En marge de la rencontre opposant l’équipe du Cameroun à celle des Pays-Bas le 27 Mai dernier, nous avons tendu notre micro au vice président de la fédération Camerounaise de football. Dr Francis Mveng puisqu’il s’agit de lui, a fait un tour d’horizon des maux qui minent notre football tout en appelant les uns et les autres au dialogue dans une guerre ouverte entre le MINSEP et la FECAFOOT. Il nous livre ainsi sa vision sur le développement du football au Cameroun qui aurait atteint le degré 0.
Camfoot.com : Bientôt reprennent les éliminatoires de la prochaine CAN. La fédération va-t-elle confirmer Mr Jules Nyongha ou alors chercher un nouveau staff pour entamer une préparation judicieuse ?
Dr Mveng : Comme vous le dites si bien, les éliminatoires pour la prochaine CAN reprennent bientôt. Au mois de Septembre nous devons jouer nos premiers matchs. La priorité c’est de recruter un entraîneur. Le ministère a demandé à la fédération de faire des consultations et des propositions pour le recrutement d’un entraîneur. Ce que la fédération est entrain de faire. Le dossier est entrain les mains du président qui en ma connaissance s’active et je crois que dans cette affaire, beaucoup de connaisseurs sont impliqués. Je pense notamment à l’ambassadeur S.E Roger Milla. C’est une œuvre collective et ce qui est important est que les lions aient un entraîneur digne de la dimension et de l’aura du football que les lions pratiquent. C’est ça qui est important. Il faudrait que les lions aient un homme de caractère, un entraîneur bien connu et capable de mener à bien les lions à la qualification de la prochaine CAN et de la prochaine coupe du monde. C’est donc cela qu’il faut aux lions.
Camfoot.com : Quand est ce qu’on peut espérer voir ce nouvel entraîneur ?
Dr Mveng : C’est un problème qui sera très bientôt fixé. Vous savez, après la coupe du monde, il faudra tout mettre sur pied pour attaquer le nouveau calendrier. Vous savez Septembre n’est plus loin. Tout ce que je peux vous dire c’est qu’avant Septembre, les lions auront un nouvel entraîneur.
Autonomie ne veut pas dire indépendance
Camfoot.com : Depuis un certain temps, on assiste à quelques mouvements internes au niveau de la fédération. Des voix se levent de l’intérieur contre votre politique en brandissant des preuves de mauvaise gestion alors même que la guerre MINSEP-FECAFOOT ne connait pas de répit. Que se passe-t-il exactement à Tsinga ?
Dr Mveng : Vous savez, les différences s’expriment de par la nature des individus. Et moi je suis de ceux là qui pensent que l’unanimité ne peut pas être la ligne de conduite dans un groupe. Certaines personnes ont une sensibilité et chacun de nous a sa manière de voir les choses. Nous sommes dans une société ouverte libre et démocratique. Chacun peut critiquer, chacun peut dire ce qu’il veut. Mais au-delà de la critique, il faut apporter des solutions. Dire par rapport à tel je veux faire ceci ou cela pour qu’on trouve ensemble des solutions qui peuvent aider à sortir notre sport roi d’où il est. Maintenant pour ceux qui étaient là hier ils continuent d’être là aujourd’hui. Il y a un comité qui a été convoqué pour le 29 Mai (renvoyé finalement). Je pense que ce sera le lieu de la grande explication qui permettra aux uns et aux autres de s’exprimer et de mettre les problèmes sur la table. En ce qui concerne le ministère, je l’ai toujours dit et je le répète, les rapports doivent être des rapports de confiance et de respect mutuel. La tutelle exerce le rôle de la tutelle. Mais la tutelle ne veut pas dire tutorat. La fédération est autonome. Autonomie ne veut pas dire indépendance. Voilà donc les différentes lignes de démarcation entre lesquelles nous devons nous mouvoir avec un esprit de confiance et de respect mutuel. Aller au-delà veut dire traverser des bornes, traverser les limites. C’est valable pour le MINSEP comme pour la FECAFOOT. C’est ce langage que j’ai toujours essayé d’appliquer. La fédération a ses prérogatives à elle. Le ministère a les prérogatives de la tutelle et non de tutorat. Que les uns et les autres le comprennent et tout marchera.
