Augustin Edjoa, ministre des Sports et de l’Education Physique parle des Lions Indomptables : « Je suis très satisfait par la performance des Lions à la CAN 2008. Il ne faut pas faire la fine bouche, vous savez, bien peu de Camerounais misaient sur notre équipe nationale avant cette compétition pour beaucoup de raisons sur lesquelles je ne reviendrais pas ici »
Quel est votre sentiment sur la participation du Cameroun lors de la dernière édition de la CAN au Ghana ?
Je suis très satisfait par la performance des Lions à la CAN 2008. Il ne faut pas faire la fine bouche, vous savez, bien peu de Camerounais misaient sur notre équipe nationale avant cette compétition pour beaucoup de raisons sur lesquelles je ne reviendrais pas ici. Les éléments de satisfaction sont multiples. D’abord, notre pays a brisé ce signe indien qui depuis 2002 nous a empêché de traverser le cap des quarts de finale. Nous l’avons fait cette fois et mieux, nous ne sommes tombés qu’en finale. Sur ce point, notre mission a été remplie. Ensuite, le Cameroun a confirmé qu’il demeurait un grand d’Afrique et que ceux qui l’ont enterré trop tôt s’étaient trompés. Il faut quand même dire que perdre le premier match deux buts contre quatre et se retrouver en finale n’est pas un mince exploit. Enfin, sur le plan des effectifs, on a vu des jeunes prendre des responsabilités de plus en plus grandes. Ce qui veut tout simplement dire que l’on peut regarder l’avenir proche avec beaucoup d’optimisme. Pour me résumer donc, je dirais que la participation du Cameroun à la dernière CAN fait honneur à notre pays et plaisir aux nombreux fans des Lions Indomptables.
De l’avis général, le parcours du Cameroun a été laborieux. On évoque une préparation inadéquate. Votre avis sur la question ?
C’est vrai, le parcours des Lions a été très laborieux. Cela est dû en partie à une préparation courte mais pas inadéquate. Vous l’avez constaté, certains pays qui ont eu deux ou trois ans pour se préparer avec une quinzaine de matches amicaux à la clé en sont restés au niveau des illusions. Vous savez, les Camerounais sont très durs envers leur équipe nationale, je le comprends fort bien. Mais force est aussi de reconnaître que les critiques ne sont pas toujours constructives et fondées. Si la préparation a été courte, c’est tout simplement parce que le processus de recrutement d’un nouvel entraîneur a été long et rigoureux. Il fallait cependant faire bonne figure à la CAN et nous l’avons fait. Il n’y avait sûrement pas la manière, je vous le concède, mais il y avait un objectif à atteindre. Les joueurs de la sélection nationale nous ont à maintes reprises au cours de la compétition rappelé que peu importait la manière et que pour eux seul comptait le résultat final. Et pour un parcours laborieux, il convient de souligner que cette équipe a quand même réalisé la meilleure performance offensive des Lions en phase finale de la CAN avec 14 buts marqués en 6 matches, cela aussi n’est pas rien pour une équipe qui se cherche encore.
En votre qualité d’employeur, quelle évaluation faites-vous du travail du sélectionneur ?
Vous savez, on juge un entraîneur de par ses résultats. Et en un mois de travail seulement, Otto Pfister a emmené les Lions en finale de la CAN. Quoi dire de plus sur cette performance ? On peut juste regretter que nous n’ayons pas eu beaucoup de temps de préparation pour des raisons évoquées plus haut. Otto Pfister a rempli son contrat dans cette CAN et je crois qu’il faut le reconnaître, et c’est tout à son mérite d’avoir lancé dans le bain des jeunes comme Alexandre Song Billong, Binya, Nkong et bien d’autres encore, d’avoir redonné une âme conquérante à cette équipe. Il faut juste lui faire confiance, sans préjugés comme cela a souvent été le cas jusque-là et le laisser travailler en toute sérénité. Je crois que les faits ont donné raison aux pouvoirs publics en ce qui concerne sa nomination et que nous devons désormais le soutenir dans sa délicate mission. Je pense que le sélectionneur a montré un aperçu de ses capacités avec notamment un retour de la discipline au sein du groupe par rapport à ce qui se passait dans la sélection ces derniers temps. A son crédit aussi, le retour d’une saine émulation au sein des joueurs. On a compris au cours de la dernière CAN que tout le monde avait sa place et pouvait jouer dans cette équipe et même certains titulaires indiscutables jusque-là ont dû se remettre à la tâche pour justifier leur place, ce qui n’était plus le cas dans un passé très récent.
Lors de la cérémonie de réception des Lions Indomptables par le Premier ministre, chef du gouvernement, vous avez reconnu que le temps avait fait défaut à l’encadrement technique pour ramener la coupe. Quelles sont les dispositions à prendre pour qu’il n’y ait pas d’excuses à l’avenir ?
