Notre consultant pour cette coupe du monde junior revient sur la rencontre disputée et perdue par les Lionceaux face au Portugal. Le technicien évoque sans complaisance les lacunes de l’équipe camerounaise et propose des pistes pour se tirer d’affaires contre l’Uruguay vendredi prochain à Bogota.
Quelle est l’analyse technique que vous faites du match Cameroun-Portugal ?
D’entrée de jeu nous sommes passés à côté du sujet. Cette équipe lors du premier match m’a paru plus compétitive, plus engagée, plus élaborée dans son jeu. Mais dans ce second match, les joueurs ont affiché une désinvolture déconcertante, en multipliant des passes à l’adversaire, en étant indiscipliné tactiquement sur le terrain. Il a manqué la gnack comme disent les techniciens. Ils se sont ressaisis vers la fin, mais vous savez en haute compétition les erreurs ne pardonnent pas. On paye cash. Je crois qu’on aurait intérêt à mieux s’organiser défensivement de manière a ce que nous puissions avoir une couverture mutuelle lorsque nous sommes en défense parce que hier, nous avons joué sans couverture, et l’erreur au niveau de l’axe central l’adversaire a profité aux attaquants.
D’une manière générale, il faudrait qu’on adopte une attitude collective en défense. Il faut une complémentarité mutuelle, une couverture mutuelle. En attaque, être plus rapide, plus incisif et créer des occasions et des possibilités de manière à ce que nous soyons plus nombreux dans la surface de vérité de l’adversaire lorsque les balles viennent sur le côté. Vous avez constaté que nous attaquons avec un seul bonhomme et lorsqu’il faut faire un centre c’est difficile. D’ailleurs, si nous étions plus nombreux devant à la première minute on marquait le but. Il faut revoir le schéma tactique de l’équipe de manière à ce que nous puissions être conquérants, que nous puissions être incisifs.
Comme lors du premier match, les défenseurs ont une fois de plus offert le but à l’adversaire. Qu’est ce qui peut expliquer que des défenseurs qui jouent ensemble depuis quelques temps offrent ce genre de cadeaux ?
Tel que nous avons vu hier, je crois qu’ils ont paniqué. Ils ont joué avec la peur dans le ventre. Ils n’ont pris aucun risque, n’étaient pas inspirés du tout. Je crois que ce qu’il y a lieu de faire aujourd’hui c’est de leur tirer les oreilles, en insistant sur le repositionnement en défense et de deux, les libérer un tout petit peu parce qu’on a vu dans les autres matches les défenseurs monter soutenir l’attaque, chose que nous faisons moins. Je crois que si pour le dernier match contre l’Uruguay ils se jettent à l’eau parce qu’on n’a plus rien à perdre, en étant plus courageux, plus audacieux, on peut tirer notre épingle du jeu.
Pour ce dernier match quel est le schéma qu’on adopte quand on est dos au mur et face à un adversaire qu’on a regardé jouer à deux reprises ?
Vous savez en haute compétition il y a l’équilibre des forces aujourd’hui. Tous ont deux matches dans les jambes. Il faudrait jouer prudemment tout en sachant exploiter les occasions de but qui arriveront. Il faut être incisif, être inspiré, avoir de la lucidité en attaque. Je pense que pour ma part qu’au lieu de rentrer dans des théories philosophiques, il faut dire qu’aujourd’hui, il y a un ballon pour onze joueurs, il y a un porteur de balle et en face de lui un défenseur qui cherche à récupérer le ballon. Quand nous avons le ballon essayons de mieux nous organiser, allons un peu plus vite dans le camp de l’adversaire pour essayer de faire la différence. Lorsque nous avons perdu le ballon essayons de nous remettre rapidement en défense pour empêcher à l’adversaire de jouer. Vraiment si nous essayons de faire cet effort, je crois qu’on peut tenir la route. Mais si nous continuons à vouloir jouer de manière stéréotypée, on risque avoir beaucoup de problèmes. L’Uruguay a une force au milieu de terrain, les milieux défensifs de cette équipe sont grands, il faut être vigilants afin de mieux exploiter toutes les occasions de but qui arrivent.
Que répondez-vous à ceux qui pensent que la plupart de nos joueurs sont dépassés par le niveau de la compétition? Est-ce qu’on peut penser que certains de nos joueurs auraient atteint leur seuil technique ?
Je crois qu’il y a aussi un peu ça, parce que la coupe du monde c’est un cran au dessus de la coupe d’Afrique des nations. Je regrette une chose, c’est l’absence de nos joueurs tels que Salli, Aboubakar, Zoua, Matip. Si ces joueurs avaient été là, je crois qu’on ne parlerait pas de matches. Ce n’est pas une excuse, on est obligé de faire avec. On doit utiliser tous les moyens pour au moins se tirer d’affaires, c’est le seul moyen qui nous reste pour pouvoir espérer continuer la compétition sinon nous sortirons les larmes aux yeux.
Devant une telle situation, qu’est ce qui se passe dans la tête de l’entraîneur. Est ce qu’il se dit que s’il perd le dernier match, il risque aussi de perdre son poste ?
L’entraîneur doit rester toujours lucide. De toutes les façons, c’est le chef de bord. S’il baisse les bras, automatiquement ça se ressent sur ses joueurs. Il doit absolument les galvaniser tout en trouvant des mots justes pour pouvoir les remonter de manière à ce qu’on continue. S’il lâche, c’est terminé.
Vous avez discuté avec Martin Ndtoungou Mpilé. A t-il le moral ?
Il a le moral. Il va certainement exploiter les éléments que nous avons pu prendre lors du match en levée de rideau Uruguay – Nouvelle Zélande. Notre poule est difficile. L’entraineur doit rester serein pour donner de bons conseils à ces enfants, les galvaniser pour qu’ils fassent la différence vendredi prochain.
Entretien mené par Guy Nsigué à Cali (Colombie)