L’équipe du Cameroun n’a jamais joué à son véritable niveau tout au cours de la Coupe d’Afrique des Nations et avant elle, de la coupe du monde asiatique. Fragile, impuissante, fatiguée et accablée par les problèmes internes, et sans véritable leadership, elle a quitté la Tunisie laissant un goût amer à tous ceux qui l’estimaient.
Pourtant, pourtant… l’on était en droit d’attendre beaucoup mieux des finalistes de la dernière Coupe des Confédérations, des quadruples champions d’Afrique et médaillés d’or olympiques.
L’équipe ne s’était jamais mieux portée depuis la débandade asiatique et elle laissait entrevoir une performance bien plus méritoire.
En effet, depuis 1998 et avec l’arrivée de Pierre Lechantre aux commandes, les Lions avaient pu trouver un équilibre entre leur niveau réel, une sensibilité, un engagement, un système de jeu basé sur un 3-5-2 non classique adapté aux capacités des joueurs. Deux ans plus tard, tout semblait leur sourire: champion d’Afrique et performance exceptionnelle aux Jeux Olympiques.
Quelques mois plus tard, sous la houlette d’un ministre de tutelle qui rêvait de s’ingérer personnellement dans les affaires footballistiques au détriment des autres secteurs de l’activité sportive camerounaise, commencèrent la valse des entraîneurs. Résultat: 5 entraineurs en moins d’un an et ses copains placés aux postes de commandes. Tous pensaient donc que le système était épuré de ses « éléments nuisibles » et pourtant, et pourtant, des surprises nauséabondes étaient à venir.
Après le (deuxième) congédiement de Pierre Lechantre, les promesses fusaient. Les Lions devaient avoir un entraîneur ayant déjà fait ses preuves à un niveau supérieur. Les critères? Seuls les responsables du ministère et de la FECAFOOT les connaissaient. Plusieurs mois plus tard, Schaefer est plébiscité à la tête des Lions avec comme atout son parcours brillant en 1996 avec le club allemand de Karlushe et sa nationalité allemande qui fut un atout de taille. Il devait apporter de la sérénité au sein des troupes et une discipline à « l’allemande ».
Quelques mois plus tard, avec un alignement composé en totalité de l’effectif Akono/Lechantre il remporta la CAN2002 au Mali et la reconnaissance au niveau africain.
Avec un dossier aussi réluisant, le Cameroun était donné favori de son groupe en coupe du monde 2002, un groupe des plus prenable avec comme adversaire l’allemagne au pire de sa forme technique et psychologique, l’Irlande et l’Arabie Saoudite. Malgré la gestion catastrophique de la grève des joueurs avant la compétition, les Lions étaient attendus, avec le resultat que l’on connait.
Au délà des performances affichées par l’équipe nationale du Cameroun, quel est l’apport réel de Winfried Schaefer au sein des Lions Indomptables?
Son impact véritable semble difficile à percevoir tellement l’équipe sous sa houlette alterne le bon et le moins bon. Contrairement aux précédents entraîneurs qui ont apposé leur signature dans le jeu, Schaefer semble n’avoir pas su donner une touche particulière au dispositif des Lions.
Son jeu à tâtons entre le système à quatre défenseurs à plat présenté à la Coupe des Confédérations et au premier match de la CAN contre l’Algérie et le système à trois défenseurs rapidement abandonné à cause du « syndrome Ndlovu » en sont la preuve vivante.
Aussi, les listes définitives de Schaefer semblent ne plus émouvoir personne. On se rappelle au sortir du stage du Danemark en route pour le Japon en 2002, Modeste Mbami qui était, de l’avis de tous les observateurs le joueur le plus en forme, le plus motivé, fut laissé à l’écart de la sélection. Plus recemment encore, le Crack d’Or du championnat national, meilleur joueur et meilleur buteur des Jeux Africains, Markus Mokaké, a été laissé dans le décorum en route pour la CAN alors que cette équipe était à la recherche de créateur et de buteur. Ne soulevons pas la mise à l’écart de Achille Emana, le talentueux milieu de terrain de Toulouse, le retour en sélection dicté par le Chef de l’État de Patrick Mboma.
La performance de l’équipe nationale en Tunisie a été des plus humiliante. L’équipe manquait de direction. Peut-être est-ce la barrière de la langue, mais Valery Nepomniachi en 1990 nous a démontré que cette barrière n’était pas insurmontable.
Schaefer n’a jamais su non plus faire des ajustements en cours de match pour redonner du tonus à un secteur particulier de l’équipe. Contre l’Algérie, l’attaque n’a pas su profiter de ses multiples occasions de but. Contre le Zimbabwé, la défense a souffert. Le milieu de récupérateur tout au long du tournoi n’a pas pu s’ajuster. Et à chaque fois, aucune solution de rechange n’a pu être trouvée.
Le jeu des Lions était facilement lisible, sans aucun génie et sans état d’âme.
Schaefer semble avoir compris qu’il fallait composer avec les autorités sportives pour garder son poste au détriment de la performance sur le terrain et garder son salaire mirobolant de plusieurs millions de FCFA par mois. C’est ainsi que ses sélections semblent être fortement dictées. Du gagnant-gagnant pour toutes les parties.
Serait-il sage de maintenir l’allemand à son poste? Les autorités camerounaises se doivent de statuer. La stabilité au poste de sélectionneur ne devrait pas primer sur la compétence. Le confirmer à son poste pour l’unique raison d’arrêter la valse des entraineurs, comme le disait dans une entrevue Mr Mohammed Iya, n’est tout simplement pas acceptable.
Quand on y repense, qu’a réellement apporté Schaefer à l’équipe nationale du Cameroun?
Patrice Abodo