DOUALA, 18 mai – Le débat est aujourd’hui porté sur les soupçons de connexions financières qui pourraient expliquer l’entêtement des autorités camerounaises à faire jouer les Lions avec une tenue « interdite ». Nous sommes allés dénicher pour vous les contours financiers d’un contrat muet.
Depuis le 16 avril le cour de tout un pays bat au
rythme effréné de l’actualité footballistique.
Primo, la sanction de la commission de discipline de la Fifa
infligeant au Cameroun une déduction de six (06)
points avant même que ne commence les prochaines
éliminatoires couplées Mondial/Can 2006, avec en sus
une amende de 200 000 F Suisse (environ 80 millions
Fcfa). La sanction est confirmée en instance de
recours le 12 mai dernier à la grande consternation
des Camerounais et de tous les milliers de supporters
que les Lions indomptables comptent dans le monde.
Secundo, il y l’arrêt du processus électoral à la
Fécafoot marqué par le report de l’assemblée générale
élective qui devrait conduire au renouvellement des
instances dirigeantes de cette institution en charge
de la gestion du football camerounais. Décidé
souverainement par la Présidence de la République.
Tercio, il y a la mise sur pied de la Commission de
relecture préalablement des statuts qui s’est muée par
arrêté du ministre de la Jeunesse et des Sports du 8
mai dernier à tous les textes de la Fécafoot.
Dans l’expectative, on attend impatiemment dans
l’imagerie populaire que le soupçon du rouleau
compresseur qu’on ourdit contre le bureau sortant se
déroule complètement avec la mise en état de la
commission d’enquête annoncée à la suite du
remaniement ministériel du 23 avril dernier dans un
communiqué du Secrétaire général de la Présidence de
la République.
Des velléités qui cachent mal, la volonté de botter en
train le bureau sortant que conduit Iya Mohammed.
Curieusement, on ne parlera pas de l’état de service
de cette équipe qui a présidé aux destinées de la
Fécafoot depuis 2000. Certes, pas avec bonheur, mais
au moins on ne saurait leur dénier une ouvre et une
ambition certaine d’améliorer la gestion de cette
institution qui auparavant était dans la rue
pratiquement, comme aiment à le dire les membres de
cette équipe. Encore moins on ne parle de leur crime.
Si oui cette décision scabreuse et dictatoriale de la
Fifa de faire disputer le Cameroun les éliminatoires
qui démarrent le 4 juin prochain avec un handicap de
six (06) points. Compromettant gravement les chances
de qualification des Lions Indomptables à la phase
finale de la plus prestigieuse compétition mondiale.
Pour une affaire sordide de port du maillot Uniqt (en
une pièce) au-delà du premier tour.
S’il est vrai que la Fifa avait mis en garde les
autorités sportives camerounaises, il est aussi vrai
qu’après avoir manifesté la bonne volonté de changer
ce maillot à polémique après le premier tour, la Fifa
a été saisie de ce que l’équipementier éprouvait la
difficulté de fournir les Lions indomptables d’une
tenue dissociée dans les délais. Ce qui a valu au
Cameroun une clémence comme en témoigne cette
correspondance du secrétaire général de la Caf,
Mustapha Fahmy à son homologue de la Fifa Urs Linsi.
Le 27 janvier dernier. Il va sans dire que la Fifa est
allé au-delà de ce que ces textes prévoient. Ce qui
pourrait laisser fortement voir la connexion et
l’influence de ces équipementiers privilégiés que sont
Addidas et Nike. Les deux marques d’ailleurs ont été choisies disputer le match (France – Brésil) du centenaire de cette institution faîtière du football mondial.
Ce qui tait la chasse aux sorcières qui voudrait qu’on
recherche les responsabilités de cette sanction à la
tête du client au sein des autorités sportives ayant
eu le charge de conduire la délégation camerounaise à
la Can 2004. Pour preuve, en parcourant les textes, on
constate que les articles 51 & 52 de la Commission de
discipline classifient en son paragraphe 2 les fautes
en deux catégories à savoir les fautes mineures et les
fautes graves. Et l’article 74 de la Cdf classe les
violations des lois du jeu dans la catégorie des
fautes mineures. Et précise que la seule sanction pour
une faute mineure est une amende. Et l’article 53 de
la Cdf fixe le montant maximum de l’amende à une
équipe pour inconduite à 15 000 Suisse (Environ 6
millions Fcfa). Par ailleurs l’article 152 de la Cdf
stipule qu’un « club peut se voir réduire le nombre de
points obtenus que dans un championnat en cours ».
Devant ces arguments, il est constant que la sanction
consistant en la déduction des points ne pouvait pas
être appliquée dans la situation. Des arguments
massues qui ont constitué la défense camerounaise,
mais devant lesquels la commission de recours a fait
fi.
