Depuis que j’ai l’âge de raison, je comprends, j’admire et je respecte le football. Or, il est souvent arrivé que ce sport me déçoive, non par sa nature intrinsèque, mais par la trop fréquente incurie des acteurs qui sont chargés de le gérer. Au point que, ces derniers mois, j’ai vraiment eu l’impression que le football n’était plus le football, tant se multipliaient les faits et circonstances qui sortaient de toute logique et qui trahissaient visiblement l’esprit de ce sport.
Or, en cette seule journée du mercredi 27 mai 2009, deux événements m’ont réconciliés avec mon sport favori : d’une part la démission d’Otto Pfister, ci-devant sélectionneur de l’équipe nationale du Cameroun, et de l’autre la victoire en finale de Ligue des champions du FC Barcelone, club qui a pratiqué cette année le meilleur football, et cela dans le meilleur des esprits, et club dans lequel évolue mon compatriote Samuel Eto’o, sans doute le Camerounais le mieux connu aujourd’hui sur cette planète.
Il va de soi que j’ai dignement arrosé ces deux événements, au point que les stocks de bière de la ville d’Amiens vont devoir être renouvelés prématurément.
Mais la joie n’empêchant pas de réfléchir (ou la boisson fermentée stimulant la réflexion, je laisse mon lecteur essayer la chose et en décider), je me suis dit que ces deux événements n’avaient pas la même portée.
D’un côté, la victoire ce mercredi de Samuel Eto’o, son but marqué dès l’entame du match, et qui a clairement décidé de son issue, tout cela représente pour lui une consécration. Et quelle consécration ! En marquant ce superbe but d’un extérieur du pied droit, enchaîné à la suite de deux coups de reins qui ont désorienté ses deux gardes du corps, il a fait mentir tous ceux qui l’ont réputé d’opportunisme ; il a fait taire les mauvaises langues qui l’ont toujours présenté comme le chanceux qui profite du génie de ses coéquipiers ; il a fermé la bouche à tous ceux qui ont prétendu qu’il ne savait pas gérer les grandes occasions.
Samuel ne sera sans doute jamais ballon d’or ou meilleur joueur FIFA, parce qu’il n’est pas né dans le bon pays. Eh bien, peu me chaut ! Pour nous qui le suivons depuis la KSA, il est simplement le meilleur joueur du monde, le plus complet, le plus décisif, et le plus solide au plan psychologique.
Samuel Eto’o, vous êtes mon point d’exclamation de ce 27 mai 2009. Merci !
De l’autre côté, la démission d’Otto Pfister : je l’ai souhaité, ce départ. J’oserais même dire que j’y suis, avec quelques autres, pour quelque chose. Dans ce même espace, j’appelais déjà il y a quelques semaines monsieur Pfister à prendre ses responsabilités. Je lui rappelais qu’on ne peut pas occuper en dilettante le banc d’une sélection comme celle du Cameroun. Je lui signifiais le sens du nom « Emana », et voici que, pour lui, c’en est fini. On aurait pu mettre là un point final à son aventure camerounaise, mais…
Les lecteurs de Camfoot savent bien que Monsieur Pfister n’était pas la source de nos inquiétudes, mais que son inanité à la tête des Lions Indomptables n’était qu’un symptome de cette fièvre gombotique qui saisit nos décideurs dès qu’on prononce « football ». Depuis près de quinze ans, le mode de décision pour tout ce qui concerne ce sport au Cameroun s’apparente à un palimpseste : on écrit inlassablement la même histoire par-dessus l’échec précédent.
Cela va du comportement du ministre en charge des sports, qui réduit invariablement sa mission au seul et juteux dossier des Lions indomptables (tous l’ont fait depuis quinze ans) ; jusqu’au choix de l’entraîneur national, qui est toujours, peu ou prou, recruté in extremis, dans des conditions bizarres, et suite à moult tergiversations ; je passe sur la relation entre la tutelle et la FECAFOOT, qui n’est qu’une interminable querelle de chiffonniers.
Cette forme de gestion très camerounaise nous amène à préparer aujourd’hui un match capital dans l’incertitude la plus absolue. En effet, il serait fort surprenant que le MINSEP, puisqu’il s’est arrogé ce droit, recrutât d’ici à demain un nouvel entraîneur pour les Lions Indomptables. On comprendra qu’il faut le temps de le faire à la camerounaise.
Il semble donc que notre équipe nationale sera encadrée, pour les matches des 6 et 20 juin 2009, par un triumvirat dont nul ne peut garantir le fonctionnement harmonieux, pour des raisons dont j’ai déjà fait état sur ces mêmes colonnes.
Voilà pourquoi, messieurs Ndtoungou, Kaham et Akono, vous êtes mes trois points d’interrogation en ce moment.
S.E.O. alias Atango, Amiens, France