Camfoot.com : A un moment, nous étions dernière équipe de notre poule. Est-ce qu’à ce moment, vous croyiez à un retournement de situation ?
Roger Milla: Si. J’étais presque le seul à y croire. Il fallait juste un petit déclic, pour que les choses aillent mieux et dès que ce déclic est arrivé, tout roule parfaitement sur les rails.
Camfoot.com : C’était quoi ce déclic ?
Roger Milla: Il fallait juste le changement de staff. Vous voyez que dès que ça été fait, les résultats ont suivi. L’ancien staff, ne foutait rien. Il comptait sur la qualité individuelle des joueurs. Moralement, il n’était pas en place, il n’arrivait même pas à aligner deux passes. Il fallait un staff, qui allait venir avec une bonne discipline de jeu, dans et autour des lions.
Camfoot.com : Nous sommes à un match du mondial. Est-ce que vous n’avez pas peur du syndrome du 08 Octobre 2005 ?
Roger Milla: Pas du tout. La sérénité est retrouvée, même les joueurs ont envie à fond de jouer cette coupe du monde qui a lieu dans leur continent. Je crois que même là-bas au Maroc, il faudra aller gagner le match, mais en bien le préparant. Il faut donner la chance à ceux qui sont moralement et physiquement prêts à affronter les Lions de l’Atlas.
Camfoot.com : Quelle est donc l’équation à résoudre face au Maroc ?
Roger Milla: Marquer des buts, plus que le Maroc et le public nous connaît. Peut être même qu’il va nous supporter.
Camfoot.com : Mais Excellence, il n’y a que le milieu de terrain qui marque des buts dans cette équipe ?
Roger Milla: Qui vous a dit qu’il n’y a que le milieu qui marque des buts ? C’est vrai que Makoun marque, Geremi aussi, mais n’oubliez pas qu’Emana est un attaquant. Et en plus, Samuel score aussi.
Camfoot.com : Mais reste que notre ligne offensive score difficilement. Je pense à Somen, Webo, ou Meyong
Roger Milla: Il n’y a aucun problème d’attaquant. Eto’o a marqué contre le Gabon en aller retour. Il n’est pas dit qu’il doit marquer tous les jours. Les attaquants travaillent aussi pour le reste de l’équipe.
Camfoot.com : Sans Eto’o, cette équipe ne marque pas…
Roger Milla: Je sais que vous parlez du match contre l’Angola, mais n’oubliez pas que cette équipe ne se repose pas essentiellement sur Eto’o Fils. L’entraîneur a fait jouer l’équipe B, elle n’a pas eu le temps nécessaire pour préparer ce match, je crois que c’est pour cela qu’ils n’ont pas scoré. Ils devaient régler les automatismes et je suis confiant, parce qu’ils ont très bien joué.
Camfoot.com : Qu’est ce que Paul Le Guen a apporté dans cette équipe ?
Roger Milla: La discipline chez les joueurs, dans le jeu. Parce que c’est ça qui faisait défaut. Il y a des joueurs qui pensaient être les patrons de cette équipe. Aujourd’hui, ce n’est plus ça. Il a apporté la discipline sportive, la discipline collective et c’est ça le professionnalisme, parce qu’ils sont pros et ne font pas n’importe quoi dans leurs clubs respectifs. Ce n’est pas au Cameroun qu’ils doivent venir faire se désordre, parce que le Cameroun n’est pas un club. Le club peut disparaître, mais pas le pays.
Camfoot.com : Nous avons des binationaux qui sont assez performants, est-ce que vous ne pensez pas qu’il est temps de les récupérer ?
Roger Milla: Nous n’obligeons personne à venir défendre les couleurs de son pays. Celui qui sent qu’il est Camerounais et peut contribuer pour le rayonnement de cette équipe nationale, il est le bienvenu. Vous savez, il y a beaucoup qui ont refusé de venir joueur en sélection camerounaise, pour la France et qui regrette aujourd’hui. Prenez le cas de Pascal Nouma. Ceux qui veulent jouer avec la nat, sont les bienvenus. Mais, s’ils pensent qu’ils doivent jouer avec la France, ils doivent travailler très dur. Ils doivent savoir qu’ils peuvent jouer un match avec les Bleus, mais après ils seront abandonnés. Je ne vois pas par exemple qui on va enlever comme avant centre en France, pour faire jouer Ngog. Je crois que pour lui et les autres binationaux, le meilleur choix est le Cameroun. Voilà le message que je peux lancer et dire à leur famille de les aider à faire ce choix. Parce qu’on ne fait pas le chantage à son pays. Nous n’avons peut être pas l’argent pour les payer, mais les un ou deux millions qu’on peut leur donner peuvent aider leurs familles.
Entretien mené par Joseph Dzéné à Yaoundé
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