Le football camerounais est en mouvement. Paul Le Guen, le nouveau coach des Lions indomptables, a confié le brassard de capitaine à Samuel Eto’o, la référence actuelle en ce qui concerne le football dans notre pays. Rigobert Song Bahanag, notre Magnan national, qui a porté ce brassard au cours des 10 dernières années, est resté sur le banc des remplaçants lors du match amical contre l’Autriche le 12 août dernier. L’itinéraire de Magnan en tant que capitaine des Lions indomptables est donc arrivé à son terme à Klagenfurt.
La Rédaction de Camfoot.com salue la carrière de ce grand footballeur, défenseur impénitent, patriote ombrageux, et grand capitaine qui a été pendant une décennie le visage emblématique des Lions indomptables.
Un grand footballeur
Major de la première promotion du centre de formation des Brasseries du Cameroun, Rigobert Song Bahanag a débuté sa carrière en tant que footballeur au Red Star de Bangou. Il a ensuite joué dans les plus grands clubs au Cameroun (Tonnerre Kalara Club), en France (FC Metz et RC Lens), en Italie (Salernitana), en Angleterre (Liverpool et West Ham United), en Allemagne (Cologne). Aujourd’hui, il évolue en Turquie (Galatassaray et Trabzonspor). Il a joué trois phases finales de la Coupe du monde FIFA, 7 phases finales de la CAN (32 matchs) et deux Coupes des confédérations. Rigobert Song a, à son actif, 530 matchs, et détient le record des sélections tant au sein des Lions indomptables (130) qu’en Coupe d’Afrique des Nations. C’est un footballeur charismatique. Je n’oublierai jamais les chants que j’ai entendu monter des travées d’Anfield à Liverpool chaque fois que Magnan enrayait une attaque dangereuse et qu’il remontait la longueur du terrain, balle au pied et les dreadlocks au vent : « Song, Song, Song, entonnaient les fans, there’s only one Song ».
Un défenseur impénitent
Rigobert Song Bahanag est un pur produit du football camerounais, fait, à la fois, de finesse et de virilité. Ses tacles rugueux lui ont valu la célèbre distinction d’être avec Zinédine Zidane, le seul joueur à avoir reçu de carton rouge dans deux coupes du monde. Song excelle dans les matchs à haute tension, quand les attaquants adverses arrivent par vagues dans notre surface de réparation comment le firent Salas et Zamorano au Stade de la Beaujoire à Nantes en match de poule lors de la Coupe du Monde 1998. Cette prestation restera pour moi le summum de sa carrière. Salas et Zamorano faisaient alors figure d’épouvantails, terrorisant toutes les défenses d’Europe et d’Amérique du sud. Magnan les dompta et les réduisit à la dimension de misérables chatons. Ils passèrent 50 minutes à miauler sur le terrain, jusqu’à son expulsion imméritée, sur une blessure simulée, précisément par Salas. Je n’oublierai jamais non plus ce jeune Kenyan qui, me reconnaissant comme Camerounais à ma tunique des Lions indomptables que j’arborais fièrement au restaurant « Carnivore » de Nairobi, m’aborda, tout intimidé, pour me demander si les joueurs camerounais avaient une formation militaire. Devant mon étonnement, il me dit que la force de Rigobert Song s’apparente à celle d’un militaire. Il voulait son adresse pour lui demander sa recette. Je la lui donnai.
Un patriote ombrageux
A tous ceux qui évoquent son attachement au Cameroun, Rigobert Song répond toujours: « J’aime le Cameroun. Lorsque je vois un symbole qui représente la nation ou la patrie, je tremble, non pas de peur mais de force. Je donnerais tout pour faire honneur à mon pays ». Plusieurs fois, effectivement, il a tout lâché pour son pays. Il a perdu sa place de titulaire à West Ham précisément par qu’il avait préféré voler au secours des Lions indomptables. Chaque fois qu’il négocie un contrat, l’une des clauses les plus importantes est toujours la nécessité d’être disponible pour l’équipe nationale. C’est ainsi qu’il a pu accumuler les 130 sélections qu’il compte à son actif.
Un grand capitaine
Pendant que les Lions indomptables dominent comme pendant qu’ils sont dominés, l’image de leur capitaine donnant le tempo, criant, hurlant, replaçant les joueurs sur le terrain m’a toujours rempli de fierté et inspiré la confiance. Song Bahanag ne laissait jamais un joueur adverse intimider un de ses protégés. Oliver Kahn en sait quelque. Quand les Lions sont menés au score, Song est souvent celui qui sonne la charge. Il monte alors avec chaque offensive, quand ce n’est pas lui qui la conduit. Sur les corners, il plonge, la tête la première, pour ne pas sortir la tête basse. Quand cela arrive, comme ce fut le cas après ce match nul fatidique contre l’Egypte à Yaoundé le 8 octobre 2005, ses sanglots sont à vous fendre le cœur. C’est rare. Rigobert Song c’est surtout le capitaine qui a mené dignement en finale de la Coupe des Confédérations à Paris, une équipe des Lions indomptables durement éprouvée par le décès inattendu et choquant de l’une de ses pièces maîtresses, Marc Vivien Foé en pleine demi-finale contre la Colombie.
Le visage emblématique des Lions indomptables
Avec sa légendaire crinière, Rigobert Song est devenu, en quelque sorte, la mascotte des Lions indomptables. Qui peut oublier cette image de Magnan, célébrant un de ses buts, à quatre pattes, donnant des coups de griffes dans le vent, à la manière du fauve éponyme ? Pendant dix années, notre capitaine emblématique a participé à la construction de l’image des Lions indomptables connue à travers le monde, celle de guerriers aux nerfs d’acier, qui ne lâchent rien et qui sont le plus dangereux quand ils ont le dos au mur.
Ces derniers temps, les Lions indomptables ne faisaient plus peur à personne. Pas même aux panthères du Gabon. L’autorité de Magnan s’en est ressentie. L’âge n’aidant pas, son agressivité s’est émoussée. Paul Le Guen a donc enlevé le brassard à Magnan pour imprimer une nouvelle dynamique aux Lions indomptables. Ceux qui acclament cettedécision y voient un signal fort de la part du nouvel entraîneur à l’adresse de tous ceux—et ils sont nombreux— qui reprochent à Rigobert Song Bahanag de s’être incrusté dans la sélection nationale du Cameroun au point de finir par éloigner tous les jeunes qui, à un moment ou un autre, avaient des velléités de briguer une place au sein de la défense des Lions indomptables. D’autres vont jusqu’à mettre en doute sa capacité de continuer d’apporter une contribution déterminante aux Lions indomptables en qualité de défenseur central. D’autres enfin lui imputent la responsabilité dans les difficultés que traverse actuellement la sélection nationale en l’identifiant comme l’un des chefs de file d’un groupuscule appelé 984, qui ferait la pluie et le beau temps au sein des Lions indomptables. Tous ces reproches peuvent être fondés comme ils peuvent se révéler tout à fait malveillants.
La seule vérité qui reste incontestable, c’est que Rigobert Song Bahanag a fait rêver tout le Cameroun pendant une quinzaine d’années. Et pour cela, la Rédaction de Camfoot.com lui dit : Merci…..Grand Magnan !
Par Sanga Titi