« Il a dit ne pas manquer de motivation, de fibre patriotique, ne pas avoir de problème avec quelque individu ; mais tenir sur des raisons «personnelles». Je suis rentré avec une désillusion mais le constat est simple: il n’a plus envie et un joueur qui n’a plus envie, ponctuellement, ne peut avoir un bon résultat. »
On a à nouveau beaucoup glosé au Cameroun ces derniers temps autour de l’intransigeance d’Etame Mayer à retourner à l’équipe nationale: vous étiez en mission commandée chez lui, que vous a-t-il dit, au juste?
Le ministre m’a envoyé pour faire une ultime tentative de conciliation. Je suis parti avec l’idée qu’il y avait là quelqu’un qui avait connu quelques belles heures avec l’équipe du Cameroun et qui allait se rappeler des bons souvenirs et du bien-être qu’on trouve à être parmi les Lions. Malheureusement, il m’a dit qu’il avait des raisons personnelles, sans plus d’explication. Il a dit ne pas manquer de motivation, de fibre patriotique, ne pas avoir de problème avec quelque individu ; mais tenir sur des raisons «personnelles». Je suis rentré avec une désillusion mais le constat est simple: il n’a plus envie et un joueur qui n’a plus envie, ponctuellement, ne peut avoir un bon résultat. C’est une désolation certes, mais en tant que ancien joueur, je suis obligé de me plier devant sa décision, en dépit du fait qu’il nous manque à tous, une explication claire sur cette affaire.
En d’autres termes, Etame et les Lions, c’est fini?
Ça fait bien trois ans qu’on espère, en se disant demain peut-être, en accumulant les «peut-être». Mais il faut bien se rendre à l’évidence: aujourd’hui, Etame n’est pas avec les Lions.
Vous étiez avec les Lions au moment de sa décision; que s’est-il passé à l’époque?
Je ne pense pas qu’il faille spéculer là-dessus. Il a ses raisons, que je ne connais pas et que peu de gens connaissent. Je n’ai pas réussi à lui tirer les vers du nez; donc j’accepte sa décision. Je suis maintenant un supporter des Lions: j’aurais sans doute été plus heureux avec un joueur de sa trempe au sein de l’équipe nationale. Il faut donc accepter que, de toute façon, les Lions resteront toujours forts.
Roger Milla a semblé dire, récemment, qu’il comprenait l’attitude d’Etame, accréditant ainsi l’idée du «désordre» dans cette équipe: faut-il en fin de compte un mal pour un bien; une multiplication des «cas Etame» pour remettre l’organisation et la gestion de cette équipe à niveau?
Etame n’a justement pas parlé de problème à ce niveau; je ne vois donc pas ce qu’on serait obligé d’y changer. On a cependant la volonté de voir les choses changer, raison pour laquelle on continue à essayer d’être performants parce que les mauvais résultats n’aideront sûrement pas, à mon sens. J’entends certains dire qu’il faudrait que les Camerounais n’aillent pas à la Coupe du monde pour qu’on réagisse; mais je pense que les résultas doivent être vécus comme une expérience, qui nous permet aussi d’apprendre. Le Cameroun a une culture de la gagne qu’il faut maintenir et améliorer certaines choses. Je ne pense pas que la décision d’Etame soit liée à des problèmes organisationnels. Logiquement, si les choses doivent évoluer, c’est aussi parce que tout le monde devra apprendre à être professionnel dans son secteur; et à cet effet, nous sommes sur la bonne pente et les incidents devraient diminuer à l’avenir.
Les Camerounais semblent aujourd’hui un peu las autour de cette affaire, en se disant, «on a tout tenté»: comprenez-vous et partagez-vous cet état d’esprit?
Ça fait trois ans qu’il a pris du recul avec les Lions. Les Camerounais continuent cependant de le voir jouer régulièrement et savent clairement ce qu’il fait, quelle est sa valeur. Je ne crois pas qu’il y ait une lassitude; tout au plus, une incompréhension à la suite d’une attente qui est longue. On a cherché à le ramener et on le fera sans doute encore à l’avenir. Mais, les Lions sont les Lions: leurs résultats n’ont jamais, heureusement, dépendus d’un homme, mais d’un groupe, d’un caractère. Et les joueurs qui sont en place en ce jour ont très envie d’être en Allemagne l’année prochaine.
Propos recueillis par Serge Alain Godong, à Paris