Camfoot.com : L’autre dossier chaud est celui du Directeur Général de la fédération… ?
Dr Mveng : Ceci sera probablement d’actualité lors du comité général convoqué pour le 29 Mai (avorté). Je ne serais pas là car en mission confié par le président. Vous savez un directeur, c’est pour inculquer un dynamisme nouveau, organiser une structure et essayer d’organiser d’une manière moderne les procédures. Maintenant, si nous même à la fédération, je veux dire les élus de la fédération, nous bloquons les choses … vous savez, vous pourriez prendre le meilleur directeur ou manager du monde, rien n’avancera. La fédération elle-même doit faire son autocritique afin que les esprits changent et que les gens se mettent enfin au service du football. Que ce soit de la part des élus que ce soit de la part des dirigeants de club, que ce soit de la part des joueurs, qu’il y ait des manuels de procédure de bonne conduite. Qu’un président de club sache ce qu’il doit faire. Que la fédération prenne sur elle-même de faire des structures de fond. Je ne peux pas comprendre et je vous le dis clairement. Vous voyez par exemple en France – un peu partout en Europe – il y a 18 clubs de 2e division, au Cameroun près de 200. Est-ce que vous-même trouvez ça normal ? Cet état de chose d’atomisation fait en sorte qu’il y ait un émiettement des talents qui sont parfois noyés dans la nullité et qui n’arrivent pas à éclore. Il faudrait que la fédération engage des réformes de structure. On ne peut pas fonctionner avec 200 clubs en deuxième division, c’est de l’aventure. Il faut revenir au fait que dans le championnat de 2e division, qu’on retrouve un maximum de 30 clubs et comme ça on va recentrer les choses et on aura la bonne crème. Mais tel que c’est parti là, c’est un nivellement par atomisation. On ne peut pas y sortir des talents. Voila un problème qui nous conduit à un manque de spectacle. Chacun essaye maintenant de créer un club pour pouvoir transférer des joueurs et se faire de l’argent. Il faut donner une orientation et la ligne politique à une structure. Il faut tout recentrer et refaire les choses. Je vous ai donné l’exemple de la France qui a 18 clubs et nous avons plus de 200, ce n’est pas normal. Nous ne pouvons pas tirer des valeurs là-dessus. Et quand une valeur essaye de pointer le nez à l’horizon on va la vendre au détriment du développement de notre football. Ce n’est pas sérieux.
Camfoot.com : Dans votre lutte pour la redynamisation de la fédération, vous ne vous faites pas que des amis. Comment redorrer le blason du football au Cameroun ?
Dr Mveng : Le combat à mener est celui des idées. Et il faut pouvoir convaincre. Et pour convaincre, il faut avoir une vision. Et c’est cette vision qu’on doit vendre pour pouvoir convaincre les uns et les autres. Je vous ai pris tout à l’heure l’exemple de la deuxième division chez nous. Les chiffres parlent d’eux même. Et à partir de là, nous devons convaincre. En essayant de convaincre, nous allons construire ensemble pour que les choses puissent changer et les choses aient dans le sens de la modernité. Nous ne pouvons plus continuer de cette manière, ça c’est clair. Parce que petit à petit nous allons atteindre le degré 0 du football au Cameroun. Au niveau national, il faut le relever. Et pour qu’il se relève, il faut faire des réformes de structure. Il faut par exemple ramener les nombre de club de deuxième division à la dimension de notre pays et par rapport à ce qui se fait ailleurs. Et il faut donner un cahier de charge respecté par tous les présidents de club. La fédération doit fixer les normes. Il ne faut pas avoir un club et qu’on n’arrive pas à payer le transport d’un joueur de Yaoundé à Akonolinga et on dit qu’on est président d’un club de première division, c’est pas possible. Cela doit cesser. Même s’il reste 10 clubs en première division, on aura la de vrais clubs.
Propos recueillis par Stephen Sunou