Jamais autant de spécialistes ne s’étaient accordés à dire que le football africain est sur le point d’atteindre un niveau où il peut espérer obtenir des titres, y compris lors de la Coupe du Monde de la FIFA. De toutes parts, on prédit qu’en 2010, une équipe du continent africain, qui accueillera la phase finale de la compétition, arrivera en demi-finales. Et quand on parle de l’élite africaine, il est forcément question du Cameroun. Car les Lions Indomptables comptent depuis toujours parmi les meilleures équipes de la Confédération Africaine de Football.
A cette occasion, l’entraîneur de l’équipe nationale du Cameroun, Otto Pfister, livre au micro de FIFA.com ses impressions sur l’épreuve reine, qui aura lieu dans deux ans en Afrique du Sud, ainsi que sur les qualifications et sur la situation du football africain en général. Le sélectionneur allemand, âgé de 70 ans, sait très bien de quoi il parle : avant son entrée en fonction au Cameroun, il a notamment contribué à écrire l’histoire des équipes nationales du Togo, du Ghana, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal et du Rwanda. Il connaît donc la mentalité du continent africain mieux qu’aucun autre.
Otto Pfister, la phase qualificative de la Coupe du Monde de la FIFA s’est parfaitement bien déroulée pour votre équipe, jusqu’à présent. Accéder au prochain tour ne semble plus qu’une formalité pour vous…
Les choses se présentent assez bien pour nous, car nous n’avons plus qu’un point à obtenir sur les deux matches qui restent pour pouvoir accéder au prochain tour. Toutefois, le prochain match, au Cap-Vert, sera aussi le plus difficile de ce tour. Nous allons nous rendre fin août dans un camp d’entraînement pour nous préparer à la pelouse artificielle, car c’est ce qui nous attend là-bas.
« Nous gagnons nos matches, certes, mais nous devons devenir encore plus efficaces et confirmer nos progrès »
Otto Pfister, à propos du niveau de la sélection camerounaise
Est-ce que vous pensez que l’on sous-estime le Cap Vert ?
Nous savons tous que maintenant, il n’y a plus de « petites équipes ». Les Capverdiens jouent le contre très intelligemment et ils ont de nombreux joueurs évoluant aux Pays-Bas, au Portugal et en Espagne. Nous devons être vigilants, car nous ne sommes pas infaillibles. Nous gagnons nos matches, certes, mais nous devons devenir encore plus efficaces et confirmer nos progrès. De plus, il ne faut pas oublier que Samuel Eto’o ne jouera pas en raison de sa suspension pour cartons jaunes.
Quelles sont les attentes envers le Cameroun, qui a manqué le titre de peu en Coupe d’Afrique des Nations ?
Le fait que nous soyons allés jusqu’en finale a été pris comme quelque chose de très positif au Cameroun. Notre défaite a bien sûr été très amère, mais nous avons tourné la page. Il y avait une grande pression avant la Coupe d’Afrique. Je n’avais pris en charge ma nouvelle équipe que neuf jours avant le tournoi. De toute façon, pour être honnête, entraîner le Cameroun, cela signifie avoir toujours de la pression.
Comment va le football africain en ce moment, d’après vous?
Le football africain a énormément évolué, cela ne fait aucun doute. On a pu voir très clairement une progression lors de la Coupe d’Afrique des Nations, sur le plan tactique aussi bien que sur le plan technique. Un pas en avant a été effectué. Je dirais que c’était la meilleure Coupe d’Afrique qu’il y ait jamais eu. Les équipes africaines ont définitivement trouvé leur place au sein du football mondial.
« Je pense qu’il est réaliste de dire que nous verrons une équipe africaine en demi-finales en 2010 »
Otto Pfister, à propos du niveau du football africain
Comment envisagez-vous la Coupe du Monde de la FIFA, Afrique du Sud 2010 ?
Les équipes les plus fortes sont le Nigéria, la Côte d’Ivoire et nous – en fonction de notre état de forme. Je pense qu’il est réaliste de dire que nous verrons une équipe africaine en demi-finales en 2010. Mais l’avantage d’évoluer à domicile joue évidemment aussi un rôle, car pour ce qui est du climat, de l’environnement, des terrains, de l’atmosphère en général, les équipes africaines seront bien sûr plus habituées.
Vous semblez très optimiste quant à votre qualification pour la compétition…
Nous avons de très sérieuses chances d’aller en Afrique du Sud. Mais cela va dépendre du tirage au sort du dernier tour des qualifications. Je suis dans le métier depuis suffisamment longtemps pour savoir qu’il faut toujours une petite part de chance pour réussir.
Les équipes d’Afrique du Nord dominent sur leur continent alors qu’elles n’ont jamais vraiment réussi à briller en phase finale de Coupe du Monde de la FIFA. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
J’expliquerais cela de la façon suivante : au sud du Sahara, les infrastructures sont moins bonnes qu’en Afrique du nord. Et les championnats d’Afrique du nord sont aussi bien meilleurs. J’ai été pendant plusieurs années l’entraîneur du Zamalek, au Caire, et je dois dire que la première division égyptienne est au moins aussi forte que la première division suisse, par exemple. Grâce à leurs infrastructures, les équipes d’Afrique du Nord sont clairement avantagées par rapport au reste du continent.
En revanche, pour une Coupe du Monde, c’est plutôt la qualité du football qui fait la différence et le potentiel de l’Afrique noire est supérieur. La preuve, de nombreuses vedettes de ces pays sont sous contrat dans des clubs d’Europe. Notre propre cas en est un exemple. En tant qu’entraîneur de l’équipe nationale du Cameroun, lorsque je sélectionne mes joueurs, je ne dois pas penser à qui je nomme, mais me demander de qui je peux me passer.
« Modeste M’Bami, qui joue à Marseille, est un joueur qui se donne toujours à fond et qui est déjà quasiment intransférable »
Otto Pfister, à propos des meilleurs joueurs camerounais
Quel est le prochain talent du Cameroun qui va faire sensation sur la scène internationale ?
Alexandre Song, d’Arsenal, est très prometteur, d’ailleurs ça avait fait des histoires avec les journalistes la première fois que j’avais fait appel à lui, parce que personne ne le connaissait. Modeste M’Bami, qui joue à Marseille, est un joueur qui se donne toujours à fond et qui est déjà quasiment intransférable. Il y a aussi Christian Pouga, qui quitte la Suisse, où il a fait un malheur, pour le FC Séville. Et bien sûr Somen Tchoyi, qui évolue au Red Bull Salzbourg, au sein de l’élite autrichienne.
Pour conclure, tournons-nous vers Pékin, où se déroule actuellement le Tournoi Olympique de Football 2008. Le Cameroun y participe. De quoi croyez-vous votre équipe capable ?
Je pense que le Tournoi Olympique est pour le Cameroun une bonne occasion de laisser son empreinte. Il y a huit ans, les Camerounais ont gagné la médaille d’or à Sydney. Je suis optimiste pour cette année. L’équipe a en tout cas de bonnes chances d’accéder aux quarts de finale.
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