Au niveau des pouvoirs publics, les dispositions sont d’ores et déjà prises pour une bonne préparation des futures échéances qui attendent les Lions, à savoir les éliminatoires couplées CAN et Coupe du Monde 2008 dès le mois de Juin prochain. Et comme vous le savez bien, dans le cahier des charges de l’entraîneur-sélectionneur national figure bel et bien la qualification de notre pays à ces deux grandes compétitions. C’est dire que les pouvoirs publics sont conscients de l’importance d’une préparation adéquate de notre équipe d’autant plus qu’une contre-performance lors du tour préliminaire entraînera automatiquement une hibernation de notre sélection jusqu’en 2011. Il s’agit donc pour nous d’éviter toute désagréable surprise. Les responsables techniques sont en train de finaliser leur programme de travail avec prospection sur le plan local, multiplication de regroupements, recherche de matches amicaux pendant les périodes FIFA par la FECAFOOT et, je vous l’ai dit comme d’habitude, les pouvoirs publics mettront à la disposition des Lions tous les moyens nécessaires pour une bonne préparation à ces diverses échéances.
Pour que les Lions Indomptables marchent, il faut que les rapports entre la fédération et la tutelle soient bons. Quid de ces rapports ?
Je l’ai déjà dit et je le répète, entre la tutelle et la fédération, il n’y a pas de problèmes. Il y a la tutelle, comme vous dites, et la fédération. Seulement certains ne comprennent pas ou ne veulent pas comprendre comment doivent fonctionner certaines choses. J’ai encore entendu un «responsable » de la fédération dans une station de radio de la place samedi dernier, donner des injonctions au ministère des Sports et au Ministre que je suis et exiger le départ immédiat du sélectionneur après la CAN. Cela est révélateur de l’état d’esprit qui prévaut auprès de certaines personnes. Dieu merci, elles ne sont pas nombreuses dans ce cas. Car, les vrais amoureux du football camerounais n’ont aucun intérêt à ce qu’il y ait des problèmes entre la tutelle et la fédération. Nous sortons de la CAN où nous avons prôné l’union sacrée et non l’union de façade autour de nos Lions. Beaucoup ont été sincères, d’autres pas. Vous le savez bien, « chassez le naturel, il revient au galop ». Pour ma part, mon département et moi-même restons ouverts et entre le Président IYA et le Ministre, il n’y a aucun problème. Beaucoup ont été surpris de nous voir manger sur la même table, emprunter le même minibus, résider dans le même hôtel au Ghana, c’est dire qu’il ne s’agit pas d’un problème de personnes. Je vous l’ai déjà dit, la situation de tension entre la tutelle et la fédération est devenue un fonds de commerce pour beaucoup, ils ont donc tout intérêt à ce que les choses restent en l’état. De notre côté, nous continuerons à exercer notre droit régalien de contrôle et dans la perspective de 2010, les pouvoirs publics assumeront leurs responsabilités et, je le crois sincèrement, la fédération les siennes.
D’après vous, quelle est la solution idéale pour remettre durablement l’équipe nationale du Cameroun et partant le football national à flots à moyen terme ?
La première solution et la plus simple est qu’on laisse travailler les responsables techniques dans le temps et l’espace et ce, librement. Il faut que les uns et les autres comprennent que les intérêts personnels et égoïstes ne servent pas la cause publique, donc nationale. Sur le plan technique, il faut redynamiser le football jeunes, continuer la prospection, gérer efficacement les nombreuses écoles de football qui se créent, organiser des compétitions nationales fiables capables de retenir les locaux sur place avec une bonne organisation au niveau des clubs. Il faudrait aussi que les Camerounais acceptent le travail à long terme et abandonnent un peu le culte du résultat immédiat. Car, ici nous aimons semer le matin, arroser à midi, récolter le soir et consommer le lendemain. Cela n’est pas une bonne politique, il faut travailler dans la durée. Il faut désormais tout planifier et nous nous attelons à le faire. Cela figure aussi dans le cahier des charges de l’entraîneur-sélectionneur national. Dans tout cela, je ne saurais occulter une collaboration franche, courtoise et sincère entre la tutelle et la fédération. Mais la voûte de tout cela, ce sont les infrastructures sportives pour permettre la pratique du football par un maximum des adeptes. Cela, les pouvoirs publics l’ont compris et c’est ainsi que dans le cadre de la réalisation de la politique des « GRANDES AMBITIONS » prescrite par le Chef de l’Etat, le Président Paul BIYA et sous la supervision du Premier Ministre, Chef du Gouvernement, un vaste programme de réhabilitation des infrastructures existantes, de constructions de nouvelles, est en cours de réalisation avec l’aide de pays amis. Nous espérons que d’ici l’horizon 2012, ce handicap sera comblé pour permettre au football camerounais d’atteindre son plein épanouissement.
Simon Pierre ETOUNDI