Les dessous financiers
Fort curieusement, il se trouve encore des chercheurs
de poux sur des crânes chauves pour demander que l’on
fasse payer cette ivresse de la Fifa à quelques
autorités sportives que se soient. Une incurie,
puisque les enquêtes réclamées sur ceux qui auraient
servi les intérêts supposés souterrains dans cette
affaire de maillots. Comme si nous ignorions que la
Fédération camerounaise de football est liée par un
contrat en bonne et due forme avec ses partenaires !
Ceux-ci révèlent que l’équipe de Iya a signé en début
d’année 2001 des contrats avec Icm pour la négociation
des matches amicaux (rompus depuis un an); Sports +
pour la régie exclusive des droits de marketing et
d’exploitation audiovisuelle et Puma pour être
l’équipementier officiel des équipes nationales de
football pour une durée de six (06) ans. Pour une
retombée globale de plus de 4,3 milliards Fcfa que le
Cameroun engrange. Cette rondelette somme est ainsi
repartie:
– Puma y contribuera de manière forfaitaire à hauteur de
: 1,1 milliard Fcfa. Soit en 2001 : 130 millions Fcfa;
2002 : 200 millions Fcfa; 2003 : 150 millions Fcfa;
2004 : 160 millions Fcfa; 2005 : 170 millions Fcfa et
en 2006 : 200 millions Fcfa. Uniquement pour la
sélection senior.
En outre, l’équipementier s’est engagé à verser
pendant cette période pour les Can et les Jeux
Olympiques 30 millions Fcfa pour chacune des
qualifications; 30 millions Fcfa pour le passage en
1/4 de finale; 40 millions Fcfa pour le passage en 1/2
finale; 52,5 millions Fcfa pour la place de finaliste
et 75 millions Fcfa en cas de victoire finale. Ce qui
voudrait dire que les Lions et les responsables
directs de la cellule administrative provisoires du Minjes se sont partagés en la Can 2002, 197,5 millions Fcfa et à
la Can 2004, seulement 60 millions Fcfa. On s’imagine
ce que la non-qualification pour les JO a fait perdre
à tout ce beau monde.
Pour la Coupe du monde, l’équipementier verse 45
millions Fcfa de primes de qualification aux joueurs,
45 millions Fcfa pour avoir atteint les 1/8è de
finale; 105 millions Fcfa pour le cap des 1/4 de
finale; 150 millions Fcfa pour le cap des 1/2 finale
et 225 millions Fcfa pour la place de finaliste et 375
millions Fcfa en cas de victoire finale. Ce qui ferait
la somme de 945 millions Fcfa que se partage joueurs
et encadreurs. C’est dire que lors de la coupe du
monde 2002, les Lions n’auront reçu que 45 millions
Fcfa pour une perte sèche de un peu plus de 900
millions Fcfa. Ce que les Lions rateraient en cas de
non-qualification au mondial 2006.
Pour la Coupe des Confédérations de France, Puma a
honoré ses engagements en versant 120 millions Fcfa
aux Lions sur les 195 millions Fcfa prévus en cas de
victoire finale. Soit 30 millions Fcfa pour la
qualification; 10 millions Fcfa pour le passage au
second tour; 30 millions Fcfa pour le cap des 1/2
finales, 50 millions Fcfa pour la place de finaliste
et 75 millions en cas de victoire finale.
En plus des équipements que Puma offre à toutes les
équipes nationales.
– Sport plus pour sa part s’est engagé à verser un
minimum garanti annuel de 250 millions Fcfa, 300
millions Fcfa en 2002; 400 millions Fcfa en 2003; 450
millions Fcfa en 2004; 500 millions Fcfa en 2005 et
550 millions Fcfa en 2006. Pour un total de 2, 450
milliards pendant toute la durée du contrat.
Précisons que ces retombées financières sont reparties
conforment à l’article 14 de la convention Minjes –
Fécafoot. Soit pour 55% au Minjes et 45 % à la
Fécafoot pour les recettes venant de Puma et pour les
celles venant de Sport Plus 25% au Trésor Public; 10 %
aux infrastructures, 5% aux joueurs et encadreurs et 60
% à la Fécafoot.
La prime à la signature a été de 187,5 millions Fcfa
dans l’ensemble. Puma ayant versé 125 millions Fcfa et
Sport plus 62,5 millions Fcfa. Il faudrait aussi
ajouter la valeur ajoutée que verse Puma chaque année
sur les maillots de Lions vendus dans le monde. Le
maillot démembré des Lions à la Can et au mondial 2002
a rapporté ainsi un peu plus de 120 millions Fcfa.
A vos calculettes pour le jeu de huit erreurs. Au bout
du compte, chacun décéléra sur ce que le Cameroun
engrange de Puma et ce que les dirigeants de la
Fécafoot et les responsables du Minjes auraient alors
bénéficiés jusqu’ici dans les basses manœuvres et de
ce qu’ils bénéficieront dans les mois à venir. Bon
vent !
Mathieu N. Njog