Les médias égyptiens ont réussi à créer une psychose autour des obstacles imaginaires que Cotonsport aurait dressés sur le chemin du sixième sacre continental d’Al Ahly. Eviter les écueils, braver la chaleur accablante, supporter le peu de confort, constituent le leitmotiv des égyptiens pour qui, cette finale retour de la champions league africaine est une « question de vie ou de mort ».
Autre match autre crainte. Serait-on tenté de dire. Au match aller, c’est l’impartialité du corps arbitral qui était remise en cause. Une forme de pression indirecte dont l’impact sur certaines décisions arbitrales est non négligeable. A quelques jours du match retour, les craintes se dirigent plutôt vers les obstacles érigés par Cotonsport qui s’est dérobé du b – a ba de l’hospitalité. Un potentiel bouc émissaire est créé, et les médias, avec leur pouvoir de conditionnement sont chargés de faire le reste.
Ici on sait que Garoua est une « jungle » qu’on ne peut rallier que par train après 14 heures d’un voyage éreintant. Les hôtels sont d’un piètre standing. Le climat est invivable. Dans un scénario burlesque, un reporter décrit le voyage de l’émissaire d’Al Ahly à Garoua comme une œuvre salvatrice qui a évité l’enfer à Al Ahly. Les commentaires les plus fantaisistes parlent d’un Hossam al-Badri qu’on aurait hué et conspué, puis expulsé du stade Roumdé Adjia lors de la rencontre Coton Sport/Matelots, rencontre interrompue par l’arbitre après que le public a envahi l’aire de jeu. Face à l’apathie des dirigeants de Coton Sport, très peu disposés à collaborer, l’émissaire a fortuitement rencontré Issa Hayatou, qui s’est saisi du dossier et a débloqué la situation ! Le tact des diplomates égyptiens -dont il faut saluer la bravoure et le sens du patriotisme- a aussi beaucoup joué dans l’aplanissement des obstacles !
Face à une telle escalade verbale, il a donc fallu que l’émissaire en question apporte un démenti pour faire tomber la fièvre. Cherif Ra’fat le consul égyptien au Cameroun interviendra en direct dans l’émission « Shobeir Ma’ Koora » à la chaîne al-Hayât, présentée par l’ancien gardien international Ahmad Shobeir, pour prescrire un « anxiolytique » à un public très remonté contre Coton Sport, et déclarer que les autorités camerounaises en général et celles de Garoua en particulier n’ont ménagé aucun effort pour que la finale se déroule dans de bonnes conditions.
Cette sortie du Consul égyptien, même si elle a mis du baume sur les tourments d’Al Ahly, n’a pas pu dissiper ses craintes.
La délégation d’Al Ahly conduite par Hassan Hamdi président du club, arrive à Garoua ce vendredi par vol spécial. Tout est prévu pour garantir un séjour des plus tranquilles aux « diables rouges ». Les vivres, le couvert, de l’eau minérale, rien n’est laissé au hasard. Le cuisinier en chef de la chaîne des restaurants « bon appétit » sera du voyage.
Les craintes crées et entretenues par les médias contrastent avec l’atmosphère festive dont le décore se plante petit à petit. La rencontre de Garoua est perçue comme un simple match de gala à l’issu duquel Al Ahly montera à la première marche du podium pour recevoir « son » trophée déjà acquis au Caire. Les discussions sur l’accueil triomphal des « héros de Garoua » sont passionnantes. Les chaînes de télé matraquent déjà les chansons composées à la gloire d’Al Ahly. Un charter de supporters quitte le Caire dimanche matin, jour du match. Plus de deux cents supporters sont attendus à Garoua. Les diplomates égyptiens, les coopérants d’Al Azhar, les entrepreneurs d’Arab contractors basés au Cameroun et en Guinée équatoriale vont se joindre à eux pour pousser Al Ahly vers un sixième sacre continental.
Mais ce sixième sacre, il faudra cravacher dur pour le décrocher. Ces médias prompts aux diatribes les plus acerbes, rompus à l’intoxication la plus abjecte, savent que Coton Sport est difficile à manœuvrer à Garoua. C’est sans doute la peur d’un revers à Garoua qui motive ce tapage médiatique vil dont l’objectif inavoué est de préparer l’opinion publique à avaler la pilule amère.
Moustapha Nsangou, au Caire