« J’ai la nette impression qu’il faut remettre tout à plat et avoir le courage de recommencer » … « Un spectacle désolant comme celui qu’ont produit Assou Ekotto et Moukandjo en mondovision, c’est une honte pour notre pays, pour cette équipe nationale. Je crois que ceux qui ont porté cette équipe nationale au haut niveau, quand ils vivent ce genre de spectacle, ils en souffrent énormément »
Quelle appréciation faites-vous de la prestation des Lions Indomptables face à la Croatie ?
Dans l’ensemble, c’est une prestation très décevante, parce qu’on n’attendait pas que ce soit le déluge comme ça. On savait que ça allait être très dur contre cette équipe de Croatie mais, pas à ce niveau-là. On a compris à partir de ce match qu’il y a des gens qui n’ont pas leur place dans cette équipe et cela s’est vérifié. Vous ne pouvez pas être à ce niveau de la compétition et vous commettez des erreurs de jeunesse, naïves, telles que l’a fait Alexandre Song. C’est dommage. Il a mis ses coéquipiers en difficulté et nous l’avons payé cash.
Quel regard portez-vous sur la prestation technique de l’équipe dans ce match ?
Dans l’ensemble, tactiquement, l’équipe a voulu aller chercher l’adversaire dans son camp. Mais, quand on veut presser haut, il faut toujours resserrer les lignes derrière. Il faut respecter les distances entre les joueurs et entre les lignes. Parce que, lorsqu’on persiste dans un 4-3-3, il faut absolument respecter le bloc équipe. Il y a la distance entre les joueurs et celle entre les lignes. A partir de là, dès qu’on desserre un peu, il est difficile de rattraper une action. Les croates nous ont observés, nous ont laissés venir un peu pour voir notre comportement. L’entraîneur croate avait annoncé cette couleur en disant qu’ils allaient nous observer pendant un temps avant de prendre le jeu à leur compte dès lors que Samuel Eto’o ne jouait pas. On aurait même pu faire la différence pendant qu’ils observaient. Malheureusement (…)
C’est pourtant tout ce qu’on a de notre effectif …
Les exigences de la Fifa imposent sept types de joueurs. Je suis obligé de le rappeler ici. Il faut un joueur buteur, un leader, un meneur, un créateur, c’est-à-dire celui qui a les poumons, de l’énergie, le porteur d’eau, il faut un protecteur, ainsi de suite. Il faut avoir au minimum quatre de ces types de joueurs (…) Maintenant, est-ce qu’on a un créateur qui peut porter sur lui de faire le match à fond ? Est-ce que nous avons encore un joueur protecteur, avec une défense aussi poreuse ? J’ai la nette impression qu’il faut remettre tout à plat et avoir le courage de recommencer, relancer véritablement la prospection au niveau local, interne, c’est-à-dire donner une vraie chance à ceux qui jouent encore au terroir, avant de voir qui peut venir de l’autre côté compléter pour apporter véritablement un plus. Un spectacle désolant comme celui qu’ont produit Assou Ekotto et Moukandjo en mondovision, c’est une honte pour notre pays, pour cette équipe nationale. Je crois que ceux qui ont porté cette équipe nationale au haut niveau, quand ils vivent ce genre de spectacle, ils en souffrent énormément.
D’aucuns estiment que le gardien de but a été moyen et n’est pas exempt de tout reproche. Qu’en pensez-vous ?
Je dois dire que le gardien de but (Charles Itandje, ndlr) est passé complètement à côté de son sujet. Que ce soit les relances, la lecture de jeu, l’anticipation et l’interception, rien n’a réussi à ce gardien de buts dans ce match.
Sa prestation ne reflète-t-elle pas la ligne défensive ?
On a remplacé un défenseur central (Aurélien Chedjou, ndlr) alors qu’on n’aurait pas dû commencer avec lui. Tout le monde l’a décrié. On ne pouvait pas jouer avec Chedjou qui est certes volontaire, mais qui accusait des lacunes au niveau du jeu aérien et au sol où il était complètement en retard. Il n’a pas fait des matchs de préparation pour huiler la charnière centrale. On l’a imposé et il a fait les deux matchs (ou un match et demi). Avant de revenir à une formule qui semblait marcher. Malheureusement, on avait déjà pris un coup, avec ce carton rouge. D’ailleurs, tous ceux qui sont avertis dans le football avaient compris bien avant qu’Alexandre Song n’a pas de place dans cette équipe. Il avait moins de dix matchs dans les jambes et on ne peut pas à ce niveau de la compétition, on ne peut pas aller en aventure comme nous l’avons fait, avec des « sénateurs » – excusez-moi du terme – comme Alexandre Song, alors que la Fifa exige 60 matchs dans les jambes. Il faut avoir au moins un quarantaine dans les jambes et le joueur qui a le plus de matchs dans les jambes comme Joël Matip s’est vu privé d’une place de titulaire à l’entame de cette compétition à cause d’Alexandre Song et Chedjou. L’essentiel est de gagner en leçons, mais la douleur est assez profonde. Et le charisme que je réclamais déjà de l’entraîneur principal actuel (Volker Finke, ndlr) se voit aujourd’hui dans la rue. Je crois qu’il faut revoir ce qui fait problème afin que le Cameroun reprenne l’ascension. Au niveau de l’attaque, Aboubakar Vincent, ne méritait même pas de jouer un seul match, parce qu’il est en surpoids, et ne peut pas supporter le rythme.
N’y a-t-il pas des satisfactions dans ce match ?
Mais, il faut féliciter un garçon comme Stéphane Mbia, qui est là pour dépanner et on n’arrive pas à le fixer définitivement. C’est là où il y a le mal qu’on l’envoie essayer de réparer. Il faut le responsabiliser définitivement à un poste. C’est un garçon qui a un potentiel énorme. Au milieu de terrain, il a fait ses preuves derrière les attaquants. Même dans la charnière centrale, on l’a vu dans ses différents clubs. Si nous avons le mal à droite, il faut le responsabiliser une fois pour toute, pour qu’il travaille le jeu au poste où on devra le responsabiliser.
Il y a un dernier match contre le Brésil …
C’est un match où l’adversaire vient chercher la première place et pour y arriver, il faut vraiment marquer des buts pour améliorer le goal-average. Le Brésil a déjà mis le clignotant et il faut faire très attention. Et à partir de là, le staff technique doit mettre quelque chose en place pour limiter la casse.
Entretien mené par Antoine Tella à Yaoundé