Manuel José a raison de dédier cette victoire aux supporters d’Al Ahly. Ceux-ci, comme à leur habitude d’ailleurs, sont les premiers artisans de la victoire d’Al Ahly sur Cotonsport. Ils ont poussé leur équipe dès le coup d’envoi jusqu’au coup de sifflet final.
La marrée humaine était celle des grands jours. La nuée « rouge » qui venait de toute part et convergeait vers le stade international du Caire, présageait une ambiance infernale, un tsunami qui a balayé la centaine des supporters de Cotonsport dont la présence ne fut qu’une tache blanche dans un océan rouge. Hors du stade, les files sont vertigineuses, les masses ne font qu’affluer. Le stade, à deux heures du match, est déjà rempli aux trois quarts. Sur les banderoles, les messages sont dithyrambiques pour Al Ahly et ironiques pour Cotonsport : « Notre route vers le Japon est pavé de laine et non de Coton », « Il y a du coton pour le rembourrage de vos matelas »! Les vivats, les chants sont stridents. Les écrans géants repassent les épopées d’Al Ahly, avec en fond sonore la musique religieuse de Hicham Abbas. C’est dans cette ambiance survoltée que les joueurs de Cotonsport qui n’ont pas été retenus parmi les 18 sont hués à leur entrée à la tribune d’honneur. La température monte, et pour mesurer la capacité de communion entre le douzième joueur et les 11 joueurs de champs, Manuel José fait un tour inopiné sur l’aire de jeu, son apparition arrache des applaudissements nourris. Le lusitanien fait signe des deux mains à l’endroit des supporters comme pour les rassurer de la victoire. Un autre moment d’hystérie interviendra lorsque les joueurs d’Al Ahly fouleront le gazon pour les échauffements, Abou Treika, évidemment, gagne à l’applaudimètre.
A quelques secondes du coup d’envoi, les Ultra Ahlawi (groupe de supporters hyper organisés qui suivent Al Ahly partout et se démarquent par des chants et des mouvements d’ensemble qui leur sont propres) lancent le feu dans les gradins. Pompiers et policiers s’affairent pour éviter tout débordement. C’est sur ces entrefaites que le match démarre en trombe côté Al Ahly qui ne veut pas donner du répit aux cotonculteurs, en témoigne ce face à face Barakat/Kassali dont le second sort vainqueur. Nous jouons la deuxième minute. A la troisième minute, une faute de Ousmaila Baba sur Gilberto entraîne un coup franc. Abou Treika trouve la tête de Wael Gomaa qui ne se fait pas prier pour loger la balle dans les goals de Daouda Kassali, impuissant. Cotonsport essaie tant bien que mal de se ressaisir, Kamilou esseulé n’arrive pas à combiner avec Ousmaila Baba, pas du tout dans son assiette. Au moment où Cotonsport récupère la domination du milieu de terrain et cherche à contenir la fougue des égyptiens, Kingué Mpondo commet une faute sur Abou Treika à la quatorzième minute. Le coup franc tiré par Ahmad Hassan est dévié de la tête par l’angolais Amado Flavio pour le deux Zéro.
Cotonsport n’aura donc pas échappé à la loi du « quart d’heure égyptien ». Cette loi qui est la clé de voûte d’une tactique bien huilée qui sous-tend l’invincibilité des clubs égyptiens à domicile. Assiéger l’adversaire dès les premières instants de la rencontre, lui porter même l’estocade, si possible. Crédités d’une bonne fin de première mi-temps et d’une bonne entame de la deuxième mi-temps, les coéquipiers de Amadou Ngomna vont réveiller les Ultras. Manuel José sent le danger et lance le tunisien Anis Bouguilban à la place de Ahmad Siddik, et le polyvalent Barakat est replacé sur le flanc droit. Côté coton, Sanda remplace Zoa Dogari. Les égyptiens reprennent le contrôle du milieu de terrain. Les assauts offensifs se multiplient, Abou Treika rate l’inratable à la 74ème minute; suivi de Flavio à la 81ème minute après un service du même Abou Treika. Le tir de Sayyid Moawwad est capté par Kassali à la 84ème minute. A la tribune de presse, envahie par des supporters surexcités qui montaient même sur les tables pour célébrer les buts, ces ratés suscitent des « Haramou Alayyyyyyyk » « pourquoi ne marquent-ils pas un troisième but qui libérerait les 70 millions d’égyptiens ? » L’entrée de Ossama Hosni à la 90ème ne changera rien.
