Les spectateurs l’ont dit. Achille Emana est un artiste. Un styliste qui donne du tournis à ses adversaires. Un orchestre qui manie avec aisance le ballon. Des dribles déroutants, des passes précises, un coup d’œil de lynx, le milieu de terrain camerounais fait surtout preuve d’une mobilité hors-norme qui enchante le public et déchaîne les passions. Devant un tel capital de confiance du N°10 des Lions indomptables si souvent critiqué, un engagement dans tous les compartiments de jeu, le sort des jeunes Panthères semblait scellé, d’entrée de jeu.
Les spectateurs, 40.000 environ, sont visiblement satisfaits du déroulement de la rencontre. Le Cameroun parvient à concrétiser une de ses nombreuses occasions de but à la 24ème minute. Contrairement au match aller du 5 septembre au stade Omar Bongo Ondimba à Libreville, avec des buts sur des phases de jeu collectives en seconde période, les Lions exploitent positivement une balle arrêtée pour ouvrir le score devant Philemon Yang, le Premier ministre. Géremi Njitap au départ. Rigobert Song, Jean II Makoun… à la tombée. Et c’est finalement le sociétaire de l’Olympique lyonnais en France, qui marque du pied. 1-0.
Après une demi-heure de jeu, les Panthères qui ne sont pourtant pas venues à Yaoundé en victimes expiatoires subissent l’outrageante domination des locaux. Alain Giresse, tétanisé, reste scotché sur son banc de touche, admirant le beau jeu et le touché de balle des Lions indomptables, à l’instar d’un geste « zidanesque » d’Achille Emana très ovationné. A la 39ème minute, Samuel Eto’o Fils se procure un ballon à l’entrée de la surface de réparation. Son tir passe au dessus des buts du portier Didier Ovono.
Le réveil des Panthères
La seule réaction des visiteurs en première mi-temps intervient à la 42ème minute. Malgré le coup de sifflet du central tunisien, Benneceur Kacem, pour un hors-jeu signalé par le second juge, l’attaquant gabonais Cédric Moubamba oblige Idriss Carlos Kameni à faire un arrêt de grande classe. Un peu d’action pour réchauffer le gardien de but de l’Espanyol, jusque là tranquille. Alexandre Song, Nicolas Nkoulou, Benoît Assou Ekotto et Rigobert Song forment en effet une muraille infranchissable par les Panthères. Alain Giresse revoit sa copie à la pause. Quelques changements dont l’entrée de Daniel Cousin, le capitaine du match aller, laissé sur le banc de touche.
Dès la reprise, les Lions sont toujours d’attaque. 51’, coup franc de Njitap dévié en corner par le gardien gabonais. Formé par Thomas Nkono après une campagne de prospection au Gabon, Didier Ovono est un pion important de la sélection nationale du Gabon. Calme, il évite le pire à ses coéquipiers, avant de craquer à la 63ème minute. L’excellent Achille Emana, vif, démarre de sa moitié de terrain, balle au pied. Il opte pour la solution Webo. L’attaquant camerounais adresse aussitôt un centre-tir dans les 5m50. Ovono se loupe. Samuel Eto’o surgit. Et, de la tête, aggrave le score : 2-0. La communion avec la tribune populaire (Shaba) est totale. Même s’il garde le brassard en dépit de la titularisation de Rigobert Song Bahanag.
Réduction du score
Les Lions se contentent de gérer. Dans les arrêts de jeu (90’), Daniel Cousin redonne espoir à ses coéquipiers. 2-1. La défense camerounaise n’est pas exempte de tout reproche sur ce ballon pourtant sans danger. Un relâchement que ne semble pas apprécier l’entraîneur Paul Le Guen, debout, mains aux hanches sur la touche. Ni le public qui aura soutenu son équipe de bout en bout.
Avec 7 points, le Cameroun occupe la première place du groupe A, devançant d’une unité les Panthères du Gabon. La méthode Paul Le Guen est en marche. Aucun joueur ne semble indispensable dans son dispositif. A chaque rencontre, il innove en injectant de nouveaux joueurs. Pour la réception du Gabon, Landry Tsafack Nguémo et Alexandre Song Bilong ont fait une entrée remarquable, tandis que Stéphane Mbia, Enoh Eyong et bien d’autres ont disparu des fiches du technicien français.
Les Eperviers du Togo, qui totalisent 5 points seront au menu des Lions indomptables, lors de la cinquième journée prévue au mois d’octobre à Yaoundé. Une rencontre décisive. En cas de victoire, le Cameroun pourrait se qualifier pour la Coupe du monde 2010 si le Gabon ne réussit pas à battre le Maroc. Avec seulement 3 points, les Lions de l’Atlas peuvent encore arracher l’une des trois places pour la Can angolaise. Des supporters gabonais hyper courroussés en veulent à leur nouveau président : « Ali Bongo est venu maudire le Gabon », indique une dame, la trentaine. Tandis que les Camerounais demandent des comptes à l’ancien Ministre des Sports et de l’éducation physique, Augustin Edjoa et sa bande. L’évolution des choses laisse croire que c’était lui le problème.
Jean Robert Frédéric Fouda, à Yaoundé
Fiche technique
– Score: Cameroun – Gabon : 2-1
– Stade: Ahmadou Ahidjo
– Spectateurs : 40.000
– Temps : pluvieux
– Buts : Makoun (24’) et Eto’o (63’)
– Officiels: Ac: Benneceur Kacem (Tunisie), A1 : Melouclchi Yamen (Tunisie), A2 : Saadallah Chokri (Tunisie), A4 : Dedidi Slim (Tunisie). Com: Mathlangu Veli (Afrique du Sud). Inspecteur des arbitres : Magassa Sidi (Mali). Officier de sécurité : Diarra Massa (Mauritanie).
– Equipes:
- Cameroun : 1-Kameni (GK), 8-Njitap, 3- Nkoulou, 2-Assou-Ekotto, 4-Song Bahanag, 13- Nguémo, 11- Makoun (puis Chedjou), 10- Emana (puis Ngom Kome), 6-Song Bilong, 15- Wébo (puis Alo’o Effoulou), 9- Eto’o (cap). Remplaçants : 16-Souleymanou, 5-Bikey, 18-Binya. Coach : Paul Le Guen.
- Gabon : 1-Ovono (GK), 3-Moundouga, 3-Ambourouet, 6-Akouassaga, 17-Brou Apanga, 18-Moubamba, 12-Issiemou 13-Mbanangoy (puis Djissikadie), 7-Nguéma (puis Mouloungui), 14-Aubameyang (puis Cousin), 5-Meye. Remplaçants : 16-Nguéma Bekalle, 4-Nguéma Obame, 15-Do Marcolino, 8-Aubameyang Wily. Coach : Alain Giresse.