Depuis six ans, l’ex-international Camerounais entraîne l’Union sportive de Bitam, un club du Nord du Gabon. Avant de s’envoler pour le pays d’Omar Bongo, l’ancien libéro des Lions indomptables (l’une des pièces-poutres de l’exploit du mondial 1990) a fait armes dans la capitale camerounaise où il a entraîné son ex club, le Canon de Yaoundé, pendant deux ans.
A l’US Bitam, le pionnier des techniciens Camerounais au Gabon affiche plutôt un bilan flatteur. Double vainqueur Coupe-championnat en 2003 et vice champion en 2005. Lors de la 3è journée de la Coupe de l’Uniffac dimanche dernier, son club, l’Us Bitam, s’est incliné 0-2 devant Fovu de Baham à Douala. Occasion pour Emmanuel Kunde de présenter aux lecteurs de Camfoot le championnat gabonais, une compétition qui n’est pas très médiatisée.
Camfoot.com : Depuis combien êtes-vous au Gabon et comment s’est passé votre intégration ?
Emmanuel Kundé : J’y suis depuis six ans. Depuis que je suis là-bas, j’entraîne l’Union Sportive Bitam. C’est un club qui est du Nord. En 2003, nous avons fait le doublé Coupe-championnat du Gabon. L’année passée, nous étions vice-champion. Ce qui nous a ouvert les portes de la Coupe de l’Uniffac. Si nous étions dans d’autres pays, avec notre rang, on jouerait au moins la Coupe africaine de la Confédération. C’est un résultat honorable pour un jeune club de province qui n’est monté en division d’élite qu’en 1997. Quant à mon intégration, il s’est bien passé. Les gens m’ont accueilli à bras ouverts, ils m’ont fait confiance et le résultat suit. Dans ma tête, je me considère déjà comme un Gabonais et je me plais dans ce pays.
Camfoot.com : Comment s’est déroulé la saison de votre club, l’Us Bitam ?
Emmanuel Kundé : Avec des hauts au début du championnat. Malheureusement, vers la fin, nous avons perdu des matches décisifs. Aujourd’hui, à quatre journées de la fin de la saison, nous sommes 3è sur 14 clubs, derrière Manga sport et FC 105 qui sont les clubs de la capitale. Je crois qu’on va jouer à fond pour glaner le maximum possible de points en espérant être champion pour jouer la Ligue des champions africaine. Vous savez au Gabon, seul le leader est qualifié pour la compétition africaine et le second joue la coupe de l’Uniffac. C’est un peu injuste.
Camfoot.com : Ce championnat est dominé par les clubs de la capitale Libreville. Comment avez-vous fait pour hisser un club de province parmi les leaders ?
Emmanuel Kundé : C’est la force du travail qui produit ce résultat. On a travaillé trois ou quatre fois plus que les autres puisque les autres disposent de beaucoup de moyens financiers et techniques. Nous avons donc l’obligation de travailler à fond pour jouer les hauts du tableau. Ça fait trois ou quatre ans que nous jouons les premiers rôles et nous comptons y rester pour jouer les coupes africaines et y aller le plus loin possible.
Camfoot.com : Comment avez-vous fait pour vous imposer comme entraîneur et surtout dans un pays qui est réputé xénophobe pour les Camerounais ?
Emmanuel Kundé : J’ai commencé ma carrière d’entraîneur ici au Cameroun avant de partir au Gabon. J’ai entraîné le Canon pendant deux saisons où on a même été qualifié pour les compétitions africaines la deuxième année. Je suis parti sur un coup, sur un malentendu. Vous savez, on fait son métier partout et je me plais bien là-bas, les gens sont accueillants et je crois pouvoir continuer.
Camfoot.com : Y a-t-il beaucoup de Camerounais qui exercent comme entraîneur au Gabon ?
Emmanuel Kundé : Pour le moment, nous ne sommes que deux. Il y a Eugène Ekeké [ex-Lion indomptable, Ndlr] qui entraîne à Franceville et moi. Nous sommes les pionniers…
Camfoot.com : Les joueurs camerounais tirent-ils leur épingle du jeu ?
Emmanuel Kundé : Ils essayent d’apporter le maximum, ils essayent de donner le meilleur d’eux-mêmes. Vous savez au Gabon, quand on sait qu’un joueur est Camerounais, on a beaucoup d’estime pour lui. Et quand vous avez cette pression, vous avez l’obligation de donner le meilleur de vous-même. Dans mon équipe, ils sont trois. Il y a Jamamba Robert, Yah Julius et Stéphane Bitseki, le gardien qui est arrivé cette saison.
Camfoot.com : Le championnat Gabonais et celui du Cameroun. Quelle différence ?
Emmanuel Kundé : Je crois qu’il n’y a pas une grande différence, sinon au niveau de la mentalité qui est le point fort des Camerounais. Au Gabon comme au Cameroun, le foot se joue avec 11 joueurs. Nous avons intérêt à copier ce mental Camerounais qui est leur principale caractéristique. Vous savez, le football, au-delà du jeu et de la technique, il faut avoir un mental à toute épreuve pour surmonter toutes les situations complexes.
Camfoot.com : Comment appréciez-vous les problèmes administratifs et sportifs qui minent le football camerounais ?
Emmanuel Kundé : Notre football n’a pas beaucoup changé. Peut-être les résultats sont là mais il y a toujours un manque de sérieux dans l’organisation et c’est vraiment dommage pour un pays qui a déjà participé à cinq phases de coupe du monde et les choses devraient changer, car le football moderne s’accommode mal de l’improvisation et de l’amateurisme.
Camfoot.com : En tant qu’ancien Lion indomptable, qu’est-ce que cela vous fait de voir l’équipe nationale ne pas se qualifier pour la coupe du monde alors qu’on avait une très bonne génération de joueurs?
Emmanuel Kundé : C’est vraiment dommage ! C’est ça le sport. Il fait savoir gagner et il faut savoir perdre.
Camfoot.com : En ce moment, le Cameroun cherche un entraîneur pour diriger les Lions indomptables. Avez-vous déposé un dossier de candidature à la Fécafoot?
Emmanuel Kundé : Non ! Je n’y ai pas pensé. Connaissant les mentalités ici, ça ne m’a pas frôlé l’esprit d’entraîner les Lions indomptables. Je n’y pense même pas.
Camfoot.com : Pourquoi ?
Emmanuel Kundé : Parce que je suis occupé ailleurs !
Propos recueillis par Eric Roland KONGOU, à Douala