Matchs truqués, joueurs, arbitres et dirigeants achetés… Le livre choc du journaliste canadien Declan Hill révèle l’ampleur de la corruption dans le monde du ballon rond. Le Cameroun n’est hélas pas épargné (est-ce une surprise ?) par ce livre évènement. Au pays des Lions indomptables même si la mode n’est pas aux paris sportifs, la formule est hélas la même : l’argent toujours l’argent.
Au Cameroun, le pari sportif n’est pas ce qu’on peut appeler un culte. Hormis les paris informels entre particuliers, il est presque inexistant. Pas sûr donc que les réseaux de parieurs illégaux qui brassent des millions de dollars en Asie et en Europe s’y intéressent, à moins que la MTN Elite one ne devienne subitement un filon juteux. Cela ne risque certainement pas d’être pour demain, car pour le moment les compétitions locales sont bien moins vendeuses que les Lions indomptables. Originalité locale, l’argent circule généralement plus en fin de saison lors de la course au maintien. La méthode n’est pas différente de celle révélée par Declan Hill, il suffit de soudoyer le corps arbitral, les dirigeants de clubs ou les joueurs. Ces affaires qui ont ébranlées le paysage du football camerounais en sont la parfaite illustration.
1. L’affaire Sable de Batié- Foudre d’Akonolinga
A l’issue de cette rencontre comptant pour la 30e et dernière journée de la dernière édition de la « MTN Elite One » le championnat national d’élite, le score de zéro but partout fut enregistré au coup de sifflet final et la formation de Sable Batié s’adjugeait ainsi le point du nul afin d’assurer son maintien au sein de l’élite nationale. Non content dudit résultat, le Directeur Général de la Foudre sportive d’Akonolinga, Pierre Lebon Elanga a vertement décrié la « complaisance » du trio arbitral (Mal Souleymanou – Boya Kedi – Menye Mpele) qui avait prétexté un « hors jeu imaginaire » pour ne pas valider l’unique but inscrit par son équipe au cours de cette partie. Selon des sources crédibles proches de l’Association Camerounaise des Arbitres de Football (Acaf), c’est sous la menace des éléments de la Police judicière que l’arbitre international Mal Souley a remboursé la somme de 800 mille F Cfa reçue des dirigeants de la Foudre qui tenait coûte que coute à maintenir leur équipe menacée de relégation en D1.
2. L’affaire Bamboutos de Mbouda
Lors d’une rencontre de la 30è journée du championnat national (édition 2007), Bamboutos dont le maintien en première division n’était pas encore assuré, rencontrait Fédéral de Foumban déjà condamné à la relégation. Pour s’imposer, Bamboutos aurait introduit sur le terrain en plein match, une enveloppe d’argent pour corrompre un joueur de Fédéral du Noun. La Fédération camerounaise de football sur la base des rapports de plusieurs témoins, et notamment des officiels du match, a reconnu la culpabilité de Bamboutos de Mbouda et a sévi. L’équipe de Mbouda a été reléguée en troisième division.
Bref, les situations décrites par Declan Hill sont coutumes au Cameroun. Lors de la saison 2006 déjà, c’est Mount Cameroon de Buéa qui était pointé du doigt pour corruption. Une saison plus tôt, c’est le président de Tonnerre de Yaoundé qui a publiquement déclaré avoir reçu de l’argent pour fausser un résultat du championnat national en faveur de Coton sport de Garoua. Rien de nouveau donc dans notre paysage footballistique. La balle est désormais dans le camp des dirigeants du football pour endiguer le mal. Concluons juste comme notre confrère canadien avec cette citation de l’avocat antiesclavagiste William Wilberforce, qui, en 1789, dénonçait en ces termes les atrocités commises sur les navires négriers : « Maintenant que vous avez entendu tout cela, vous pouvez choisir de détourner votre regard, mais vous ne pourrez plus jamais dire que vous ne saviez pas. »