Au coup de sifflet final, un feu d’artifice est lancé dans le « Shabba » des Ultras, pour célébrer cette victoire. L’essentiel est sauf, mais la marge n’est pas considérable. Cotonsport, au vu de ce qu’il a démontré par moment est aux yeux des moins fanatiques, capable de remonter les deux buts à Garoua dans deux semaines.
Moustapha Nsangou au Caire
Conférence de presse
Alain Ouombléon, Coach Cotonsport : « Félicitations à Al Ahly. Nous avons perdu la première partie. Le début a été fatal avec deux buts encaissés par coup de pied arrêté. A la deuxième mi-temps, mes gars ont bien joué. J’attends le second match qui va se jouer à domicile. Nous avons deux semaines pour le préparer et réparer nos erreurs. Avant de Jouer Al Ahly nous savions qu’il est une grande équipe, après ce match nous continuons à croire qu’Al Ahly est une grande équipe. Nous avons eu une mauvaise entame devant une bonne équipe d’Al Ahly dont les coups de pied arrêtés sont l’un des points forts. Au second match tout reste possible. Le résultat de deux zéro n’est pas toujours large. Nous avons l’habitude de lutter et de remonter les situations difficiles. Nous ne disons pas que nous allons marquer deux, trois buts. Nous avons deux semaines pour faire quelques réglages. Notre objectif de départ c’est de gagner cette finale, ce sera difficile. Tétanisés ? J’avoue que je n’ai pas reconnu mon équipe dans les trente premières minutes, mais après ils se sont retrouvés. Quant à l’ambiance du stade, chaque joueur rêve d’évoluer dans une telle ambiance. La différence avec nous c’est que nous arrivons à ce stade pour la première fois. Le match retour sera une belle finale pour nos spectateurs, que le meilleur gagne. »
Amadou Ngomna, capitaine Cotonsport : « Je félicite les joueurs d’Al Ahly pour leur victoire. Nous sommes déçus dans la mesure où nous avons encaissé deux buts sur coup de pied arrêté. Al Ahly est fort sur les coups de pied arrêtés. Nous avons travaillé cela avec le coach. Il y a un match qui se profile, on a joué à fond depuis le début de la compétition. Nous accueillons Al Ahly dans deux semaines et nous allons jouer notre chance à fond. La finale ne se joue pas en un seul match. Nous allons rectifier les petites erreurs de ce soir pour le prochain match. »
Manuel José, coach Al Ahly : « On gagnait ce match par 3 ou 4 buts. Mes joueurs ont fait un bon match, je suis content pour eux et pour le public. Le déplacement des joueurs sur le terrain était bon. La seconde manche n’était pas bonne. Mais 2/0 est une sérieuse option. Nous irons là-bas pour gagner, nous tâcherons de marquer avant eux sans en encaisser. Notre moral doit être plus haut car nous avons 70% de chance de gagner. Je suis heureux du travail abattu par ces joueurs qui sont à leur quatrième finale d’affilée. C’est un record que personne n’a encore égalé. L’adversaire ne nous a pas menacé. Il est vrai qu’il y a eu une confusion à la fin de la première mi-temps. C’est pour cela que j’ai opté pour l’attaque à outrance à la deuxième mi-temps parce que celui qui veut gagner doit attaquer. Nous ne sommes pas inquiets de ce qui se dit à propos de Garoua. Nous avons dernièrement joué à Aba contre Enyimba sur un champ de patate, cela ne nous a pas empêché de ramener un résultat positif. »
Propos recueillis par Moustapha Nsangou au Caire