Si je gagne cette année, il aura toujours la même valeur que les trois précédents (2003, 2004, 2005), mais avec un goût spécial. Car plus je m’approche de la fin de ma carrière, plus la valeur des titres augmente. En prenant de l’âge, je travaille pour rester au plus haut niveau, mais je me demande si j’aurai encore la possibilité de soulever des trophées.
Il ne doit plus y avoir beaucoup de place dans votre armoire à trophées, et pourtant vous semblez toujours aussi motivé. Qu’est-ce qui vous fait encore avancer ?
Gagner encore ! Dans quelques années, quand je n’aurai plus cette chance de pouvoir porter un maillot et d’entrer sur un terrain en me disant « aujourd’hui, je vais gagner », ça me manquera. A ce moment là, je n’aurai que mes souvenirs. Et plus j’aurai de victoires et de souvenirs, plus je pourrai raconter de belles histoires à mes enfants. Par exemple, je leur dirai qu’en 2010, je suis allé à Abou Dabi avec l’Inter, et qu’on a gagné la Coupe du Monde des Clubs ! (rires)
Enfin, votre année 2010 a été fructueuse en club mais difficile avec les Lions indomptables. Quels souvenirs en gardez-vous ?
On ne peut pas rester sur l’échec du Mondial avec notre équipe nationale, mais les difficultés que nous avons eues pendant cette Coupe du Monde nous permettront d’être meilleurs dans les années à venir. Nous savons qu’il y a énormément de choses à rectifier et nous allons essayer de le faire rapidement. Mais l’année 2010 me laissera un goût très positif, parce que dans l’ensemble, tout n’était pas si mauvais…
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